On pourrait presque dire que Nintendo et les jeux de plateforme, c’est un peu comme une grande histoire d’amour. La firme nipponne exploite souvent ses franchises phares dans ce genre très prisé, de par son accessibilité aux petits comme aux grands et ce qu’ils soient des joueurs acharnés ou non. Pourtant Nintendo c’est aussi l’école de la créativité, avec des concepts parfois étranges, des idées novatrices (même si elles peuvent prendre forme de façon étrange) et toujours cette envie de se renouveler afin d’offrir des expériences nouvelles. C’est un peu dans cette optique-là qu’a été développé Yoshi’s Crafted World, puisque le titre prend la forme d’un plateformer comme on en a déjà vu des dizaines chez Big N tout en prenant place dans un univers fait de papercraft. Est-ce un jeu en carton pour autant ?
Test réalisé à partir d’une version fabriquée à la main par l’éditeur
« It’s me, Yoshi »
Le fidèle destrier de Mario s’offre une fois de plus une aventure en solo, après s’être invité sur Nintendo 3DS via le portage de Yoshi’s Woolly World. Au premier abord, il n’y a pas de réelle surprise, que ce soit dans le scénario comme dans le style de jeu, puisqu’il s’agit grosso-modo d’un jeu de plateforme dans lequel on incarne, vous l’aurez deviné, Yoshi. Mais ce serait bien réducteur de ne considérer le titre de Good Feel comme un énième titre du genre, puisqu’il s’offre des qualités qui sont bien à lui et qui lui permettent justement de briller. Et ça tombe plutôt bien, car on n’en attendait pas moins de Nintendo pour sa dernière exclusivité Nintendo Switch.
Pour vous situer un peu le contexte, Yoshi et ses amis vivaient paisiblement sur leur île, jusqu’à ce que Bébé Bowser et Kamek viennent perturber leur tranquillité. En effet, les deux compères sont toujours dans les mauvais coups et leur dernière trouvaille pour embêter les petits dinos de toutes les couleurs fut de voler le soleil aux rêves. Évidemment rien ne se passera comme prévu, puisque ce sont les gemmes de ce soleil qui se retrouveront éparpillées à travers le monde. Il incombera donc à un (ou deux, si vous désirez jouer en multijoueur) Yoshi de prendre son courage à deux mains et d’aller parcourir les nombreux environnements dans lesquels se sont dispersées les gemmes afin de rétablir la paix sur leur île. Un postulat de base naïvement mignon qui en dit long sur l’aventure qui s’annonce.
Car effectivement, le scénario n’est pas franchement le principal attrait du titre. Pourtant, il en vient à offrir des rencontres plutôt marrantes et quelques cut-scènes vraiment sympathiques. Le jeu mise clairement sur cette ambiance bon enfant qui, certes, amusera davantage les petits que les grands. Mais autant vous prévenir, même le hardcore gamer qui se cache en vous et qui ne jure que par Dark Souls pourra se retrouver happé par Yoshi’s Crafted World. C’est là toute la magie du jeu développé par Good Feel, grâce à son ambiance totalement décomplexée et adorable.
Direction artistique façon arts plastiques
Si Yoshi’s Crafted World parvient à avoir cette sorte d’emprise sur les joueurs de tous les horizons, c’est notamment dû à sa direction artistique complètement réussie. Cette dernière transforme des environnements relativement conventionnels en décors fabriqués à la main à l’aide d’objets du quotidien : carton, papier aluminium, pailles en plastiques, assiettes cartonnées, briques de jus de fruits/lait, boites de conserve et canettes… Absolument tout y passe, le tout accompagné d’une créativité débordante dans la conception des différents éléments. Sur le papier, il y a fort à parier que cela peut sembler un peu étrange, pourtant l’univers coloré de Yoshi prend une fois de plus vie de la plus belle façon qui soit et on ne peut que saluer le travail des développeurs qui parviennent à passer outre les capacités techniques de la Switch afin d’offrir un rendu vraiment unique.
Yoshi, quant à lui, prend l’apparence d’une petite peluche de feutrine, se déplaçant avec la plus grande aisance dans les nombreux niveaux qui jonchent l’aventure. Niveau capacités, la créature peut évidemment sauter afin d’éliminer les ennemis les plus basiques, mais aussi en avaler un plus grand nombre afin de les transformer en œufs, qui feront des projectiles de premier choix. Ces derniers sont d’une importance capitale puisqu’ils permettent non seulement d’être utilisés afin de se défendre mais ils permettent également de viser certains éléments du décor afin de dévoiler de nombreux secrets et objets cachés. Grâce à la direction artistique façon papercraft, les niveaux peuvent être explorés sur plusieurs plans, et on peut évidemment tirer sur des éléments du décor qui se situent, au premier plan ainsi qu’au dernier plan. On se prend alors à essayer de dégommer un peu tout ce qui pourrait faire une cible potentielle et pas seulement afin de glaner quelques pièces mais aussi pour voir s’il est possible de faire tomber le panneau publicitaire, en fond. Ou bien le rocher au premier plan, qui pourrait sans nul doute receler un autre bonus…
Sans timer venant presser le joueur afin de compléter les niveaux dans les plus brefs délais, on prend un véritable plaisir à explorer les environnements de fond en comble, à tenter d’accéder à des endroits inaccessibles au premier abord ou simplement à prendre son temps afin de profiter de ce trop-plein de good vibes. Chaque session de jeu se veut reposante et offre un véritable moment de détente, parfait donc histoire de décompresser un peu le temps d’un trajet en transports en commun après une journée de travail stressante. Ceci étant dit, n’allez pas croire que Yoshi’s Crafted World se complaît dans la facilité. Le jeu est effectivement relativement accessible, avec un mode Relax qui servira surtout aux plus jeunes, afin de profiter de l’aventure sans être rebuté par la difficulté. Ce dernier permet à Yoshi d’obtenir 2 œufs en cas de gobage d’ennemi tout en bénéficiant d’une paire d’ailes qui lui permet littéralement de flotter dans les airs.
Pas l’temps d’niaiser sur l’île de Yoshi
Cela dit, en mode classique le challenge est aussi de la partie, avec en premier lieu les nombreux collectibles à ramasser dans chaque niveau. Entre les fleurs sourires, qui sont d’ailleurs l’une des monnaies du jeu afin de débloquer l’accès à certaines zones, les cœurs et les pièces rouges, obtenir 100% de complétion à chaque niveau demandera à minima 2 passages, à moins de prendre largement son temps lors de la première exploration. Vous en voulez encore ? Pas de souci : chaque niveau complété peut-être parcouru en mode verso. Dans ces derniers, l’objectif est de retrouver les 3 tipoochys, et si possible avant la fin du chrono imparti. Et pour les plus acharnés, notez que des fleurs sourire bonus sont à récupérer contre des trouvailles demandées par les différents personnages qui ouvriront l’accès à Yoshi à de nouvelles zones.
En termes de contenu, Yoshi’s Crafted World remplit largement son office, une bonne grosse poignée d’heures sera nécessaire pour simplement parcourir l’ensemble d’une traite. D’autant qu’avec les pièces d’or récupérées dans les niveaux, notre héros pourra s’offrir de nouvelles tenues cartonnées, afin de traverser les innombrables environnements avec classe… Ou pas. Certes, elles sont plutôt pathétiques à première vue, mais toujours dans le ton de la D.A. Leur rôle n’est d’ailleurs pas seulement cosmétique, puisqu’en fonction de leur rareté, elles permettent d’encaisser plus ou moins de dégâts. Attention cependant, puisque les tenues, une fois détruites, ne peuvent être récupérées. Dommage cependant qu’elles n’offrent pas d’autre(s) effet(s), puisque leur utilisation reste malgré tout anecdotique dans l’idée. La chose amusera davantage les moins âgés (même s’il faut avouer que voir Yoshi déambuler avec un pot de yaourt en guise de tenue a tout de même de quoi faire sourire).
Si Yoshi’s Crafted World peut vite devenir assez répétitif, la grande diversité des niveaux, avec certains offrant leurs propres caractéristiques, permet notamment de pallier à cela. On note également quelques combats contre des boss, jamais très compliqués dans l’ensemble, mais assez inventifs pour stimuler le joueur. En revanche, on aurait apprécié un peu plus de diversité en ce qui concerne la bande-son du jeu, car la vingtaine de pistes incluses peut très vite devenir un peu agaçante. Ne vous y trompez pas, en plus de coller parfaitement à l’ambiance délicieusement niaise et mignonne du jeu, elles ont l’art et la manière d’accompagner les nombreuses situations loufoques que l’on rencontrera au fil des pérégrinations de notre héros. Cependant, le thème principal est un peu trop recyclé alors que le total de musiques, lui, est déjà bien restreint. Attention à l’overdose donc.
On ne le répétera jamais assez, mais les nouvelles aventures de Yoshi sur Nintendo Switch ne seront jamais mieux vécues qu’en présence d’un bambin, qui sera forcément émerveillé devant un jeu qui lui rappellera de nombreuses activités manuelles auxquelles il peut s’adonner. Le côté paisible et le rythme tout en douceur de l’aventure en font un titre idéal pour se détendre en solo tout en étant parfaitement adapté au jeu à deux.
Verdict : 8/10
Yoshi’s Crafted World est l’exemple parfait du jeu absolument rafraîchissant qui parvient à toucher petits et grands, qu’ils soient des joueurs confirmés ou non, grâce à sa mise en scène sacrément efficace et sa direction artistique unique en son genre. Le jeu déborde de musiques trop peu variées malheureusement mais qui parviennent malgré tout à rester en tête et s’offre un univers coloré et choupinet au possible. Si certains risques d’être écœurés, force est de reconnaître que Good Feel offre ici aux joueurs l’exemple parfait du platformer feel good, celui que l’on lance pour le simple plaisir de retrouver un univers doux et chaleureux, dans lequel on ne cherche pas à être le meilleur, ni même à être le plus fort, mais simplement à profiter d’un chouette moment de jeu vidéo. Une expérience adorable à recommander aux plus jeunes comme aux plus bourrus qui pourraient bien plus facilement être charmés par ce titre de qualité qu’ils n’y croiraient.
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