Alors que cet été n’a finalement laissé que peu de répit aux joueurs, la rentrée a elle aussi démarré sur les chapeaux de roues et tout va s’enchaîner très vite jusque la fin d’année. Si les blockbusters les plus attendus sont les titres les plus mis en avant, il ne faut pas oublier que la scène vidéoludique est extrêmement vaste et regorge de jeux plus discrets mais aux qualités bien à eux. Parmi eux, on retrouve notamment Ys VIII: Lacrimosa of Dana, nouvel opus, de la licence Ys, qui vient tout juste de sortir en France (tandis qu’il est déjà disponible au Japon sur PS4 depuis plusieurs mois, et sur PSVITA depuis l’année dernière). Malgré son statut de jeu de niche, il s’est malgré tout offert une démo sur le PS Store européen et arrive même dans nos vertes contrées avec une traduction textuelle française. Cela sera-t-il suffisant pour permettre au jeu de FALCOM de jouer des coudes et des épaules avec les grosses sorties du mois ?
Test réalisé sur PS4 à partir d’une version fournie par l’éditeur
Ys passe quoi là ?
Les amateurs de JRPG, qui se trouvent probablement parmi ceux qui liront ces lignes, connaissent sans aucun doute la licence Ys. Créée par Nihon FALCOM en 1987, la série a donc soufflé ses 30 bougies cette année et ne semble pas prête de s’arrêter. « Tant mieux », vous diront les vieux briscards qui passaient des heures devant leurs écrans à tubes cathodiques, une manette de NES, PC Engine ou autre à la main. Car en trois décennie et des millions d’exemplaires vendus à travers le monde, on vous laisse imaginer le nombre de plateformes que la franchise a écumé. Des ordinateurs des 80’s à la PS2 en passant par la Nintendo DS et la PSP, pour finalement arriver enfin sur PS4. En voilà un beau palmarès, d’autant qu’en toutes ces années, peu d’erreurs de parcours ont été commises. Les plus pointilleux pourraient sans doute évoquer Ys Strategy, ce spin-off orienté tactical qui ne fut pas franchement une réussite. Mais il ne s’agit pas d’un opus canonique, alors on fera comme si de rien n’était.
Premièrement, si vous étiez un peu dubitatifs quant au fait de vous plonger dans Ys en commençant par le 8ème épisode, sachez qu’il n’y a absolument aucun souci à se faire en termes de narration, puisque s’il s’inscrit bien dans la continuité d’opus précédents (et plus précisément Ys V) il n’y est pas directement lié. FALCOM souhaite en effet que les joueurs puissent se pencher sur les aventures d’Adol avec l’épisode qui leur chante. Dans le cas présent, l’épisode 8 s’y prête à merveille, puisqu’il est disponible à la fois sur PS4, sur PSVITA et sur PC (enfin… dès qu’il disposera d’une nouvelle date de sortie suite à son très récent report). Concrètement, le jeu dispose donc d’une très belle couverture et il n’a plus qu’à espérer ferrer les éventuels intéressés. La présence d’une traduction française pourra en motiver certains, mais on ose espérer qu’à la lecture des lignes qui suivront, ce ne sera pas le seul facteur qui vous donnera envie de dire BANCO.
Les premières heures de jeu sur Ys VIII n’ont rien à voir avec la majorité des JRPG que l’on connait. En effet, les jeux de rôle typiquement nippons sont connus pour leurs dialogues interminables et un début très lent, histoire de bien conditionner le joueur à ce qui l’attend. On ne peut enlever aux développeurs japonais un certain savoir-faire dans ce domaine-là, mais reconnaissons que Ys VIII: Lacrimosa of Dana sait comment captiver le joueur dès le début et lui donner envie de ne plus lâcher la manette. L’aventure débute donc sur les mers, puisque notre héros, Adol, a décidé d’embarquer en tant que marin afin de pouvoir voyager en échange de bons et loyaux services. Il faut dire que le protagoniste principal de la licence semble légèrement atteint du syndrome de la bougeotte et ne tient pas vraiment en place. Le voici donc en train de voguer vers de nouveaux horizons.
L’élément déclencheur se voit venir à des kilomètres à la ronde dès lors qu’on nous annonce que le navire va passer près de l’île de Seiren, réputée pour être maudite. En effet, la légende dit que les bateaux passant trop près de l’île finissent par échouer, mais puisque personne n’a pu revenir vivant d’une telle catastrophe, ce ne sont vraisemblablement que des mythes. Pour l’instant du moins, puisque, vous vous en doutez, dès que l’embarcation va passer près de la fameuse île, la croisière ne s’amusera plus du tout. Après s’être échoué sur cette dernière, notre protagoniste fera très vite de nouvelles rencontres et retrouvera le capitaine du navire, qui lui demandera de la cartographier. Il nous incombera également de retrouver tous les passagers du navire afin d’espérer pouvoir quitter l’île.
L’âme de la carte
Ys VIII prend donc une dimension exploration plutôt intéressante qui finit vite par être très prenante, puisque l’envie de découvrir les moindres recoins de la map, de taille raisonnable pour un JRPG de cet acabit, se fera vite ressentir. Et comme on peut avoir accès à diverses informations (comme le nombre de ressources encore non découvertes, ou le nombre de coffres non ouverts), autant dire que les plus perfectionnistes passeront des heures à déambuler sur l’ile de Seiren. La progression sera parfois freinée par des obstacles qui ne pourront être déplacés qu’avec l’aide des rescapés, ce qui offre un bon ratio exploration/suivi de la quête principale.
Tous les ex-passagers du navires devront certes être sauvés, mais il faudra aussi les protéger et les nourrir. Avec comme nouvelle maison une île regorgeant de bestioles qui croqueraient bien un humain, il n’y a évidemment pas d’infrastructures à disposition afin de se loger ou se reposer. Le jeu nous propose donc de monter un village afin d’accueillir tout ce petit monde. Néanmoins, le joueur n’a aucune influence dessus, et l’ensemble se construira progressivement en fonction des rescapés ramenés. Toutefois, on apprécie de voir ce microcosme évoluer, parfois tisser des relations avec nous (en fonction des quêtes annexes que l’on acceptera, ou pas) et se voir proposer de nouveaux services. Car oui, certains PNJ proposeront de nous aider en nous faisant profiter de leurs talents, comme Catherine la forgeronne qui permet à Adol et ses compères d’améliorer clairement les armes qu’ils utilisent, ou encore Alison qui ouvrira une mercerie bien plus utile qu’elle n’en a l’air.
Sinon, comment ça bat ?
Tout ceci est bien beau, mais pour construire un village et sauver les rescapés du Lombardie, encore faudra-t-il se battre. Et pour cela, Ys VIII: Lacrimosa of Dana met au service du joueur un gameplay tout en simplicité : une touche pour effectuer des attaques normales, des techniques activables avec R1 (par défaut) + Croix, Carré, Triangle ou Cercle, des esquives et une garde éclair. Soulignons également le retour du saut, qui était aux abonnés absents dans le dernier opus et qui revient ici afin d’offrir un peu plus de variété aux affrontements, puisque certains boss auront des points faibles situés à différentes parties du corps. Concernant la garde éclair et l’esquive, ce sont deux fonctionnalités qu’il faudra impérativement maitriser puisque, effectuées au bon moment, elles permettent soit de figer les ennemis un court instant (esquive) ou bien d’offrir un léger bonus d’attaque à notre personnage. Puisque notre équipe peut être composée de 3 personnages actifs (que l’on peut changer à tout moment de façon instantanée) et que chacun possède un type différent offrant des avantages ou inconvénients face au bestiaire du titre de Falcom, il faudra switcher assez régulièrement entre eux. On ne peut hélas pas vraiment leur donner d’ordres précis puisque ces derniers pourront soit être orientés Attaque, soit se concentrer sur la Défense en fonction de ce que l’on choisit.
Mais les combats ne sont qu’une partie de tout ce que Ys a à offrir aux joueurs en termes de gameplay. Le parcours initiatique se fait tout en douceur, là où certains titres favorisent le bourrage de crâne et dévoilent toutes les possibilités dès les 2/3 premières heures de jeu. Ys VIII, de son côté, la joue tout en douceur et dévoile au fur et à mesure tout ce que le gameplay a à nous offrir jusqu’à ce que les crédits défilent. Au même titre que la progression qui se veut continue et relativement bien balancée tout au long de l’histoire. C’est un véritable atout, notamment pour un jeu de rôle qui nous pousse à nous intéresser aux personnages et à l’univers qu’il met en place. On assimile donc les différentes fonctionnalités du gameplay petit à petit, et cela permet de mieux les appréhender et de ne pas en laisser de côté, ce qui serait fort dommage.
On pense par exemple à la pêche, qui ne s’est jamais avérée ennuyante, là où d’autres jeux parviennent à rendre la chose particulièrement exaspérante. Il y a aussi l’aspect tower defense qui rentre en compte, et qui nous amène à peaufiner les défenses du village afin de pouvoir résister face aux attaques de monstres qui surviendront à n’importe quel moment. S’il nous est offert la possibilité de rejoindre notre fief dès qu’un assaut est en cours, on peut tout aussi bien laisser nos compères se débrouiller (mais dans ce cas, attention aux dégâts !). Le système de voyage rapide permettant de rejoindre instantanément différents points importants de la carte aide beaucoup il faut dire, et si le loot est quasi-indispensable dans Ys VIII: Lacrimosa of Dana, on prend malgré tout plaisir à aller d’un point A à un point B. Non pas par obligation, ou parce qu’il nous faut impérativement un quota précis de ressources afin de créer une arme. Mais plutôt pour la raison que Toshihiro Kondo nous avait vanté lors de notre interview en sa compagnie, à savoir le gameplay du titre, qui pourrait nous faire combattre des heures durant. Il faut dire que le système de jeu est tellement dynamique et fluide qu’on n’a pas une seule fois réussi à s’ennuyer.
« Fort heureusement », nous direz-vous, car avec une durée de vie d’au moins 40 heures pour boucler l’histoire principale, il vaut mieux ne pas se lasser rapidement des affrontements. La durée estimée annoncée ci-dessus ne comprend évidemment pas la traversée du jeu à 100%, ni même l’exploration de la map ou des donjons supplémentaires. Des petits détails qui permettent d’offrir une bonne dizaine d’heures supplémentaires au jeu, et encore… Bien des éléments donnent envie de rester dans l’univers d’Adol, et l’OST en fait également partie. Rien de très étonnant à cela puisque la Falcom Sound Team jdk est connue pour ses bandes originales fabuleuses et avant-gardistes. Des thèmes entraînants oscillant entre le power metal et le rock bien énervé, accompagnés de synthé un brin kitch mais terriblement efficaces en combats, des musiques plus lancinantes lors de l’exploration qui restent en tête… De plus, le jeu a conservé son doublage japonais en traversant les frontières niponnes tout en s’offrant une traduction française. Très perfectible, elle rend tout de même Ys VIII: Lacrimosa of Dana très accessible et en fait donc un JRPG presque tout public, pour peu qu’on lui pardonne son aspect graphique vraiment daté. Le contraire serait dommage et priverait les joueurs d’une aventure de haute volée. Notez d’ailleurs que le jeu est disponible à la fois sur PS4 et sur PSVITA, mais cette dernière étant sortie avant, elle s’avère posséder moins de contenu et tourne forcément moins bien que la version console de salon. Sans la présence du cross-save (justement dû au fait que la version PS4 soit plus approfondie et propose des nouveautés), on ne saurait que trop vous contenter de l’aventure sur grand écran. À moins qu’une version Switch soit sur les rails… Comment ça on croise les doigts ?
Verdict : 8/10
Qui a dit que le RPG japonais ne passait que par les grands noms que l’on connait déjà tous ? S’il n’a pas la profondeur d’un Persona 5 ni la réalisation d’un Final Fantasy XV, Ys VIII: Lacrimosa of Dana possède de nombreuses qualités qui en font un jeu de rôle indispensable pour tous les amateurs du genre. Sa relative accessibilité permettra au grand public de faire connaissance avec une licence qui a inspiré beaucoup de grands noms du JRPG, et qui est reconnue comme l’une des oeuvres fondatrices du genre. Son histoire en deux temps, avec le destin de la jeune Dana indubitablement lié à celui d’Adol, son gameplay nerveux, son OST (d’ailleurs déjà disponible sur Spotify) ou encore son exploration, rendent le titre terriblement accrocheur, à tel point qu’on regretterait presque de devoir éteindre la console lorsque l’on n’a pas le choix. Un JRPG certes encore méconnu en France, mais qui joue aisément dans la cour des grands.
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