Développé et édité par Jumpship, Somerville est un jeu narratif de science-fiction nous propulsant dans la peau d’un jeune père de famille qui cherche à retrouver la trace de sa femme et de son fils dont il a été séparé à cause d’une invasion planétaire que rien ne présageait. Désarmé et désœuvré, il doit faire face à de nombreux obstacles pour tenter de retrouver ses proches dans un pays complètement défiguré par les combats et où seules quelques traces de vie subsistent encore. À la fois dystopique mais aussi mélancolique, Somerville est la première création d’un jeune studio anglais du nom de Jumpship avec à sa tête deux fondateurs, Chris Olsen à l’écriture et Dino Patti à la production. Ce dernier est notamment connu pour avoir co-créé le studio indépendant Playdead à l’origine des célèbres pépites Limbo et Inside dont nous retrouvons en quelque sorte l’essence dans Somerville. Si ces deux précédents titres ont connu un succès non dissimulé, en sera-t-il de même pour Somerville ? Réponse dans notre test.
Test réalisé sur Xbox Series X grâce à une copie numérique fournie par l’éditeur
La famille, ça n’a pas de prix
Somerville est un jeu narratif mêlant 2D et 3D à la direction artistique rappelant l’esthétique des planches des bandes dessinées. Vous y incarnez un jeune père de famille qui se retrouve malgré lui au beau milieu d’une guerre à l’échelle planétaire. Totalement impuissant face aux événements apocalyptiques qui se déroulent sous ses yeux, notre héros tente tant bien que mal de retrouver sa famille dans toute cette confusion. Nous avons ainsi parcouru une dizaine de niveaux aux environnements divers et variés qui n’avaient très souvent que pour seul point commun, l’inhospitalité. Que ce soit à l’orée d’une forêt désolée, en plein milieu d’une ville dévastée ou bien encore, en arpentant les allées désertes de ce qui fut pour une courte durée, un camp de réfugié, notre héros tente coûte que coûte de survivre à la catastrophe dont il est témoin pour retrouver sa femme et son fils.
Mais que peut bien faire un seul homme face à une invasion planétaire ? Et bien pas grand chose. Principalement basé sur l’exploration et la fuite avec des énigmes à résoudre pour passer outre des obstacles, le jeu possède des mécaniques et des commandes très simples dans des niveaux en tunnel. Bien que le jeu se contente d’un joystick pour les déplacements horizontaux et verticaux, d’une touche d’action pour déplacer des objets et de deux autres touches pour utiliser des capacités spéciales que nous détaillons plus loin, il n’en est pas pour autant dénué d’intérêt et de profondeur, bien au contraire. Car oui, très vite, notre père de famille hérite de la capacité d’un super soldat que l’infortune l’a poussé à rencontrer. Ledit pouvoir n’est pas extraordinaire en soit puisqu’il permet seulement de liquéfier la matière extraterrestre autour de lui et c’est sur cette dernière mécanique que sont principalement basées les énigmes. Cependant, pour que le pouvoir puisse fonctionner, notre héros doit-être en présence d’une source lumineuse, les énigmes se déroulent alors souvent en trois temps : trouver une source lumineuse, l’alimenter puis la détourner pour liquéfier l’obstacle. D’autres mécaniques plus classiques à base de poulie, de porte verrouillée et d’objets à déplacer barreront également votre route. Plus loin dans l’aventure, d’autres pouvoirs permettront d’enrichir le champ des possibles de notre héros vis-à-vis de cette fameuse matière extraterrestre mais en parler davantage risquerait de gâcher la découverte. Pour autant, ces mécaniques sont très appréciables tant elles sortent des sentiers battus des jeux du genre et des standards habituels. De plus, Somerville nous pousse sans arrêt à réfléchir pour faire progresser notre personnage et franchir les obstacles qu’il rencontre et ce, très naturellement.
Même si l’aventure de Somerville nous fait évoluer dans un environnement très linéaire au champ d’action limité, les environnements dans lesquels nous évoluons parfois, coupent le souffle. Malgré une atmosphère très oppressante, le jeu ne fait pas peur pour autant et peut-être confié aux joueurs les moins téméraires. À notre grande surprise, le jeu ne possède aucun dialogue et il ne nous aiguille que très peu sur les actions à réaliser. Tout est donc soumis à l’interprétation du joueur. Au fil de l’eau, celui-ci est témoin de différentes scènes qui lui permettent de mieux comprendre les capacités des ennemis. Un enfant qui disparaît dans un rayon de lumière, des fuyards qui, dans un vacarme fracassant, alertent et attirent les ennemis, etc. Pour les plus attentifs, quelques secrets et collectables sont dissimulés ici et là dans les niveaux. Bien que Somerville ne possède pas de dialogues, il est limpide dans les messages qu’il cherche à transmettre grâce notamment à une mise en scène et à des plans de caméra qui renforcent grandement le sentiment d’immersion. Certains l’auront déjà remarqué mais le jeu emprunte subtilement de nombreux codes au cinéma pour accentuer la narration. En effet, le jeu est retranscrit au format cinémascope qui est le format utilisé par les pellicules du grand écran et qui possède une image plus large que haute, d’où les bandelettes noires en bas et en haut de l’écran. Sans oublier que l’histoire de Somerville rappelle facilement celle de La Guerre des Mondes de Spielberg. De plus, à la manière d’un plan séquence, la caméra suit le personnage à travers tous ses environnements, avec de rares transitions et alternant aisément entre les plans larges et les plans plus restreints comme en témoignent les captures ci-dessous. Avec une texture lissée, lowpoly et des couleurs qui semblent avoir été étalonnées, l’atmosphère a été rigoureusement travaillée pour maximiser les sensations manette en main et malgré quelques bugs relatifs à l’accès anticipé qui seront sans aucun doute corrigés à sa sortie, pour nous une chose est sûre, du côté de l’immersion c’est réussi.
Une histoire riche pour qui saura la comprendre
Dans Somerville, l’atmosphère vacille entre réflexion, émotion et tension. Les quelques moments emprunts de mélancolies sont doucement accompagnés par une bande originale envoûtante au piano tandis que les moments plus stressants comme les traques ou les courses-poursuites seront quant à eux accompagnés de bruits plus sourds et électroniques, soulignant l’effroi que communiquent nos ennemis mécaniques. Les autres rares signes de vie que nous croisons au long de notre aventure renforcent l’idée que l’homme est faible face à l’ennemi et que chacun lutte comme il peut pour survivre sans pour autant comprendre réellement ce qu’il lui arrive. Même sans dialogues, la richesse des environnements et de la gestuelle des personnages suffisent à comprendre ce qu’il se trame pendant pratiquement toute l’aventure. Cependant, la fin du jeu nous a semblé beaucoup moins limpide et aurait, à nos yeux, mérité davantage d’attention et d’intention de développement scénaristique car contrairement au reste de l’aventure, elle nous a semblé trop chimérique et nous y avons été beaucoup moins sensibles, laissant en bouche ce goût quelque peu désagréable de doux-amer à une aventure qui aurait pu se terminer en apothéose. De plus, si l’histoire comporte une dizaine de niveaux, elle est relativement courte et se boucle entre 4 à 6 heures grand maximum. Nous aurions par conséquent apprécié un développement plus approfondi sur la fin de cette aventure bien que nous soyons conscient que le titre a été développé par une petite équipe.
Verdict : 8/10
Pour conclure, Somerville est une véritable pépite indépendante comme il n’y en a pas assez. Malgré une fin qui nous a laissé sur notre faim et une aventure de trop courte durée, le périple que nous avons passé aux côtés de notre héros au travers de ces nombreux paysages dévastés ont été une véritable source d’émerveillement tant l’aventure, la direction artistique et le sound design sont prenants, et cohérents tout du long. Combinant à merveille un gameplay simple avec des mécaniques novatrices, Somerville déroute tant il est surprenant et malgré ses quelques défauts, nous ne pouvons que le recommander aux joueurs sensibles aux univers de science-fiction dystopiques. En plus, Somerville sera inclus dès sa sortie sur le Game Pass pour les joueurs Xbox et PC, alors pourquoi s’en priver ?
Laisser un commentaire