Il y a 7 ans de cela, les joueurs et joueuses du monde entier posaient leurs yeux et leurs mains sur le tout premier opus de la licence The Last of Us, rencontrant ainsi Joel et Ellie, deux personnages devant survivre à n’importe quel prix dans un monde post-apocalyptique. Une nouvelle pandémie ayant changé à jamais la face du monde tel qu’ils le connaissaient. Encensé comme l’un des meilleurs titres sur PlayStation 3 et récemment élu comme le jeu de la décennie (sondage sur Metacritic), les aventures des deux protagonistes se voit agrémentées d’une suite des plus attendues. Après plusieurs reports, The Last of Us Part II s’apprête à envahir les rayons des magasins spécialisés ou encore les pages des sites de vente sur internet et ainsi a débarquer officiellement en exclusivité sur PlayStation 4. L’attente touchant bientôt à sa fin, votre fidèle servante est bien entendu partie affronter claqueurs, Scars et membres de la WLF, tout en évitant morsures et infections, aux côtés d’Ellie pour vous rapporter ce verdict final. Alors, The Last of Us Part II est-il une pâle copie du premier opus ou une suite réussie avec une valeur ajoutée ? Réponse dans ce qui suit.
Test réalisé sur PlayStation 4 grâce à une copie numérique non infectée par le cordycep et envoyée par l’éditeur
Attention, certains éléments pourraient vous spoiler. Vous voilà prévenus, chers lecteurs.
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L’après Outbreak
2013. Les résidents d’un quartier ont les yeux rivés sur leur téléviseur, et plus particulièrement devant un Flash spécial. Rapidement, les esprits s’affolent, des cris envahissent les ruelles alors que chacun attrape le strict minimum à emporter avant de se ruer vers sa voiture afin de quitter la région ou rejoindre ses proches.
Allongée paisiblement et endormie dans son lit, la jeune Sarah est réveillée par la sonnerie du téléphone, retentissant au rez-de-chaussée. Son oncle Tommy, paniqué, cherche à joindre le père de la petite fille, Joel. Le recherchant dans les moindres pièces et recoins de la maison, Sarah finit par retrouver son père qui semble être dans tous ses états car poursuivi par un voisin dont le comportement est plus qu’étrange et cherchant coûte que coûte à pénétrer dans les lieux. Nous sommes le 26 septembre 2013. C’est l’anniversaire de Joel et le début de l’épidémie, connue sous le nom « Outbreak Day ». Le cordycep, un champignon d’origine chinoise, a muté et se propage de façon fulgurante dans le monde entier. Affectant ainsi tous êtres vivants et poussant les hommes et les femmes à manifester des comportements violents ainsi que des irruptions cutanées importantes. Mis à feu et à sang à cause de cette nouvelle pandémie, changeant ainsi les Hommes en véritables zombies aux crocs acérés et à la morsure facile, le monde post-apocalyptique de The Last of Us s’ouvre devant les yeux des joueurs et des joueuses. Beaucoup d’entre vous connaissent la suite des premières aventures de Joel et Ellie et nous ne reviendrons pas davantage dessus afin de préserver la surprise à ceux qui n’auraient pas encore goûté à la licence.
« […] Because you might think you know. But you don’t […] » – « […] Parce que vous pourriez penser savoir. Mais vous ne savez pas […] »
2018. Ayant survécu coûte que coûte aux nombreuses péripéties et rencontres au cours de leur périple à travers tous les États-Unis, Joel et Ellie ont rejoint une communauté à Jackson, dans le Wyoming. Composé de survivants et survivantes, de tous âges et professions, le refuge de Tommy, frère de Joel pour rappel, semble offrir ce qui pourrait être un retour à la vie la plus normale possible, selon le contexte actuel, pour les deux protagonistes. Organisée et soudée, cette communauté parvient à vivre paisiblement alors que la menace des infectés est toujours présente. Heureusement, ils réussissent à la contenir en dehors des murs de la cité. Très vite, un sentiment de stabilité apaise Joel et Ellie qui se sentent faire partie d’un groupe. Malheureusement, à peine le doux rêve est-il frôlé que les événements basculent dans un nouveau chaos. Très violent et traumatisant à souhait, ils pousseront Ellie dans une quête de vengeance et de justice : elle pourchasse ainsi les responsables de l’événement et entend bien les tuer « tous jusqu’au dernier ». Un objectif qui l’affectera aussi bien physiquement que psychologiquement et émotionnellement mais dont elle ne peut se défaire tant qu’il ne sera pas accompli.
Alors que le scénario se dévoile progressivement sous nos yeux tout au long du jeu, il est agrémenté de flashbacks permettant d’en apprendre davantage sur les événements s’étant déroulés durant les 4-5 dernières années. Une idée non originale, certes, mais qui a le don de recomposer le puzzle narratif selon les deux points de vue scénaristiques des différents opus. Le tout proposant des séquences aussi sombres que joyeuses, bouleversantes que plaisantes. Dans un cas comme dans l’autre, que ce soit lors de pures cinématiques ou phases de gameplay, on se surprend à sourciller d’étonnement, serrer les dents lors des moments intenses, sourire lors des situations joyeuses et pleines d’humour, pleurer quand il le faut. On vit le jeu et le jeu nous le fait bien vivre. On a surtout beaucoup eu de mal à décrocher durant nos multiples sessions tant nous avons toujours eu envie d’en découvrir plus et connaître l’issue d’une séquence, puis d’une autre et encore une autre. Saisissant ! Autant dire que The Last of Us Part II a très clairement su nous tenir en haleine sur les 25 heures nécessaires pour boucler l’aventure. Comptez vraisemblablement 30 heures afin de réaliser le Platine du titre.
Alors que l’un des créateurs de la licence, connu de tous, Neil Druckmann qualifie le premier opus comme une « histoire d’amour dans la relation père-fille » et non pas un simple « jeu d’horreur », The Last of Us Part II prend une toute autre dimension et est très clairement l’opus de la maturité, représentant ainsi à merveille l’évolution du studio de développement Naughty Dog. Cette fois-ci, Neil Druckmann endosse d’ailleurs plusieurs casquettes à savoir celui de directeur créatif et scénariste. Il s’est d’ailleurs entouré d’Halley Gross, connue pour son travail scénaristique sur la série Westworld. Comme mentionné dans les différentes communications officielles et diverses vidéos de présentation, The Last of Us Part II met en scène des thématiques assez sombres, avec notamment la présence de langage grossier, violence, sang/gore, nudité partielle, vengeance, haine. Tout en mettant en lumière des problématiques sociétales actuelles, comme celle de la communauté LGBTQ+. Bien évidemment, d’autres thèmes plus positifs sous-jacents se dévoilent tout au long de l’aventure, tels que la question du partage, la confiance en autrui, les notions d’amitié et amour ou encore le surpassement de soi. Sous le joug d’interdiction dans diverses régions du monde comme dans plusieurs pays au Moyen-Orient, The Last of Us Part II s’adresse ainsi à un public averti et n’est très certainement pas à mettre dans les mains de tous. Pour rappel, il est considéré en PEGI 18 et M pour « Mature » aux Etats-Unis. Ce qui donne clairement le ton ! Pour autant, même si certaines séquences peuvent être parfois assez dérangeantes visuellement, elles n’en restent pas moins tout à fait légitimes tant elles servent de façon cohérente le scénario. S’il faut trouver un petit bémol tout de même à cette suite, certaines cinématiques ou séquences en général nous ont parfois semblé un peu longues, et d’autres trop courtes. Mais l’ensemble reste tout à fait cohérent et propose beaucoup de rythme.
Plus qu’une simple suite
Déjà à travers le scénario, on se rend très vite compte que The Last of Us Part II ne se contente pas d’être une simple suite ou une pâle copie de son aîné. Bien qu’il reprenne tout de même quelques éléments de la licence, à l’image du découpage des séquences de différents types, variant entre cinématiques, flashbacks et moments de gameplay. Par ailleurs, on retrouve également cette linéarité de l’aventure que l’on connaît chez Naughty Dog, mais elle tend tout de même à être davantage décloisonnée grâce à une liberté allouée aux joueurs. En effet, même s’il faudra toujours rejoindre un point B depuis un point A dans une zone donnée, les joueurs et joueuses ont la possibilité de dessiner leur propre trajet dans certains cas ou passer plus de temps à explorer les différents bâtiments dans d’autres. Par exemple, une fois arrivée dans le centre-ville de Seattle, Ellie peut tout à fait aller fouiller les multiples bâtiments et prendre du temps pour explorer les espaces plus ou moins ouverts. Sans être pour autant un véritable monde ouvert, il est tout à fait plaisant d’avoir un peu de répit par moments et surtout avoir la possibilité d’explorer tout le lore de ce second opus, même si cette décision est toujours à nos risques et périls car les infectés et ennemis ne sont pas prêts à nous laisser vivre impunément. Rappelons d’ailleurs à ce sujet que le scénario se déploie également à travers une narration annexe environnementale soit en découvrant et lisant des documents cachés aux quatre coins du monde proposé. C’est à travers des histoires personnelles de familles ou d’individus que l’on apprend alors ce qui a pu se passer dans ce lieu, ou bien qui sont les Séraphites et leur code moral ou encore quelles ont été les actions de la WLF dernièrement. Cela n’a l’air de pas grand chose dit comme ça, et n’est pas tout à fait révolutionnaire, mais ces détails agrémentent l’aspect réaliste et immersif de l’aventure, tout en proposant aux joueurs d’en apprendre davantage sur le lore de ce second opus.
« […] les mécaniques de jeu attitrées à ce protagoniste féminin sont plus poussifs et organiques. Viscéral ! […] »
Par ailleurs, cette suite reprend tout aussi bien le système de craft connu du premier titre : pour fabriquer divers outils, comme des cocktail Molotov, des silencieux, des pièges explosifs, ou des kits de soin, il faut nécessairement collecter des ressources, tels que des bouteilles, de l’alcool, du tissu etc. Le niveau de difficulté choisi au début de l’aventure influe d’ailleurs directement sur le taux d’apparition de ces éléments. Sans oublier que l’arsenal d’armes se déploie au fur et à mesure de l’aventure et des trouvailles. D’ailleurs, les équipements peuvent être améliorés via des établis et grâce à des pièces de récupération. D’où l’importance d’explorer un maximum sinon vous pourrez passer à côté d’armes à feu redoutables ou d’infiltration.
Les développeurs appuient davantage sur la notion d’exploration récompensée dans cet opus. Entre autres, il est possible de tomber sur de multiples coffres, dissimulés dans des bureaux, caches d’armes et bien d’autres endroits. Dans tous les cas, il faudra fouiller avec minutie et parfois pendant de longues minutes, la zone afin de trouver le code et ainsi la solution pour déverrouiller le coffre regorgeant de ressources, munitions et améliorations. Dans d’autres cas, ce sont certaines pièces d’appartements ou de bâtiments qui pourront être explorées si vous trouvez l’entrée adéquate (la porte principale étant souvent condamnée). C’est parfois assez simple, et d’autres fois un peu moins. Notons quand bien même que les coffres et caches d’armes sont tout à fait manquables et que passer à côté de certaines ressources peut impacter le bon déroulement de séquences suivantes. Le côté survival de cette suite prend ainsi davantage de sens car nous pouvons très vite nous retrouver à court de munitions ou de ressources, et devons ainsi trouver des solutions rapides pour se sortir d’un affrontement ou d’une situation tendue. D’ailleurs, la fuite est tout a fait permise et parfois recommandée. A plusieurs reprises, on s’est retrouvé obligé de reculer dans la zone pour apaiser un tant soit peu les esprits et afin que les ennemis perdent notre trace, avant de réfléchir à une nouvelle approche.
Mais là encore, Naughty Dog ne se contente pas du peu et cherche à épaissir qualitativement l’expérience : pour ce faire, ils implantent la notion d’améliorations de compétences. Grâce à la collecte de manuels d’entraînement, que l’on peut récupérer dans différents niveaux, Ellie est capable d’obtenir des compétences et capacités plus affûtées dans différents domaines, comme les explosifs, l’infiltration etc, en échange de stimulants collectés au préalable. Il y a donc un réel sentiment de progression durant les nombreuses heures requises pour boucler l’aventure. Bien qu’elle ait déjà prouvé ses talents et capacités par le passé, Ellie se fait encore plus à travers ce périple. Chaque joueur pourra façonner son propre personnage et jouer selon son propre playstyle : certains préféreront davantage mettre l’accent sur les pièges explosifs alors que les autres s’intéresseront à l’infiltration en premier lieu, etc. De ce fait, en découle une véritable impression d’engagement de la part du joueur vis à vis d’Ellie et de sa progression. Loin d’être de véritables mécaniques typés RPG, et non révolutionnaires dans le paysage vidéoludique, ces améliorations dans le gameplay sont franchement les bienvenues et on se plaît à découvrir tous les manuels d’entraînement et branches d’améliorations au fur et à mesure afin de dessiner sa propre aventure. C’est d’autant plus nécessaire que le danger est omniprésent du début à la fin et que l’on peine à trouver des moments pour respirer tant certaines séquences distillent beaucoup de tension, manette en main et yeux rivés sur l’écran.
L’escalade de la violence et du danger
Décuplé et atteignant un paroxysme certain, le sentiment de danger et de tension perpétuel est réellement mis en avant dans The Last of Us Part II. A travers de nombreuses séquences et même dans les cinématiques, nous avons toujours cette impression d’à peine respirer, tout comme Ellie, et que nous nous sortons toujours des situations sur le fil du rasoir. C’est un élément sur lequel Neil Druckmann et Halley Gross – ainsi que d’autres membres du studio évidemment, tels qu’Anthony Newman ou Kurt Margenau, tous les deux co-Game Director – ont réellement décidé d’appuyer pour cette suite.
Que ce soit à travers les visuels ou les sons, nous nous attendons toujours au pire, bien qu’il y ait très peu de jump-scares : un infecté est capable de nous surprendre à l’embouchure d’une fissure dans un mur, un ennemi de la WLF parvient à nous entendre alors que nous sommes allongés dans les hautes herbes, un chien de la faction militaire citée précédemment nous sent à plusieurs mètres, un bruit de pas sur des morceaux de verre nous trahit, une brute Séraphite de deux mètres nous assène un coup violent soudainement… Autant de moments qui nous surprennent en même temps qu’Ellie. Tout est véritablement pensé pour nous impliquer et nous engager dans ce que vit de la jeune femme. Ainsi, elle n’est presque plus seulement qu’un simple personnage/avatar et nous ne sommes presque plus seulement qu’un simple joueur/joueuse. Loin de casser véritablement la quatrième mur, Naughty Dog parvient tout de même un tour de force dans ce second opus : on se retrouve assez souvent tout aussi agrippé à notre manette qu’Ellie à son fusil, et pour survivre aucun des deux ne devra lâcher son arme. Engageant ! Immersif à souhait !
Le tout est rendu possible grâce à un travail monumental et à un souci du détail incroyable de la part du studio. Si nous reviendrons plus tard sur la direction artistique et la bande sonore jouant un grand rôle dans cet aspect, intéressons nous davantage à l’IA. Très souvent, l’une des critiques de l’époque concernant The Last of Us premier du nom concernait la gestuelle de l’IA alliée. Elle était parfois incohérente dans ses mouvements et bien qu’elle fusse devant et littéralement sous le nez d’un ennemi, elle ne se faisait pas repérer. Un aspect qui a gêné beaucoup de joueurs et a tout de même eu tendance à casser le sentiment d’immersion. 7 ans plus tard, Naughty Dog revient avec une réponse qui mettra tous les joueurs d’accord tant l’IA alliée et celle ennemie sont tout bonnement aussi réalistes et réactives que notre chère Ellie et notre cher Joel. Dans le cas présent, certains personnages secondaires nous accompagnent par moments et ils nous aident dans les différents affrontements : ils se cachent, ils se faufilent et donnent des conseils ou des directives, tout en étant prêts à dégainer si la situation prend une autre tournure. En face, les ennemis sont beaucoup plus crédibles et deviennent une source tangible de tension : ils sont capable de nous repérer plus facilement, cherchent à nous contourner et communiquent surtout entre eux. Les membres de la WLF se donnent des indications quant à notre dernière position, les chiens nous flairent et pistent sur plusieurs mètres de distance et les Séraphites communiquent par sifflement pour donner l’alerte. S’ils trouvent l’un de leurs collègues mort, ils présentent d’ailleurs des signes de colère et de haine, à tel point qu’ils vous pourchasseront plus longtemps. Ce réalisme alloué aux ennemis nous fait invariablement sentir que notre périple et notre plan de vengeance ne seront pas aussi simples que cela. Le risque est intrinsèque à l’aventure tant la menace est omniprésente, diverse, vaste et ne nous lâche pas d’une semelle.
D’ailleurs, à ce sujet, mentionnons également le fait que le bestiaire se voit bonifier par certains ajouts. Si nous avons mentionné la WLF et les Séraphites pour l’IA ennemie, il convient tout de même de revenir sur la première source de danger : les infectés. Ainsi, on retrouve certains types d’infectés que nous connaissons du premier opus, soient les coureurs et les claqueurs. Mais ce n’est pas tout. Naughty Dog intègre désormais les rôdeurs. Se plaçant facilement entre la classe coureur et claqueur, les rôdeurs sont très rapides et surtout inaudibles. Ils parviennent à se cacher efficacement et peuvent emprunter les mêmes chemins qu’Ellie, notamment à travers des passages cachés. Même le mode écoute ne peut malheureusement rien contre eux, ne nous permettant pas d’apercevoir leur silhouette. Une véritable plaie qui nous a fait sursauter de peur un nombre incalculable de fois. Pour finir, et pas des moindres, les Puants. Véritable mutant, littéralement mangé par le cordycep, les Puants sont des Colosses capables de jeter des spores à la figure des personnages, explosant ainsi dans un nuage toxique. Moins rapides que les rôdeurs, ils se déplacent tout de même assez aisément et un coup au corps à corps suffit pour vous mettre KO. Redoutables, donc.
Si les menaces se multiplient et si elles deviennent de plus en plus réalistes, c’est pour renforcer le côté très dangereux de la quête d’Ellie. D’ailleurs, cette dernière se fait en tant que jeune femme durant toute l’aventure et devient peut-être malgré elle aussi dangereuse que les nombreux risques et ennemis qu’elle rencontre.
« I’m just a girl. Not a threat »
The Last of Us Part II étant le berceau de multiples et nombreux défis pour Naughty Dog, afin de pimenter et proposer une expérience méliorative aux joueurs, le gameplay fut probablement l’un des aspects les plus travaillés par les développeurs. Devant toujours répondre à ce souci de réalisme et d’immersion, le bouleversement réside principalement dans le changement de protagoniste. Bien que nous ayons pu incarner la jeune Ellie dans quelques séquences de The Last of Us, et surtout dans le DLC Left Behind, les mécaniques de jeu attitrées à ce protagoniste féminin sont plus poussifs et organiques dans cette suite. Viscéral ! Contrairement à Joel, Ellie est plus agile et plus souple. En résulte alors une fluidité sans faille qui fait nettement plaisir manette en main, et qui change du tout au tout avec le premier opus dans lequel on pouvait avoir cette impression de mouvements quelques peu saccadés. Seul petit bémol, il est arrivé quelques fois, et encore très peu, que la caméra soit un peu plus pénible à déplacer lorsque nous sommes engagés dans un combat au corps à corps.
Ainsi, jeune et athlétique, Ellie est capable de sauter de plateformes en plateformes assez rapidement. Elle peut tout aussi bien jeter une corde, y grimper, y descendre et se balancer dessus pour atteindre un endroit en hauteur ou au sol. Sans oublier le fait qu’elle a désormais appris à nager et à plonger. Toutes ces actions, efficaces durant les situations musclées, sont primordiales afin de résoudre les puzzles proposés aux joueurs. En parlant de puzzles, bien que le jeu soit loin d’être un puzzle-game ou un jeu à énigmes, on signifie les différents moments dans lesquels il faut trouver une solution pour atteindre un point B. Par exemple, afin de passer une des portes blindées dans la zone de quarantaine de la WLF, au plein cœur de Seattle, il nous a fallu grimper sur des toits et sauter vers des plateformes à plusieurs mètres de haut. Afin de finalement atteindre une fissure dans le mur permettant de passer au travers et de l’autre côté de l’enceinte. Dans d’autres cas, les actions sont plus simples : pour pénétrer dans un bureau fermé, jeter une brique ou une bouteille pour casser la fenêtre a suffit. Généralement, les énigmes sont assez simples à résoudre et ne dépayseront pas les habitués de la licence. Durant notre première run, nous n’avons pas buté sur l’une d’entre elles.
Le panel d’actions alloué au personnage nous permet par ailleurs de nous faufiler davantage dans des endroits et passages plus ou moins cachés. Se tapir dans les basses et hautes herbes est tout bonnement un véritable plaisir et cette mécanique du jeu nous a sauvé plusieurs fois. Passer dans les fissures des murs, se cacher derrière un meuble pour attraper furtivement son opposant sont des mouvements des plus jouissifs manette en main. On a nettement moins cette impression de simplement attendre que les ennemis bougent, on se déplace en même temps qu’eux tout en élaborant pas à pas notre stratégie d’attaque. D’ailleurs, grâce à ces mécaniques, l’aspect infiltration est réellement de rigueur et est des plus significatifs dans cette suite. On peut aussi bien jouer sur l’horizontalité que sur la verticalité des lieux et des zones, ce qui est, dans le dernier cas, relativement nouveau pour la licence. Ainsi, se dessinent davantage de possibilités pour le bonheur des joueurs qui joueront et rejoueront les séquences ou le jeu complet plusieurs fois.
Si Ellie se confie intimement à Dina en lui annonçant qu’elle n’est pas « une menace, mais juste une fille » après leur danse lors d’une soirée à Jackson, on a envie d’y croire. D’autant plus que très vite, après avoir tué plusieurs ennemis, un sentiment de culpabilité nous envahit. Réaliste à souhait, l’IA ennemie profite d’une humanisation des plus saisissantes : ils possèdent des noms et prénoms que l’on peut entendre lorsque l’un d’entre eux meurt et que son confrère le pleure, on les entend agoniser de douleur, on a parfois accès à leurs histoires personnelles grâce à des dialogues écoutés furtivement ou des documents récupérés… Que ce soit contre la WLF ou bien les Séraphites, moins pour les infectés bien entendu, on a très clairement l’impression que chaque choix, soit celui de tuer ou de ne pas tuer, a un impact sur l’aventure et surtout sur notre conscience personnelle. Oui, zigouiller des ennemis qui nous tirent dessus dans les jeux vidéo, c’est monnaie courant à notre ère mais Naughty Dog propose une alternative qui a du sens. On se plaît, lors de certaines séquences, à éviter un maximum d’affrontements tant la dimension d’infiltration est bonifiée dans ce second opus et peut tout aussi bien nous amener à la destination souhaitée, sans pour autant (trop) faire couler le sang. De ce fait, Naughty Dog parvient avec génie à rendre le joueur tout à fait engagé moralement et physiquement (en quelque sorte). Malgré son désir de rester une jeune femme et ce sentiment de culpabilité oppressant aussi bien ressenti par le joueur engagé que par Ellie, à en juger ces traits par moments, cette dernière a besoin de se venger… peu importe le prix !
A couper le souffle !
Déjà après la diffusion de la vidéo de gameplay de l’E3 2018, beaucoup de personnes se sont étonné du rendu très réaliste et authentique du baiser entre Ellie et Dina. Bien entendu, le reste de la vidéo a tout aussi bien surpris les joueurs et les joueuses, qu’ils fussent devant leur écran durant la retransmission en direct du show ou bien en la visionnant plus tard sur diverses plateformes. Encore aujourd’hui, cet aspect étonne et alimente l’enthousiasme de chacun. Déjà en 2018, Naughty Dog imposait ce qui semble être son modo pour The Last of Us Part II : proposer une expérience « inégalée » (selon leurs propres termes). Bien sûr, des titres comme God of War, Assassin’s Creed Odyssey, Death Stranding et d’autres sont déjà franchement incroyables à parcourir et sont de toute beauté à l’écran. Avec The Last of Us Part II, l’expression « à couper le souffle » prend réellement tout son sens.
La Motion Capture aidant beaucoup, certes. Le duo Ashley Johnson et Troy Baker (dernièrement aperçu dans Death Stranding) fonctionne toujours aussi bien, voire mieux. Les deux artistes sont parvenus à retrouver leurs personnages tout en proposant un jeu d’acteur dans lequel on perçoit l’évolution physiologique d’eux deux, puisque des années ont passé entre les aventures du premier opus et les événements du second : Ellie est plus mature et plus intransigeante dans ses actes et ses paroles tandis que Joel se fait un peu plus vieux et semble donc un peu moins impulsif d’une certaine manière. Tout cela est nettement perçu dans l’intonation des voix, dans la prononciation des mots et leur découpage, que ce soit dans les cinématiques ou même lors des séquences de gameplay. D’ailleurs, on ne pourrait que vous recommander de jouer en VOSTFR plutôt qu’en VF, pour profiter pleinement de l’expérience imaginée et développée par Naughty Dog. Même si le doublage français est aussi bon, rassurez-vous. Déjà, à l’issu du premier opus, on ne pouvait s’imaginer d’autres acteurs dans la peau des protagonistes de cette licence. Encore une fois, ils prouvent qu’ils sont tout à fait à leur place dans le casting et en apportent d’ailleurs toute la richesse. Mention également spéciale à d’autres interprètes, notamment à Shannon Woodward qui joue Dina (Cascina Caradonna a quant à elle servi de modèle) et Stephen Chang pour Jesse.
« […] I feel so lucky that I got to play Ellie. I’m so proud that I got to play a strong female character that isn’t sexualized or a damsel in distress or even the opposite of that […] » – « […] Je me sens tellement chanceuse d’avoir eu l’opportunité de jouer Ellie. Je suis tellement fière d’avoir pu jouer un personnage féminin fort qui n’est pas sexualisé, ou une demoiselle en détresse ou même son contraire […] »
Si nous l’avons mentionné rapidement précédemment, revenons un instant sur la psychologie des personnages. Centrale dans une expérience aussi narrative que celle-ci, Naughty Dog et les acteurs/actrices ont fourni un travail conséquent sur cet aspect afin de proposer une expérience des plus réalistes. On remarquera et s’intéressera principalement à un personnage dépeint précédemment pour ne pas spoiler le titre aux joueurs et aux joueuses. Et plus particulièrement à Ellie, qui, on le voit dans de ses traits et sa posture au fur et à mesure de l’histoire, change du tout au tout. Elle n’est plus simplement cette jeune fille qui s’émerveillait devant une girafe au détour d’un bâtiment délabré ou cette pré-adolescente prenant du bon temps avec son amie dans un centre commercial abandonné. Son désir de vengeance la transforme moralement et physiquement mais elle ne peut s’arrêter avant de l’avoir totalement assouvi, malgré qu’elle prenne progressivement conscience des répercussions de celui-ci. Encore une fois, Ashley Johnson relève le défi et parvient avec justesse à rendre toutes les évolutions psychologiques et physiques de son personnage tout en lui donnant cette aura si particulière, dont nous avons eu déjà quelques impressions au cours du premier opus et du DLC Left Behind. En dehors des intonations de voix ou bien des transformations des traits, c’est également au niveau des postures du personnage que l’on se rend compte du chemin parcouru depuis 2013. Les animations de gameplay sont réglés comme du papier à musique. Tout, depuis la mise en place du bandage sur le bras suite à une blessure, l’ouverture du sac pour accéder au système de craft, les manipulations des armes sur les établis etc, est maîtrisé et soutient l’aspect ultra réaliste de l’aventure.
Un chef d’oeuvre
D’ailleurs, la direction artistique et la bande sonore jouent bien évidemment un grand rôle dans ce souci de réalisme et d’authenticité que souhaite transmettre Naughty Dog pour cette nouvelle aventure post-apocalyptique, aux côtés d’Ellie et Joel. Ces deux éléments techniques et artistiques sont les fondements mêmes faisant très probablement de The Last of Us Part II une expérience inégalée et inégalable pendant encore quelques mois, voire années, à venir.
En ce qui concerne la direction artistique, elle respecte bien évidemment les codes déjà distillés dans le premier opus mais elle profite d’un travail plus approfondi quant à sa palette de couleurs et ses ambiances. En effet, avec une météo dynamique évoluant au fil de l’aventure et au gré des saisons, nous sommes amenés à parcourir aussi bien des zones enneigées que des lieux pluvieux et parfois sous un orage battant. Le temps étant tout bonnement un indicateur visuel et sonore de la tension montant crescendo. Par ailleurs, l’alternance entre les tons chauds et les tons froids correspond principalement aux changements de types de séquences et surtout à la succession entre des situations tendues et des moments de joie. Par contre, mention véritablement spéciale aux visuels dont les chromatiques sont beaucoup plus soutenues, comme la présence de rouge lors de moments des plus dangereux et cruciaux, qui fait véritablement des merveilles aussi bien au niveau du sens que pour le plaisir des yeux. Les changements d’ambiance sont maîtrisés avec génie et donnent le La à toute l’aventure, tant les lieux rongés par les spores sont angoissants, les espaces ouverts rafraîchissants et les infrastructures diverses plaisantes à explorer, et encore, on en passe. On notera également une interface très peu présente, s’affichant généralement que lorsqu’une touche comme Carré pour recharger a été enclenchée. Cette quasi absence d’ATH rend la contemplation des lieux et de ce qui se déroule sous nos yeux encore plus plaisant et immersif. L’authenticité étant une des pierres angulaires de la licence, on sait notamment que les membres du studio ont effectué un travail de recherche colossal et se sont même déplacés à Seattle, retraçant ainsi le parcours d’Ellie, afin de dessiner et modéliser les différents lieux, villes ainsi que la faune et la flore. A l’écran, le constat est sans appel : la magie opère.
Connu et reconnu dans le domaine musical, ayant d’ailleurs déjà travaillé sur la licence avec The Last of Us et s’étant également illustré dans des productions cinématographiques envoûtantes comme les Carnets de Voyage, Gustavo Santaollala nous transporte une nouvelle fois avec brio dans cet univers. Se mêlant à la perfection avec les visuels et les actions à l’écran, la bande originale nous fait tout aussi bien frémir d’effroi que sourire de joie dès que les premières notes se font entendre. Les compositions à la guitare font toujours autant leur effet. Composée également de sons plus rythmiques, grâce à d’autres instruments, les morceaux représentent audiblement tout le danger de l’aventure et distillent beaucoup de tension au sein des séquences parcourues. D’ailleurs, comme nous en avons fait état précédemment, les autres sons sont travaillés avec un tel degré de précision que l’on ne peut qu’être accroché dès le début. Que ce soit nos bruits de pas, le clapotis des sabots de cheval dans des cours d’eau, la respiration haletante des personnages, le bruissement des vêtements mouillés, les coups de feu stridents et lourds, tout est une invitation à y croire. La direction artistique et bande sonore font de ce titre un jeu qui parvient à faire oublier qu’il n’est qu’un jeu, principalement et surtout pour le meilleur !
Un défi de technicité et d’accessibilité
Plusieurs constructeurs et studios de développement s’intéressent de plus en plus à la question de l’accessibilité des productions vidéoludiques pour les joueurs et les joueuses en condition d’handicap physique, mental ou sensoriel. Ayant reçu à l’époque un commentaire de la part d’un des joueurs étant bloqué à cause d’une séquence de QTE du fait de son handicap, sur Uncharted 4, Naughty Dog a décidé d’améliorer l’expérience de jeu pour ces derniers et surtout la rendre accessible à tous. De ce fait, et ce depuis le début de la production de The Last of Us Part II, les membres du studio se sont penchés sur la création de diverses options. Ainsi, il sera tout à fait possible de modifier les commandes, ou l’audiodescription ou encore changer la taille de l’interface ou bien des textes, profiter d’indices audios ou visuels aidant les malentendants et bien d’autres grâce au patch, prévu pour le jour de la sortie officielle. Au total, ils ont développé une soixantaine d’options diverses, ce qui est absolument colossal et indique l’intérêt réel du studio pour cette question de l’handicap dans le monde du jeu vidéo. En sachant que ces réglages n’altèrent en rien l’aventure et elle reste donc inchangée, mettant ainsi tous les joueurs et toutes les joueuses sur le même pied d’égalité et surtout face à la même expérience vidéoludique. Chapeau bas.
Par ailleurs, avant de dévoiler le verdict et la note finale, un petit mot sur le côté technique de The Last of Us Part II. En ce qui concerne l’aspect visuel, on sait que Naughty Dog a fait évoluer son moteur graphique afin de permettre davantage de détails visuels à l’écran. Ils l’expliquent d’ailleurs très bien dans l’une des vidéos Inside dédiées au titre. Ils sont ainsi capables de modéliser des larmes dans les yeux des personnages, les faire rougir à cause d’une émotion ou d’une action, etc. Avec ce souci du détail et cette volonté poussée de réalisme, nous sommes donc tout à fait en droit de nous demander si la PlayStation 4 ne souffre pas trop, et ce surtout en cette fin de génération de consoles. Beaucoup de joueurs et joueuses s’interrogent à ce sujet et ont d’ailleurs quelques craintes. De notre côté, nous n’avons pas été témoin de bugs visuels ou même d’aliasing, ce qui a rendu notre expérience hyper stable alors que le soft n’était donc pas encore disponible officiellement. Notre console n’a pas non plus émis des bruits de ventilation trop forts, que nous ayons eu un casque sur les oreilles ou non, et ne nous a pas semblé surchauffé plus que de raison. En comparaison, Call of Duty: Warzone se veut beaucoup plus exigeant et fait nettement plus chauffer la dernière console de Sony, et ce même dans le lobby du titre avant de de rentrer dans une partie. C’est dire !
Verdict : 9/10
Avec des changements et évolutions majeures et surtout des plus significatives, aussi bien au niveau du gameplay que de la direction artistique ou bien la bande sonore, The Last of Us Part II propose une expérience vidéoludique des plus bouleversantes et immersives. Il saura combler toutes les attentes, des premiers fans ou bien des nouveaux venus, et parviendra très probablement à en surprendre plus d’un. Il porte tout de la marque des grands et il y a de fortes chances pour qu’il reste dans l’esprit des joueurs et des joueuses pendant un très long moment, tant il est LE titre à ne pas manquer cette année ni sur cette génération de consoles. Fortement indétrônable !
crick
15 juin 2020 at 15 h 51 minCe test complet apporte une bonne vision de ce qui nous attend. Merci pour cet avis eclairé et construit.
Place au jeu