On n’y croyait plus, et pourtant, contre toute attente, The Last Guardian se retrouve enfin sur nos écrans. Près de dix années se sont écoulées après que le titre de Fumito Ueda se soit montré pour la première fois sous le nom de code Project Trico. Une expérience unique selon son créateur, dans la lignée des très appréciés Shadow of The Colossus et Ico, que nous avons découverts pour vous. Initialement annoncé sur PlayStation 3 en 2009 pour être finalement porté sur PS4, The Last Guardian a-t-il su profiter du temps qui lui était imparti ?
Complicité
C’est l’histoire d’un jeune garçon dont on ne connait pas le nom. Arrivé, on ne sait comment ni pourquoi, dans une sorte de grotte lugubre et humide, notre héros se retrouve nez à nez avec Trico, une gigantesque créature à plumes que l’on dit mangeuse d’Hommes. Contraints et forcés de s’entraider pour s’échapper de cette antre infâme, nos deux protagonistes vont finalement développer un profond lien d’amitié. Dans cette contrée étrange et mystique va naître petit à petit une nouvelle relation de confiance entre deux êtres diamétralement opposés, mais dont les qualités respectives seront en mesure de tout surmonter. Au fil de leur aventure, la confiance mutuelle en plus, Trico et son petit compagnon perceront les secrets d’une civilisation disparue, à mesure qu’ils progressent dans de dangereuses ruines remplies de danger.
Une aventure pleine de mystère, que l’on se plait à suivre aux côtés de personnages touchants. C’est d’ailleurs le fil conducteur de notre épopée, le lien qui unit nos deux personnages. Car de cette union nait une force que nul n’est en mesure de vaincre : l’amitié. Ainsi, en créant The Last Guardian, Fumito Ueda est parvenu à nous donner une leçon de vie, une leçon d’humilité. Grandiose.
Mais finalement, quel est l’objectif ultime de cette aventure ? Que trouverons-nous au « bout du tunnel » ? Nul ne le sait réellement avant d’avoir achevé cette oeuvre. Trico et l’enfant cherchent-ils à rejoindre leurs congénères ? Le mystère plane…
Solidarité
The Last Guardian est une expérience unique à plus d’un titre, et devrait profondément diviser parmi la communauté de joueurs. En découvrant les premières images, les premières notes de musique, on est immédiatement intrigué. En effet, sa patte graphique n’est propre à aucune autre, même si elle emprunte tout de même quelques traits à ses prédécesseurs que sont Shadow of The Colossus et Ico.
Un univers morcellé en deux parties donc, avec d’un côté l’obscure profondeur des labyrinthes que nous arpentons sans relâche. Sombres, grossières, taillées dans la roche, ces pierres s’illuminent à la lueur des torches et de faisceaux lumineux venus de la surface, créant de superbes effets d’ombre et lumière. De l’autre, le ciel, l’immensité du vide, et de gigantesques montagnes à perte de vue, toutes surplombées de ruines et autres vestiges du passé. Un ensemble cohérent qui pourrait en revanche decevoir plus d’un joueur. Car si ce mélange quelque peu anecdotique de Cel shading – aquarelle peut paraître du plus bel effet, on regrettera néanmoins des imperfections et des inégalités en termes de textures. De manière générale, nous avons véritablement beaucoup apprécié la proposition faite par les équipes de Japan Studios, mais assurément, cette dernière pourrait paraître en deçà des standards actuellement proposés pour certains d’entre vous. On peut alors se demander s’il s’agit d’un parti-pris, ou si la qualité des graphismes résulte d’une réelle anomalie liée au temps de développement anormalement long.
The Last Guardian pourrait alors être comparé à une toile incomprise de son public. Alors que toutes les autres semblent lisses et parfaitement maîtrisées, celle-ci ne peut être rangée dans aucune case, rendant ses défauts presque appréciables. Frustant dites-vous ?
Souvent discrète et quelque peu en retrait, la bande son parvient à nous éblouir dans les moments propices. Composés / dirigés par Takeshi Furukawa et orchestrés par l’ochestre symphonique de Londres, Trinity Boys et London Voices, les 19 morceaux qui composent notre aventure sont absolument sublimes, et illustrent parfaitement cette épopée fantastique.
Une orchestration enchanteresse qui donne d’autant plus de poids à notre narrateur, qui n’est autre que le jeune garçon que nous incarnons, la voix endurcie par les années (voix japonaise sous-titrée en français). A cela viennent se superposer divers bruitages parfaitement maîtrisés, ainsi que la voix de l’enfant et rugissement de son compagnon. Magique.
Fraternité
La principale mission qui vous incombera consistera à quitter ses ruines au plus vite. Un objectif simple en apparence, mais semer d’embûches et d’énigmes en tout genre, pour un total d’environ 15 heures de jeu. Une durée de vie tout à fait correct, qui tend à varier si vous souhaitez vous arrêter un pour admirer le paysage ou si au contraire, vous vous retrouvez perdu ou confronté à un casse-tête duquel vous ne parvenez pas à sortir.
Aux manettes, vous contrôlerez les faits et gestes du garçon, disposant d’un ensemble de manipulations des plus simples : se déplacer, sauter, se saisir, pousser / tirer un objet. Un minimum pour vous permettre de sortir de ce trou à rat. Une « cellule » qu’il vous faudra scruter dans les moindres détails pour trouver le moyen de vous extirper. Une tâche plus ardue à mesure que le temps passe, et ce n’est pas la caméra désastreuse qui améliorera les choses. C’est d’ailleurs l’un si ce n’est le plus gros défaut de ce titre. On en arriverait presque à se demander si cela n’a pas été fait exprès. Collisions en tout genre, d’une lenteur incroyable par moment,… bref une catastrophe. Il peut même arriver que cette dernière se frotte aux textures, vous envoyant directement dans le décor. Espérons qu’une future mise à jour vienne corriger le tir, et nous permette d’apprécier ce titre à sa juste valeur.
Afin de vous échapper, vous devrez constamment faire preuve d’ingéniosité. Escalader la roche, vous faufiler dans de minuscules cavités à la recherche de leviers, manivelles,… Un ensemble de mécanismes qu’il vous faudra activer si vous souhaitez déverrouiller un pont levis ou une porte, vous devrez régulièrement faire appel à Trico. Ce dernier, du fait de la relation qui vous unit, est parvenu petit à petit à vous comprendre. Ainsi, vous pourrez lui ordonner de s’agripper à une paroi, donner un coup de patte, sauter ou encore lui demander d’approcher. Vous pourrez également monter sur son dos, et vous servir de lui comme d’une échelle (Ceux qui ont joué à Stick It To The Man ne seront pas dépaysés, puisque sur ce point, la jouabilité est tout à fait similaire, parfois anecdotique, le personnage réagissant parfois tel un pantin désarticulé).
Ce qui nous amène à la physique des personnages. L’enfant semble frêle, mais il est capable de se tenir d’une main à une corde, ou encore de tirer / pousser des objets extrêment lourds. Difficile à croire venant d’un enfant aux déplacements approximatifs. Quant à Trico, il illustre parfaitement le concept de l’éléphant dans le magasin de porcelaine. D’une taille démesurée par rapport à son collègue humain, il se déplace avec plus de difficultés. Lorsqu’un ordre lui est donné, là encore, les approximations sont nombreuses, mais la créature réagit globalement bien. Logique lorsqu’on sait que la barrière linguistique pose problème. Dans son ensemble, la maniabilité peut paraître hasardeuse, mais elle reste cohérente compte-tenu des forces en présence. Encore une fois, c’est au joueur de juger. Nous concernant, nos sentiments étaient parfois mitigés, entre amusement et frustration.
Un si long périple, forcément, ça met en appétit. Durant votre aventure, vous serez d’ailleurs amené à devoir nourrir Trico qui, affamé, ne souhaite pas faire un pas de plus. Vous devrez ainsi récupérer de très lourds tonneaux remplis de sortes de lucioles, et les balancer dans la gueule de la créature (ou les déposer à ses pieds). Car oui, la bête engloutiera même la cargaison de bois et de métal. Pas idéal pour la digestion. Une petite pirouette scénaristique ingénieuse qui augmente un peu plus la durée de vie du soft.
Des forces, il vous faudra en prendre si vous souhaitez venir à bout des différents dangers qui se trouveront sur votre chemin. Soyez vigilants, car les vestiges du passé pourraient venir vous hanter, en vous ensorcelant avec de puissants pouvoirs. De la même manière, parfois, de puissantes créatures peuvent être effrayées à la vue de simples miroirs. Et comme l’a dit un vieil homme un jour : un Trico peut en cacher un autre…
Verdict
The Last Guardian est une expérience unique à vivre au moins une fois dans sa vie. La relation qui unit cet enfant à son compagnon est absolument bouleversante. Sa bande son originale et enchanteresse nous transporte inévitablement dans un autre univers. Diamétralement opposés l’un à l’autre, ils parviendront tous deux à communiquer afin de franchir les obstacles qui leur barrent la route. Sa patte artistique ne vous laissera pas indifférent, que vous appréciez ou non. Malheureusement, le titre de Fumito Ueda pèche dans sa gestion de la caméra décevante, et une physique des personnages parfois hasardeuse.
Test réalisé sur PS4 avec une version éditeur
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