Genre omniprésent dans le jeu vidéo, l’horreur ne cesse de se développer, d’évoluer et de se renouveler au fil des années. Néanmoins, certains irréductibles peuvent parfois regretter de tels changements et se dire que les jeux d’horreur, c’était mieux avant. Song of Horror est pour ces joueurs-là. Développé par Protocol Games et édité par Raiser Games, il est pensé comme un vibrant hommage aux jeux des années 1990. Reste à voir si dans le cas présent, l’adage qui affirme que c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes se vérifie.
Test réalisé sur PC à partir d’une copie numérique non-maudite fournie par l’éditeur
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L’appel de la musique
Avant toute chose, sachez que Song of Horror est un jeu épisodique. Dans le cadre de ce test, nous reviendrons donc uniquement sur les épisodes 1 et 2, les autres n’étant pas encore disponibles. Tout commence alors que Daniel Noyer, un ex-alcoolique qui travaille désormais pour une maison d’édition appelée Wake Publishing, est appelé par son patron. Ce dernier lui demande de se rendre au domicile de l’un de leurs auteurs, Sebastian P. Husher, qui ne donne plus de nouvelles depuis plusieurs jours. Une fois arrivé sur les lieux, Daniel se retrouve confronté à un immense manoir vide. Du moins en apparence, puisqu’il va rapidement être témoin de phénomènes étranges causés par une mystérieuse entité appelée La Présence, visiblement liée à une boîte à musique. C’est ainsi que se termine le préambule, et donc la mise en place de l’histoire.
Héros potentiels, victimes potentielles
Pour la suite de l’aventure, le jeu nous offre la possibilité d’incarner différents personnages pour chacun des épisodes, tout en sachant que tous sont plus ou moins liés aux événements d’une manière ou d’une autre. Dans le cadre du premier épisode, intitulé Le Manoir Husher, les protagonistes sont Sophie Van Denend, Étienne Bertrand, Alexander Laskin et Alina Ramos. Dans le deuxième, intitulé Étrangement calme, les trois derniers laissent place à Érica Färber, René Artigas et Daniel Noyer. Peu importe le personnage choisi par le joueur, l’histoire se passera dans les mêmes conditions. Toutefois, il en découle quelques subtilités de gameplay qui peuvent avoir une certaine influence sur le déroulement des événements. C’est d’ailleurs là l’un des aspects les plus intéressants du jeu.
En effet, chacun dispose de caractéristiques personnelles réparties selon quatre critères : vitesse, discrétion, force et sérénité. De la même manière, les sources de lumière peuvent varier de l’un à l’autre (lampe de poche, bougie, briquet) tandis que chacun possède un objet bonus potentiel qui peut littéralement changer la donne en fonction des situations. C’est donc au joueur de peser le pour et le contre et de déterminer avec quel personnage il souhaite se lancer dans l’aventure. Cela va même plus loin puisque chacun dispose d’une personnalité unique qui se ressentira lors des différentes interactions avec les éléments du décor. Certes, cela reste purement accessoire, mais c’est une mécanique fort appréciable qui permet de leur donner un semblant de vie et de vécu, ce qui n’est définitivement pas le cas du doublage visiblement réalisé sans grande conviction.
En revanche, comme on peut s’en douter, le fait de pouvoir incarner différents personnages n’est pas anodin. À la manière d’un Until Dawn ou d’une production Quantic Dream, Song of Horror repose sur le principe de la mort permanente : tuez l’un de vos protagonistes et vous ne pourrez plus l’incarner par la suite. Toutefois, dans le cas présent, le fonctionnement diffère quelque peu des exemples cités puisqu’il suffira alors d’en sélectionner un autre, de retourner sur les lieux et de reprendre l’aventure là où elle s’est arrêtée pour le personnage précédent, après avoir préalablement récupéré son inventaire sur les lieux de sa mort. Il n’y a pas de réel « game over » donc, à moins de perdre les quatre protagonistes les uns après les autres, auquel cas il faudra recommencer l’épisode depuis le début.
La Présence est dans la place, mais pas la peur
Si les chances que cela arrive restent très minces, il vaut mieux ne pas trop se reposer sur ses lauriers pour autant. Pour cause, comme son nom l’indique, La Présence reste omniprésente tout au long des épisodes, et quelques secondes d’inattention peuvent suffire à tout faire basculer. La particularité de Song of Horror repose notamment sur le fait que les apparitions de l’entité sont aussi aléatoires que variées, et qu’il faut réagir très rapidement afin de ne pas finir entre ses mains. En d’autres termes, elle est totalement imprévisible. Parfois, elle se contentera de nous mettre quelques coups de pression à coups de screamers bien placés et d’événements inoffensifs mais efficaces. À d’autres moments, elle se montrera plus agressive et nous forcera à réagir en conséquence. Il faudra par exemple bloquer la porte pour l’empêcher d’entrer, se cacher et contrôler les battements de son cœur pour éviter de paniquer ou encore contrôler sa respiration pour ne pas se faire repérer en faisant du bruit.
En termes d’ambiance, cela fonctionne plutôt bien au cours des deux premières heures de jeu – au passage, comptez environ sept à huit heures pour venir à bout des deux épisodes. Malheureusement, la faute à des mécaniques répétitives qu’on appréhende de plus en plus en progressant, le sentiment de peur disparaît assez rapidement pour ne laisser place qu’à une petite dose de stress tout au plus, et encore. Davantage de renouvellement dans les apparitions de La Présence aurait été le bienvenu, notamment d’un épisode à l’autre. Certes, il y en a, mais elles sont trop similaires et surtout trop peu nombreuses pour parvenir à renouveler la peur. Il ne reste alors qu’un sentiment de lassitude lié au fait de devoir réaliser en boucle les mêmes QTE qui, en plus de cela, peuvent parfois être assez fastidieuses à accomplir. Évoquons tout de même les moments où le jeu nous laisse la possibilité d’effectuer ou non une action (récupérer un objet, fouiller quelque chose, découvrir un élément du décor) car cela se fait à nos risques et périls et peut parfois être lourd de conséquence. Ce n’est pas récurrent, mais très sympathique quand même.
Hommage au maître de l’horreur
Nous évoquions un peu plus haut le fait que le jeu de Protocol Games a pour vocation de rendre hommage aux expériences vidéoludiques horrifiques des années 1990. Cela se perçoit surtout dans les mécaniques de progression au sein des épisodes, qui se calquent lourdement sur celles des premiers opus de l’un des maîtres en la matière : Resident Evil. À partir de plans de caméra fixes, le joueur se retrouve à explorer d’immenses environnements afin de mettre la main sur une série d’objets qui lui permettront d’avancer et de débloquer de nouvelles zones, tout en récupérant des documents destinés à faire la lumière sur les événements de l’histoire. L’hommage à la célèbre franchise de Capcom est d’autant plus fort dans l’épisode 1 qu’il se déroule dans un Manoir, tandis que le deuxième prend place dans un complexe résidentiel mêlant habitations, ruelles et boutiques. Précisons par ailleurs que le moteur du jeu offre des environnements et jeux de lumière de très bonne facture, contrairement à ses modèles de personnages aux visages aussi ratés que figés.
Si la progression est extrêmement fluide dans l’ensemble – ce qui n’est pas forcément le cas de la prise en main, qui semble elle aussi vouloir faire honneur aux jeux de l’époque avec sa lourdeur et sa rigidité –, elle sera toutefois régulièrement entravée par de nombreuses énigmes. Et autant dire que dans le cas présent, c’est probablement l’hommage aux productions des années 1990 le plus réussi, mais surtout le plus réjouissant pour les amateurs de réflexion. Faisant appel à notre logique, aux mathématiques mais aussi parfois à notre mémoire, les puzzles de Song of Horror sont extrêmement bien pensés et nous confrontent à une réelle difficulté sur laquelle on peut facilement buter durant plusieurs dizaines de minutes. Il ne faut absolument pas s’attendre à être pris par la main et bénéficier d’une quelconque aide, qu’elle soit visuelle ou sonore, pour en venir à bout. Vous êtes seul du début à la fin, et si vous voulez jeter l’éponge, vous devrez faire comme à l’époque : filer lire une soluce. On pourra quand même regretter le fait que certaines soient un peu tirées par les cheveux et qu’elles auraient mérité quelques explications pour être un peu plus claires dans leur fonctionnement.
Verdict : Une formule intéressante
En conclusion, on peut dire que le charme de la douce et maudite mélodie de Song of Horror parvient plus ou moins à opérer, en tout cas sur les deux premiers épisodes. À partir de son scénario simple mais intriguant, le titre développé par Protocol Games nous immerge dans un univers qui, à défaut de parvenir à maintenir son ambiance de bout en bout, offre de beaux moments de stress, d’exploration mais aussi de réflexion. Si les amateurs de frayeurs n’y trouveront probablement pas vraiment leur compte, les nostalgiques d’expériences horrifiques à la sauce des années 1990, Resident Evil en tête de liste, seront sans aucun doute ravis de découvrir cette aventure.
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