Lorsqu’en 2015, Tango Gameworks sortait The Evil Within, beaucoup pensaient que cette nouvelle licence made-in Shinji Mikami bousculerait les codes du genre. Il faut dire que le monsieur a su apporter sa pierre à l’édifice (bien qu’il soit considéré à tort comme le père du genre), et avec ce premier opus, il a clairement démontré qu’il n’avait rien perdu de son talent. Une aventure forte en émotion qui nous mettait dans la peau de l’inspecteur Castellanos, que l’on retrouve aujourd’hui dans une nouvelle épopée qui mettra ses nerfs ainsi que ceux des joueurs à rude épreuve.
Test réalisé sur PS4 à partir d’une version numérique fournie par l’éditeur
Back to the STEM
Quand on y repense, cela fait déjà 3 ans que Shinji Mikami nous a proposé à nouveau sa vision du survival horror, par le biais d’une nouvelle licence horrifique. Alors qu’il fut lui-même inspiré par le culte Alone in the Dark, ce dernier a depuis été à son tour une source d’inspiration pour de nombreux studios et développeurs. Il n’y a rien de vraiment étonnant à cela. Car, comme il nous l’a démontré avec The Evil Within au mois d’octobre 2014, ce grand nom du jeu vidéo est loin d’en avoir fini avec le genre. Si l’on ne peut pas vraiment parler de chef d’œuvre lorsqu’il s’agit de définir The Evil Within premier du nom, il a su nous charmer à l’époque malgré quelques tares techniques. Autant dire que la promesse d’une nouvelle valse psychologiquement malsaine et horrifique à souhait nous enchantait au plus haut point.
Le premier opus accuse déjà le poids des années et en cela, il était inconcevable que Tango Gameworks réitère les mêmes erreurs. La bonne nouvelle, c’est que les fans ont été écoutés. The Evil Within 2 n’est en rien une simple copie carbone de son prédécesseur, le tout agrémenté d’un nouveau scénario histoire de mieux faire passer la pilule. Il met ainsi en scène l’anti-héros du premier volet, Sebastian Castellanos, plus en proie à ses démons que jamais, comme le démontre la scène d’ouverture qui lui fera revivre en partie l’événement qui a causé la perte de sa fille bien aimée. Si vous avez complété The Evil Within, vous n’êtes pas sans savoir qu’il s’agit de l’élément déclencheur qui a bouleversé la vie du détective, avant que ne surviennent les évènements de Beacon City.
Une rencontre fortuite (ou pas) avec la belle et mystérieuse Kidman et des agents de Mobius le plongeront de nouveau dans un monde étrange généré par le STEM, dont le noyau n’est autre que Lili, sa fille qu’il pensait décédée. Encore une fois manipulé par l’organisation secrète mentionnée plus haut, l’ex-détective plongera à corps perdu dans l’une des cuves du STEM pour tenter de sauver son enfant. Une fois sur place, il se rend vite compte que le tout ne sera pas une partie de plaisir.
L’union ne fait pas vraiment la force
L’histoire prend cette fois-ci place dans la petite ville d’Union, visiblement très instable et envahie de monstres en tous genres. Un postulat de départ qui n’est pas sans rappeler le précédent opus. Sauf qu’à partir de ce moment-là, The Evil Within 2 va se détacher de son prédécesseur en s’émancipant de l’aspect très linéaire mis en place dans ce dernier. Il ne sera alors plus seulement question d’avancer en ligne droite puisque le jeu nous donnera l’occasion d’explorer différents points de la ville. Et on insiste ici fortement sur le terme « exploration », puisque si les espaces mis à notre disposition s’avèrent être très réduits, il nous sera très souvent suggéré de sortir des sentiers battus afin de récupérer ressources ô combien utiles et éléments liés à l’histoire.
La sensation de liberté n’est pas forcément au rendez-vous puisque le level design impose très vite ses limites notamment par le biais de nombreuses portes de maisons condamnées par Mobius. Mais cela permet de renforcer l’aspect survie puisqu’au fil de nos allers et venues, les créatures continueront de déambuler dans les rues. La discrétion sera alors de mise, de façon bien plus juste que dans le premier opus. Là où l’infiltration ne servait que peu, elle est ici largement récompensée, puisque l’on peut sans problème contourner un groupe de monstres purulents pour peu que l’on prenne le soin de bien identifier leur façon d’agir. S’il est tout à fait possible de laisser parler la poudre, la présence limitée de munitions sera très souvent un obstacle à la barbarie pure. Ça tombe plutôt bien, car vous aurez largement l’occasion de jouer de vos armes à feu dans des situations données, notamment contre les boss. Ces derniers sont d’ailleurs moins présents que dans le premier volet, mais tout aussi intéressants à affronter, si ce n’est plus.
Il faut dire qu’à l’instar de la direction artistique, toujours aussi maitrisée, le bestiaire s’avère être efficace au possible, même s’il puise parfois dans ce que l’on a pu voir dans le précédent opus. Que ce soient de simples monstres comme des créatures plus imposantes à base de débris de corps humains, difficile de rester de marbre devant une telle créativité malsaine. Quant aux antagonistes, ils sont tout aussi charismatiques que l’était Ruvik, avec des motivations et des caractères qui leurs permettent de se distinguer de simples méchants à éliminer pour parvenir à nos fins. Mention spéciale à Stefano, l’artiste maniaque et sociopathe qui a un goût prononcé pour l’art dérangeant.
L’une des principales nouveautés de The Evil Within 2 réside dans le communicateur, qui en plus de faire office de Talkie-Walkie longue portée, nous permet de capter les voix d’agents de Mobius décédés. Lorsque Sebastian les capte, il peut choisir de les suivre, ce qui le mènera à des cadavres sur lesquels il pourra récupérer munitions et objets bien utiles, lorsqu’il ne s’agira pas de bribes du passé à découvrir afin de venir apporter quelques briques à l’histoire.
Mein craft
Comme nous vous le disions plus haut, pour survivre dans cet environnement hostile, Sebastian pourra compter sur de nombreuses ressources qui lui permettront de crafter munitions, carreaux d’arbalète et seringues médicales. Si le fait de crafter lorsqu’on est en déplacement met le jeu en pause, cela s’avère être plus couteux que de passer par les quelques établis que l’on trouve dans les planques. Une méthode qui pourra sauver lors de situations délicates mais dont il ne faudrait pas abuser, et ce, à plus forte raison si la curiosité ne vous pousse pas à aller rechercher des ingrédients dans les poubelles et autres tiroirs.
Toujours dans une démarche d’amélioration, les armes que l’on utilise pourront être modifiées à l’aide de pièces détachées. Nombre de munitions, temps de recharge, puissance… Les arbres sont assez fournis et les pousser au maximum de leurs possibilités prendra du temps. Au même titre que l’amélioration des caractéristiques de notre personnage, qui passe toujours par ce fameux gel vert que l’on peut récupérer par hasard dans un distributeur ou après avoir éliminé un monstre. On retrouve alors pour ce faire l’énigmatique et froide Tatiana, toujours là lorsqu’il s’agit de donner des conseils pour le moins détachés à notre héros.
Est-ce que l’aventure est vraiment plus intéressante que celle du premier opus, ou bien est-ce la liberté d’action plus permissive qui rend ce The Evil Within 2 plus agréable à parcourir que son prédécesseur ? Il y a un peu des deux en fait, puisque la narration perd un peu moins le joueur et passe davantage par les collectibles à ramasser qui racontent chacun à leur façon des bribes de l’histoire d’Union. Là où certains titres jouent sur cet aspect-là afin de pousser les joueurs à remettre un franc dans la machine via le New Game +, The Evil Within 2 nous invite à relancer le cauchemar de Sebastian Castellanos par la simple efficacité de son gameplay.
On ne vous cachera pas que les éléments à ramasser, en nombre conséquent, y sont pour beaucoup. D’ailleurs, les clés permettant d’ouvrir des casiers recélant divers bonus comme des munitions, du gel vert ou des pièces détachées sont toujours de la partie et motiveront les plus perfectionnistes à pousser les portes du NG+. Le jeu se dote alors d’une durée de vie tout à fait convenable puisque le premier run maintient le joueur en haleine pour 15 à 20h en fonction de la propension de chacun à s’intéresser aux quêtes annexes et évènements spéciaux.
Tu la sens la pression ?
À l’instar de son ainé, The Evil Within 2 risque fort de vous faire transpirer et joue allègrement sur les moments forts où la tension est à son comble. Le fait est que le jeu ne joue pas autant sur les jumpscares qu’on pourrait le croire. L’essence même de l’angoisse réside dans l’ambiance instaurée par le jeu, et les musiques stressantes au possible y sont pour beaucoup. La direction artistique n’est bien sûr pas en reste et est un élément absolument indissociable du caractère oppressant du titre, bien qu’elle s’avère être magistrale dans la deuxième partie de l’aventure. Plus inspirée, plus cauchemardesque, plus infernale… Tout bonnement excellente pour tous ceux qui sont un tant soit peu sensibles à ce genre d’ambiance glauque à souhait.
On aurait pu croire que les doublages français desserviraient le titre de Tango Gameworks, mais il n’en est rien. L’acteur doublant Sebastian nous offre une prestation convaincante appuyée par un personnage qui sait garder la tête sur les épaules malgré les évènements. Pour autant, malgré son côté badass à souhait, il n’en reste pas moins vulnérable et ne reste pas indifférent face aux créatures qui se mettront à ses trousses. En creusant dans son passé, on apprend à découvrir le personnage et on finit par s’y attacher bien plus que dans le premier opus. Son côté bourru, toujours prêt à lâcher quelques jurons léchés, donnerait presque au joueur confiance en lui. Jusqu’au moment où, dans un excès d’assurance, l’écran de game over apparaît, nous rappelant que s’il semble aussi fort qu’un roc, notre protagoniste n’en reste pas moins faible dès lors qu’il se trouvera face à plus de 2 ennemis.
On regrettera alors que l’aspect technique, certes, rehaussé depuis le précédent volet, soit encore un défaut ne permettant au jeu de briller comme il se doit. Que ce soit des petits bugs de collision, des hitboxes capricieuses ou de micro ralentissements sur PS4 lambda, un léger peaufinage aurait été le bienvenu afin d’offrir une expérience optimale. Graphiquement il y a du mieux avec des environnements relativement fouillés, mais certaines textures, notamment celles des cheveux, font encore tâche. Dommage, car le STEM engine semble être un moteur prometteur qui, mieux exploité, pourrait probablement faire quelques merveilles. Ce qui n’empêche tout de même pas The Evil Within 2 de transformer l’essai.
Verdict : 8/10
The Evil Within 2 est l’exemple même de la suite qui fait tout mieux que son prédécesseur et qui s’avère donc indispensable pour les amateurs de survival horror. Alors qu’il pourrait se contenter de disperser quelques screamers ici et là pour effrayer les joueurs, il met en place une atmosphère oppressante des plus efficaces. Fort de son ambiance angoissante, il offre cette fois-ci une certaine liberté d’action délectable qui lui permet d’offrir quelques quêtes annexes bienvenues, afin de notamment mettre en avant le background des personnages croisés ou ayant péri dans Union. À savourer les volets fermés avec un casque sur les oreilles pour en profiter au maximum, bien évidemment.
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