On peut dire qu’Ubisoft fait partie de ces éditeurs ayant le nez creux. En effet, en marge de ses licences faîtes maison fédérant public répondant toujours à l’appel (on pense notamment aux Assassin’s Creed ou Far Cry), il a su acquérir deux franchises possédant des communautés importantes et qui parviennent généralement à faire l’unanimité auprès des amateurs : Trackmania et Trials. Tandis que la première met le joueur aux commandes de véhicules à 4 roues, le deuxième met en avant la moto-cross avec tout l’aspect sport extrême que l’on peut lui connaître. Si dans les deux cas, il s’agit de faire preuve de rigueur et de précision pour s’en sortir avec la médaille d’or, on s’intéressera aujourd’hui à la deuxième licence, accouchant enfin d’un nouvel opus justement nommé Trials Rising.
Test réalisé sur PS4 et Nintendo Switch à l’aide de versions numériques fournies par l’éditeur
They see me Risin’, they hatin’
Si la licence Trials a su faire l’unanimité auprès des joueurs, notamment avec l’excellent Trials Evolution, on a vite constaté que le tournant qu’elle a pris suite à son acquisition par Ubisoft n’a pas su provoquer la même émulation. On ne pourra pas reprocher à l’éditeur de ne pas avoir pris de risques : Trials Fusion marquait une rupture avec son aspect presque futuriste et l’arrivé du mode FMX, tandis que Trials of the Blood Dragon était l’opus déjanté par défaut reprenant les codes de Far Cry 3 Blood Dragon et intégrant des passages de shoot à pied. Trials Rising est donc l’occasion pour la licence de revenir en force en se concentrant sur l’ADN même de la franchise, composée de 3 éléments que sont la création, la compétition et la communauté. Autant vous rassurer de suite, ce n’est pas pour autant que les nouveautés sont mises de côté (puisqu’elles sont bien présentes), mais l’envie de se recentrer sur l’essentiel pour offrir un titre fidèle à ses racines se ressent énormément.
Tout en sobriété, Trials Rising pose les bases de son univers après la course d’introduction : ici, on se bat pour devenir le meilleur à travers la bonne grosse centaine de pistes qui sont proposées. Pour autant, le titre verse peut-être moins dans l’élitisme que ses prédécesseurs puisque par le biais de tutoriels qui reprennent les bases du gameplay, le joueur est accompagné afin d’apprendre à maîtriser sa monture d’acier comme il se doit. Loin d’être un ajout sans importance, il permet aux novices d’apprendre que la simplicité du gameplay ne l’empêche pas pour autant d’être exigeant et se veut être un véritable parcours initiatique. Une jolie porte d’entrée pour ceux qui ont toujours suivi la licence du coin de l’œil sans jamais oser sauter le pas, d’autant qu’il permet aussi de se familiariser avec les techniques avancées permettant de se frotter aux pistes plus complexes.
Rappelons que le gameplay se contente du strict nécessaire ayant déjà fait ses preuves par le passé : on accélère et freine à l’aide des gâchettes, tandis que le stick gauche permet d’orienter le poids du pilote sur la moto. La physique est au cœur du gameplay de Trials, puisqu’il faut gérer l’inclinaison de la moto en fonction de la vitesse et du terrain. Ce qui semble facile sur le papier l’est beaucoup moins dans les faits, car si les bases s’assimilent rapidement, on en vient vite à devoir faire preuve d’un grand sens du timing ainsi qu’à doser les mouvements du pilote pour essayer de passer le moins de temps en l’air. Alors que l’on pourrait croire qu’il est bon de passer le plus de temps possible dans les airs, on s’aperçoit vite qu’il vaut mieux essayer de vite retomber sur ses deux roues afin de toujours maximiser sa vitesse. Lorsque les choses se corsent, il faut apprendre à gérer les motos (elles sont ici au nombre de 3 en plus du BMX et du modèle Donkey) afin se pouvoir réaliser des sauts précis afin de passer de plateforme en plateforme. Heureusement, la progression est assez bien gérée pour que l’on ne se sente pas dépassé.
Des motos et des contrats
Ainsi via la carte du monde en mode Course (l’équivalent du mode solo en quelque sorte), sont proposées des pistes aux quatre coins du globe. Ces dernières se débloquent par lot de 8 dès lors que l’on termine une ligue, un enchaînement de 3 courses qui place le joueur face à 8 adversaires, puis 4, puis 1. En plus du simple fait de terminer une piste en remportant une médaille de bronze, d’argent ou d’or, on retrouve désormais le système de contrats qui impose de remplir certaines conditions afin de les compléter. Il s’agit généralement de terminer un tracé en faisant le moins de fautes possibles ou dans un temps limité mais il existe autant de variantes que possible, tout en sachant que les contrats proposent également une difficulté qui leur est propre. Concrètement, cela veut dire que l’on peut tout aussi bien tomber sur un contrat relativement difficile sur une piste facile.
Les contrats se débloquent d’ailleurs au fur et à mesure de l’avancement dans le jeu, grâce au système de sponsors. Derrière ce nom et ce concept aguichants se cachent des protagonistes qui offriront simplement de nouveaux défis tels qu’un nombre de fautes à ne pas dépasser, un certain nombre de backflips/frontflips à effectuer, etc. En soi, l’idée aurait pu être un peu plus creusée et offrir un véritable système de sponsoring allant de pair avec l’évolution de notre pilote, permettant de gérer sa carrière. Mais n’oublions pas que l’on se trouve face à un Trials, et que le but en soit est avant tout de maîtriser les pistes tout en réalisant les meilleurs temps. D’autant que si le jeu propose de base un contenu vraiment solide, il est seulement facturé 25€ dans son édition simple (contre une quarantaine d’euros pour la version Gold comportant le season pass), un tarif relativement doux surtout si on le compare au nombre d’heures que l’on peut passer sur le soft. Profitons en pour noter qu’Ubisoft, dans sa grande magnanimité, n’a pas jugé utile de gonfler le prix de la version Nintendo Switch comme le font bon nombre d’éditeurs dans ce cas.
D’ailleurs, à un tel prix, on aurait pu s’attendre à ce que le jeu nous offre une OST des plus basiques, bien que les plus anciens d’entre vous se souviennent peut-être des guitares rugissantes de Trials Evolution qui manquaient terriblement à Trials Fusion. Si on aurait apprécié de retrouver à nouveau le talent de Power Glove (on ose espérer que la bande-son de Trials of the Blood Dragon figure dans la bibliothèque de votre service de streaming musical préféré), l’éditeur a opté pour une solution plus simple, mais tout aussi efficace si ce n’est plus. Ainsi Trials Rising se voit offrir une tracklist puisant dans le bon gros rock, le hip hop, le metal, le punk mais aussi l’électro et autres dérivés de ces genres. Grosso modo, pour vous citer quelques noms parmi les plus évocateurs, on y retrouve Sum 41, Billy Talent, Motörhead, Trivium, In Flames, Airbourne, Anthrax… Si vous avez connu l’âge d’or des bande-son des jeux PS2 tels que Tony Hawk’s Underground ou Need For Speed Underground, autant dire que vous serez ravis, puisqu’Ubisoft nous offre ici une sélection de qualité avec de jolies découvertes en prime, nous rappelant une époque malheureusement révolue. Clairement la tracklist la plus efficace que l’on ait pu entendre ces dernières années. On regrettera alors l’impossibilité de choisir quand jouer certains titres et de changer l’ordre des chansons mais on ne peut pas tout avoir, n’est-ce pas ?
T’as le matos ?
En termes de progression, le joueur voit son niveau augmenter au fur et à mesure des pistes terminées, puisque chaque fois que l’on franchit la ligne d’arrivée d’un niveau (déjà complété ou non), de l’expérience vient s’ajouter à celle déjà accumulée. Les contrats sont donc une bonne façon de remporter des bonus d’xp, et il va sans dire que les plus ardus sont évidemment ceux qui récompensent le mieux le joueur. Terminer une piste sera également l’occasion de récolter quelques pièces ainsi que d’obtenir un sticker ou un élément de personnalisation pour son avatar. Alors qu’il était seulement possible avant de modifier sommairement la tenue de notre pilote, on peut désormais la modifier de A à Z. Mis à part la pléthore de stickers disponibles et que l’on peut apposer sur tout le matos à disposition (mis à part certains équipements uniques), on peut débloquer bon nombre de casques, vestes, hauts, gants, pantalons et chaussures, sans oublier les accessoires. Il en va de même pour les motos, puisque les jantes, le pot d’échappement, les phares, le cadre, le carénage, le garde-boue ainsi que les pneus peuvent aussi être customisés.
L’obtention de nouveaux éléments peut se faire en achetant des items dans la boutique à l’aide de pièces ou de glands ainsi qu’en ouvrant des caisses de matos. Ces lootboxes s’obtiennent également contre des pièces ou bien en montant des niveaux (une caisse est offerte à chaque niveau gagné). Cependant, elles s’avèrent un peu frustrantes dans la mesure où elles renferment plus souvent des stickers que des éléments de personnalisation pour le pilote ou la moto. Si l’on ajoute à ça le fait que le prix des objets dans la boutique est très souvent élevé comparé au nombre de pièces acquis après avoir remporté un contrat, on observe que la personnalisation n’est peut-être pas aussi accessible qu’on aurait pu le croire. Nul doute que l’éditeur tente de mettre en avant l’achat de glands, puisque ces derniers peuvent être obtenus contre quelques euros sonnants et trébuchants. Les meilleurs pilotes sauront trouver la soixantaine d’écureuils cachés un peu partout sur les circuits proposés et qui permettent de récupérer une petite poignée de glands pour chaque bestiole récupérée. Reste que dans l’ensemble, il y a largement de quoi faire afin de créer un pilote et des motos uniques.
Si la création est bien plus mise en avant dans ce Trials Rising, c’est aussi le cas du côté de l’éditeur de pistes, plus complet que jamais. RedLynx a effectivement mis à disposition des joueurs les mêmes outils et éléments que ceux qu’ils ont utilisés pour les pistes qui ornent la carte du monde. Forcément impressionnant et un peu difficile d’accès à première vue malgré le menu radial qui simplifie grandement les choses, il met à profit la créativité du joueur en proposant des éléments tout droit venus de tous les Trials sortis depuis Trials Evolution (et cela vaut aussi bien pour les éléments physiques que pour les musiques) Autant dire qu’on a déjà hâte de voir ce que la communauté va bien pouvoir inventer avec un éditeur de pistes aussi pointilleux, puisque comme à l’accoutumée, il est possible de partager ses créations et de retrouver celles des joueurs du monde entier à l’aide de Track Central.
Ceci étant dit, les pistes proposées par RedLynx seront déjà bien suffisantes pour avoir de quoi faire, d’autant que le level design est toujours aussi efficace. Les tracés sont alambiqués, les loopings, sauts et propulsions s’enchaînent et rendent les courses terriblement vivantes. Certaines pistes ont d’ailleurs un côté très badass, surtout lorsqu’un bon morceau de metal est joué en fond. Les environnements sont nombreux et variés tout en prenant place dans des lieux iconiques spécialement repensés pour l’occasion. On pense par exemple à la Tour Eiffel à Paris, à la Grande Muraille de Chine ou encore aux plages Vietnamiennes qui offrent de très chouettes panoramas. Dans l’ensemble, la réalisation s’avère être tout à fait correcte avec une mise en scène toujours aussi barrée et des effets de caméra bien sentis, quoi que parfois inattendus et un peu troublants en pleine action.
La durée de vie de Trials Fusion serait un peu difficile à évaluer, puisqu’elle dépend de la facilité avec laquelle on finit les différents niveaux. Pour vous donner un ordre d’idée cependant, sachez que le jeu comporte plus de cent pistes et qu’il comporte quelques jeux d’adresse qui devraient parvenir à maintenir les amateurs de scoring en haleine afin de se hisser tout en haut des leaderboards. Ils sont au nombre de 10 et se débloquent en fonction du niveau du joueur ou bien des ligues débloquées. Une alternative sympathiques entre quelques niveaux plus conventionnels en somme. On retrouve toujours le mode multijoueur, présent dès le jour de la sortie cette fois-ci. Ainsi, que ce soit en ligne comme en local, il est toujours possible de confronter son talent de pilote, avec quelques petites nouveautés plutôt sympathiques pour ceux qui préfèrent jouer sur le même écran. Entre les paris pour le mode compétitif et le mode tandem qui permet de piloter à 2 la même moto sur les pistes solo, autant dire que Trials Rising compte bien s’inviter durant vos soirées entre amis – au delà de l’aspect compétitif qu’il a déjà installé depuis longtemps au sein de la communauté.
« Oui, mais sur Switch ? »
La licence s’invite enfin du côté de chez Nintendo et c’est une première. L’idée d’une version Switch avait effectivement quelque chose de fort séduisant lors de l’annonce du titre à l’E3 dernier, mais pouvait poser quelques questions concernant la qualité du rendu. Sur PS4, le jeu tourne en 60 fps avec une résolution de 1080p qui permet de flatter la rétine lorsque le pilote s’envole tandis que le soleil se couche à l’horizon. Si la version Switch ne bénéficie évidemment pas du même traitement, on a été plutôt surpris de la façon dont la console de Nintendo se défend. Effectivement, Trials Rising tourne bien à 30 fps sur cette dernière, que ce soit en mode portable comme en mode dockée. Pour autant, l’action ne saccade pas en pleine course, le jeu est stable et même si les environnements sont forcément moins détaillés, le tout s’avère être assez convaincant (voir les quelques images dans la visionneuse ci-dessous). D’autant que toutes les autres versions comportent leur lot de textures un peu datées, parfois pas très propres, mais sur lesquelles le regard n’a jamais vraiment l’occasion de se poser. En revanche sur Switch comme sur PS4, on a noté de légers ralentissements une fois la ligne d’arrivée passée, ou bien l’apparition de textures un peu tardives lorsque l’on est sur le départ. Rien de très méchant en soi, d’autant qu’il s’agit là de petits détails hérités des opus précédents.
Loin d’être la version du pauvre que l’on aurait pu attendre, la version Nintendo Switch s’impose forcément comme la plus intéressante de toutes pour peu que vous soyez du genre à jouer en dehors de chez vous ou ailleurs que devant votre grand écran. D’autant qu’elle est la seule à proposer la possibilité d’accélérer en utilisant le joystick droit, ce qui offre un sentiment de précision supplémentaire dont ne jouissent pas les autres plateformes. Un ajout loin d’être indispensable, mais en ajoutant le fait qu’en mode portable le jeu s’avère bien moins imprécis que ce à quoi on s’attendait, force est de reconnaître que pour une première fois, le pari est remporté haut la main. Favorisez tout de même l’utilisation de la manette Pro lorsque vous jouez sur votre TV.
Verdict : 9/10
Trials Rising marque le grand retour de la licence créée par RedLynx sur le devant de la scène. Après 5 ans d’absence, si l’on met de côté le très chouette Trials of the Blood Dragon qui fait plus office de spin-off qu’autre chose, Ubisoft remet sa licence dans le droit chemin et démontre que Trials n’a jamais mieux fonctionné qu’en suivant les bases qui ont fait le succès de la franchise. Aussi bien pensé pour les débutants que pour les aficionados du genre, Trials Rising tourne aussi bien qu’une bécane huilée au moteur vrombissant. Aussi fun en solo qu’en multijoueur, il prend la première place du podium dans notre cœur et s’impose sans conteste comme un indispensable du moment, à ne louper sous aucun prétexte (à moins d’être vraiment allergique aux deux roues). Si la version Switch est forcément un peu moins impressionnante que les autres, force est de constater que la petite s’en sort plutôt pas mal et propose une version idéale pour les joueurs nomades. Heureusement que les DLC annoncent déjà la couleur de la suite des évènements, parce qu’on en veut encore.
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