Septième volet canonique de la saga d’action-aventure créée par Toshihiro Nagoshi, Yakuza: Like a Dragon s’apprête à débarquer en Occident ce 10 novembre prochain. Le titre se veut chambouler la franchise et ce par divers aspects. Nouvelle ville, nouveau système de combat mais surtout nouveau protagoniste. L’épopée de Kiryu Kazuma s’étant conclue dans Yakuza 6: Song of Life, le grand ténébreux laisse place à Ichiban Kasuga pour ce nouvel opus. Vous l’aurez compris, Yakuza: Like a Dragon semble vouloir imposer quelques changements radicaux sans pour autant jeter l’entièreté de l’âme de la série à la poubelle. Des prises de risques assumées mais que Nagoshi n’exclut pas de modifier par la suite si la sauce ne prenait pas comme convenue auprès des fans. Yakuza: Like a Dragon nous a-t-il séduit ? La réponse dans ce test.
Test réalisé sur PlayStation 4 grâce à une copie numérique envoyée par l’éditeur
Ichiban Kasuga, un loser au grand cœur
Nous sommes à l’aube de l’année 2002 quand Ichiban Kasuga, 24 ans, sert encore comme homme de main du clan Arakawa, une des nombreuses familles rattachées au clan Tojo. Vu comme un bon à rien par plusieurs de ses pères, il obtient néanmoins la sympathie du patriarche : Masumi Arakawa. Depuis qu’Arakawa a sorti notre bon Ichiban d’un bourbier quelques années auparavant, ce dernier lui voue une dévotion sans faille. Au lendemain du Nouvel An, Ichiban est convoqué par Masumi qui lui demandera de porter sur ses épaules le meurtre d’un membre d’une autre famille yakuza. A l’origine, le meurtre serait l’œuvre du second de Masumi – Jo Sawashiro – personnage qui ne porte pas vraiment Kasuga dans son cœur et réciproquement. Ayant une dette envers son protecteur, Ichiban Kasuga accepte de prendre 15 ans de prison à la place de Jo (cela a un air de déjà-vu, non ?). Poussé à bout par ses codétenus, Ichiban usera de violence, ce qui lui vaudra une réévaluation de sa peine, passant de 15 à 18 ans de prison.
Dix-huit années plus tard, Ichiban est libre mais personne de sa famille pour l’accueillir. Oublié malgré ses loyaux services, notre héros est en quête de réponses et ira même jusqu’à confronter son propre boss. Blessé par balle et laissé pour mort, Ichiban reprendra conscience dans un tas d’ordures à Yokohama, à plusieurs heures de Kamurocho. Il fera très rapidement la connaissance de Namba, un SDF avec qui il se liera d’amitié. L’objectif d’Ichiban Kasuga sera de se former une petite équipe et de régler ses comptes avec son ancienne famille afin d’obtenir la véritable raison pour laquelle son retour semble être une épine dans le pied de la famille Arakawa. Qu’on se le dise, si Ichiban Kasuga n’est pas un mauvais héros en soi, il est difficile de rivaliser avec le charisme de Kiryu Kazuma qui nous aura accompagné durant tant d’années. Cependant, malgré son côté boyscout, son aventure passe par différentes émotions pour le rendre arrachant et nous donner l’envie d’en apprendre plus sur lui à l’avenir.
Bienvenue à Yokohama
Bien que l’aventure débute dans ce bon vieux Kamurocho au début des années 2000, Yokohama sera votre terrain de jeu principal. La superficie du nouveau quartier d’Isezaki Ijincho s’avère plus étendue que celle de Kamurocho – environ deux fois la taille du quartier de Tokyo au jaugé. Comme toujours, la ville respire la vie de par les nombreux piétons que vous pourrez croiser dans les rues ainsi que les voitures circulantes sur les grands axes. Les taxis disséminés un peu partout son toujours de la partie afin de rendre le trajet d’un point A à un point B moins rébarbatif. Nouveauté, le quartier est lui-même subdivisé en plusieurs blocs. Cela a un impact sur la partie combat que nous verrons un peu plus bas. Car oui, en vue de la tournure RPG que Yakuza: Like a Dragon emprunte, chaque bloc indique un niveau de menace plus ou moins élevé avec des adversaires s’adaptant à ce dit niveau. Autant dire qu’en début de partie, vous risquez de raser les murs et éviter un maximum les confrontations quand la quête principale vous pousse à vous rendre à des endroits un peu trop dangereux au regard de votre niveau actuel.
Comme toujours, la ville grouille de commerces, de lieux de détentes et de quêtes secondaires. Malgré la présence de sujets un poil tabous et limites comme souvent dans la saga Yakuza, Ryu Ga Gotoku Studio arrive toujours à traiter la plupart des sujets avec humour mais sans pleinement tomber dans la dérision ou la caricature gratuite. On retrouve bon nombre d’activités pour se divertir entre deux missions, certaines bien connues et d’autres inédites. Golf, Mahjong, frappe à la batte, karaoké mais aussi karting et pachinko – malheureusement indisponible avant la sortie officielle du jeu. Petit coup de gueule cependant concernant les jeux d’arcade présents. Encore une fois, Yakuza fait preuve d’une certaine fainéantise en refourguant des titres déjà proposés à outrance dans les précédentes productions de Ryu Ga Gotoku Studio. De nouveau, vous allez manger du Virtua Fighter 2 et 5, du Space Harrier, du Fantasy Zone et autre Super Hang-On. Pourtant, les grands jeux de l’arcade made in SEGA, ce n’est pas ce qui manque ! Virtua Cop, SEGA Rally, Daytona USA, Last Bronx, Die Hard Arcade et bien d’autres – certains étant même l’œuvre de Toshihiro Nagoshi en personne. Un effort fait à ce niveau-là serait le bienvenu pour les productions prochaines car la lassitude se fait un poil ressentir pour les afficionados de jeux d’arcade.
L’argent est une denrée rare dans Yakuza: Like a Dragon. Votre quotidien de sans domicile fixe et de chômeur vous incitera à fouiller les distributeurs à boissons pour mettre la main sur quelques sous, en plus de ce que vous récolterez en fin de combats ou lors de petits boulots. Des ATM sont disponibles dans certaines boutiques afin que vous puissiez retirez de l’argent mais, surtout, le déposer. En cas d’échec d’un combat, vos assaillants ne se gêneront pas à vous taper les poches pour vous prendre la moitié de vos gains ! Pensez donc à régulièrement déposer votre argent à la banque afin de le sécuriser au maximum. N’hésitez pas à le dépenser dans de l’équipement, des consommables pour vos combats mais aussi pour des sorties avec vos acolytes. Cela aura pour bénéfice d’améliorer vos relations entre les membres de votre groupe et de leur donner accès à de nouvelles compétences au fil du temps.
Quand la licence du Beat’em All prend un virage RPG
Un parti pris qui en aura dérouté, voire inquiéter, plus d’un. La série est habituée à une approche plus directe mais Yakuza: Like a Dragon s’adonne à un système de combat au tour par tour à la manière d’un J-RPG plus conventionnel. Même si on peut apprécier le côté défouloir que la saga Yakuza offre depuis ses débuts, force est de constater que la recette commençait à tourner en rond avec finalement très peu d’ajouts d’un épisode à l’autre. Le titre tente de justifier cette tournure de deux façons. Tout d’abord, Nagoshi souhaitait vraiment mettre en avant l’aspect « gang » et que le système de combat de base aurait découlé sur quelque chose de bien trop brouillon. Deuxièmement, Ichiban Kasuga lui-même. Notre bougre ne se gêne pas pour admettre que son rêve eut été d’être un héros comme un personnage de Dragon Quest ! Conscient de l’hypothétique grogne que cela pourrait engendrer chez les puristes, Nagoshi s’est déjà prononcé sur le sujet et a prévu de revenir sur quelque chose de plus traditionnel pour la suite si la sauce venait à ne pas prendre.
Au final, ça donne quoi ? Eh bien ça marche. Comme nous le mentionnions dans notre preview, l’approche peut paraitre déroutante les premières minutes pour un habitué de la licence mais très vite, on se prend au jeu. Bien que les combats soient au tour par tour, ils gardent tout de même un certain dynamisme, les divers protagonistes étant en mouvement quasi permanent. Cela vous oblige à réfléchir et à agir vite. En une fraction de seconde, un adversaire est susceptible de s’intercaler entre vous et votre cible, ce qui aura pour effet de voir votre action contrecarrée. De même avec les attaques de zone, vouloir englober un groupe de vilains gredins dans votre attaque une seconde de trop et c’est trop tard, la plupart s’étant un poil trop dispersés pour subir des dégâts.
Quand un combat débute, une croix avec diverses options apparait dans le coin bas droit de votre écran. Chaque action correspond à une touche de votre manette : Croix pour une attaque standard, Carré pour accéder aux objets consommables, Triangle pour utiliser les sorts en contrepartie d’une portion de votre mana, Rond pour passer en position défensive et L1 pour tenter de fuir un combat. A l’instar d’un RPG standard, vos personnages ainsi que vos ennemis seront résistants à certains types d’attaques et faibles à d’autres. Afin de protéger au mieux vos héros, il est possible d’acheter de l’équipement pour diverses parties du corps ainsi que des accessoires. Lorsque survient le tour d’attaquer pour vos adversaires, si ces derniers ne ratent tout simplement pas leurs coups, vous pourrez tenter une « Parade Parfaite » en appuyant sur Rond ou B selon si vous jouez sur une manette PlayStation ou Xbox. Cela aura pour effet de réduire les dégâts reçus. Le timing pour réussir une parade reste néanmoins très restreint et difficile à maîtriser à la perfection. Cela se complique davantage quand la caméra décide de vous jouer des tours. Il arrive qu’un adversaire s’attaque à vous avant que la caméra ne se positionne sur le personnage concerné, ce qui rend la chance de succès de contrer l’attaque pratiquement impossible. Si Ichiban est mis K.O., peu importe si ses coéquipiers sont toujours debout, le combat est perdu.
Au fil de son périple, Ichiban se forgera une amitié avec de nombreux personnages, à commencer par Namba, un ancien docteur devenu SDF après s’être fait pincé dans une affaire de revente de produits médicaux de manière illégale. Viendront s’ajouter Koichi Adachi, Saeko Mukouda ainsi que d’autres protagonistes. Toujours dans une optique RPG, chaque personnage a son rôle. Ichiban fait office de guerrier de base, Namba du mage de la team, Adachi du tank et ainsi de suite. Rempoter des combats fera passer des niveaux aux membres de votre équipe et leur donneront accès à de nouvelles compétences. Vous pourrez même pratiquer des attaques conjointes via « l’Essence du Chaos ». Un peu plus tard vous pourrez également bénéficier d’« Invocations » (les Acolytes) à utiliser en combat contre une certaine somme d’argent. Faisant écho aux invocations que l’on peut retrouver dans les jeux tels que Final Fantasy, Tales of et autres RPG japonais, elles se révèlent très souvent farfelues, dans la grande coutume de Yakuza.
Dragon Engine et PlayStation 4, forces et faiblesses
Yakuza: Like a Dragon est la quatrième production de Ryu Ga Gotoku Studio utilisant le fameux Dragon Engine, succédant à Yakuza Kiwami 2, Song of Life et Judgment. Avec lui le titre apporte les atouts développés aux travers des productions précédentes, mais aussi quelques faiblesses persistantes. Tout d’abord, un comparatif entre notre preview sur PC et cette review sur PS4 nous permet de constater un rendu nettement inférieur sur PlayStation 4 classique. Loins d’être vilain, le titre affiche tout de même un rendu beaucoup plus grossier à certains égards, notamment de jour. Textures plus fades, clipping omniprésent, quelques soucis de framerate… le portage sur la console de Sony rend ce Yakuza: Like a Dragon un poil plus daté qu’il n’en a l’air. C’est sans compter les nombreuses cinématiques, hors CGI, ne comportant rien d’autres que de brèves onomatopées de la part des protagonistes ainsi que des animations faciales et gestuelles d’un autre temps, constante dans la saga malgré son passage sur le Dragon Engine depuis Yakuza 6: Song of Life. Ryu Ga Gotoku Studio semble encore à la traîne et n’avoir pas évolué sur la mise en scène d’objectifs secondaires depuis la sortie de Yakuza 0 en 2015.
Malgré ces quelques défauts, Yakuza: Like a Dragon reste un plaisir à parcourir. Une ville vivante où entrer n’importe quel commerce est instantané. Une bande son mi-rock, mi-électro très réussie comportant de nouvelles compositions ainsi que quelques thèmes issus de précédents opus. La possibilité de sauvegarder à n’importe quel moment sans avoir à passer par une cabine téléphonique comme sur les opus utilisant le moteur précédent. Yakuza: Like a Dragon étant probablement le dernier volet à sortir sur la current gen, il sera intéressant de voir comment le studio nippon tirera profit des capacités de la PlayStation 5 et la Xbox Series X pour proposer une expérience encore plus jouissive et, espérons-le, se débarrasser des quelques lacunes encore présentes. A l’image de Judgment, Yakuza: Like a Dragon se voit agrémenté de sous-titres multilingues ainsi que d’un doublage en anglais en plus de celui en japonais par défaut. Mais comme dit le vieil adage : si un vrai Yakuza joue à la manette, il joue aussi en japonais !
Verdict : 8/10
Yakuza: Like a Dragon s’inscrit dans la digne lignée de ses prédécesseurs. Alternant entre humour, drame, trahison et violence, tous les ingrédients sont réunis pour engendrer une grande aventure dont Ryu Ga Gotoku Studio a le secret. En somme, vous ne serez pas dépaysé si vous êtes connaisseur de la saga. Néanmoins, la nouvelle direction entreprise en ce qui concerne le système de combat peut faire grincer quelques dents. A moins que vous ne soyez totalement hermétique au format RPG tour par tour, il serait vraiment dommage de bouder ce titre qui se hisse comme un des hits de cette année 2020 sans aucun problème. Vivement la suite !
Laisser un commentaire