Si l’on connait surtout Roll7 pour la franchise de jeux de skate OlliOlli, vous vous souvenez probablement moins du très sympathique Not a Hero, qui faisait moins dans la dentelle et délaissait les planches à roulettes pour faire la part belle aux gunfights. Avec Rollerdrome, c’est un peu le meilleur des deux mondes que nous propose le studio britannique en faisant le pari de mélanger sport extrême et tir à la troisième personne. Ambitieux jusqu’au bout, Rollerdrome est aussi le plus gros projet du studio, tout du moins en apparence : on quitte les déplacements en 2D d’OlliOlli pour évoluer dans un univers au style bande dessinée en 3 dimensions. Reste à voir si, de la même façon que son héroïne Kara Hassan, Rollerdrome saura remporter la finale.
Test réalisé sur PlayStation 5 à l’aide d’un code fourni par l’éditeur
En 2030, le sport se pratique en rollers et armé jusqu’aux dents
Un concept atypique et un studio indépendant qui nous a scotché à la manette il y a quelques mois de cela avec l’excellent OlliOlli World : il ne nous en fallait pas plus pour que la nouvelle production de Roll7 nous intrigue. Car au-delà de sa plastique qui semble irréprochable, force est de constater qu’il n’est pas sans rappeler un certain Jet Set Radio, le côté fun et l’univers urbain en moins. Au contraire, la nouvelle production de Roll7 verse dans le dystopique jusqu’au bout et dépeint un futur proche ou le sport rime étrangement avec la mort.
Le jeu débute de façon assez abrupte, sans même prendre le temps de poser les bases de son univers ou de son scénario, avec l’une des rares phases d’exploration du jeu. Présentées en vue à la première personne, ces dernières permettent de glaner quelques informations sur les protagonistes (à commencer par Kara, le personnage que l’on incarne), et dépeignent l’histoire du jeu, puisqu’il s’agit du seul semblant de narration que l’on pourra y trouver. Ce qui n’est pas forcément un mal en soi, Roll7 s’étant davantage illustré de par le gameplay de ses précédents titres que par leur scénario.
On notera d’ailleurs que ces rares moments de calme peuvent être raccourcis en se dirigeant en ligne droite vers la prochaine épreuve. Puisque, in fine, Rollerdrome prend la forme d’un tournoi qu’il faudra évidemment remporter en progressant dans les différentes étapes de ce dernier. De prime abord, la construction du jeu semble tout à fait basique et l’enrobage est à l’image de son menu principal : sobre et sans fioritures. Encore une fois, les développeurs de Roll7 nous rappellent que l’école qu’ils privilégient est celle du gameplay, et à ce niveau-là, il y a largement de quoi être servi.
Le principe est donc assez simple, puisque les différents niveaux du jeu sont des arènes, qui peuvent parfois être divisées en plusieurs parties et dans lesquelles sont dispersés des Joueurs Maison, soit des IA dont le but est d’éliminer Kara. Les premières épreuves comportent des ennemis assez basiques (des tireurs et des batteurs) mais le jeu invite très rapidement de nouvelles classes qui viennent pimenter les choses, ce qui fait de plus en plus de menaces à gérer. La courbe de difficulté reste donc assez logique, d’autant que l’on obtient au fur et à mesure 3 nouvelles armes qui viennent compléter le duo de Pistolet initial.
Le Fusil à Pompe, le Laser et le Lance Grenade possèdent chacun leurs avantages et leurs inconvénients, mais ils offrent surtout davantage de versatilité au niveau des affrontements. Vous vous en doutez, certaines classes sont mieux protégées que d’autres et une puissance de feu supérieure fait parfois mieux le café que de simples pistolets mais il y a également une notion de ressenti : l’essentiel est de trouver l’arme ou les armes avec lesquelles on est le plus à l’aise. Sans compter qu’il est tout à fait possible de faire exploser des barils d’essence ou encore de retourner certains éléments contre les IA.
Prends en de la graine, Tony Faucon
Nous l’évoquions déjà dans notre aperçu du jeu : Rollerdorme est un jeu qui, d’apparence, est plutôt facile à prendre en main. En dépit d’une certaine rigidité dans le maniement de Kara et du contrôle de la caméra qui peut parfois s’avérer compliqué lorsque l’on exécute un trick tout en tirant sur un ennemi et en enchaînant sur une esquive, le jeu se prend assez rapidement en main. Le nombre de figures réalisables n’a pas de quoi faire sauter au plafond les amateurs de jeu de glisse, mais Rollerdrome n’a pas la prétention d’être une simulation de sport extrême.
Les tricks ont pourtant une grande importance et font partie intégrante du gameplay, loin de faire simplement office de fioriture pour justifier les rollers aux pieds de la protagoniste. En marge de contribuer grandement au score final, réaliser des grabs et grinds permet de récupérer des munitions. C’est d’ailleurs le seul moyen de récupérer ces dernières, ce qui signifie, vous l’aurez compris, qu’il ne faudra pas lésiner sur les prouesses aériennes afin d’avoir ses chargeurs toujours à bloc.
Inutile de mentionner que varier les figures et ne pas réaliser systématiquement les mêmes tricks confère davantage de points et permet de recharger ses armes plus rapidement. Par ailleurs, les manipulations sont relativement simples à réaliser, et il n’y a pas besoin de gérer l’atterrissage comme nous aurions pu nous y attendre. De ce fait, on peut principalement se concentrer sur les combos et les tricks à réaliser, en plus des IA à éliminer. Et croyez-nous, cela fait déjà bien assez de choses à prendre en compte.
Si nous sommes rarement partisans de la visée automatique, reconnaissons que dans Rollerdrome, elle s’avère presque indispensable, notre personnage étant sans arrêt en mouvement. Elle se déclenche en pressant la gâchette L2/LT et permet de lock l’ennemi le plus proche du viseur. Autre fait intéressant, un effet de ralenti se déclenche durant quelques instants lors de l’utilisation de la visée. Une fois épuisée, il faut effectivement attendre quelques secondes pour l’utiliser à nouveau, mais de manière générale, elle sera votre alliée à 90% du temps. Réaliser une esquive parfaite peut même déclencher un super ralenti, durant lequel les tirs des armes du joueurs infligent plus de dommages. La fenêtre est assez courte, mais finalement le super ralenti n’est pas si compliqué à déclencher que l’on pourrait le croire : il est principalement question de prendre le coup de main pour parvenir à l’activer presque quand on veut.
Utiliser le ralenti à bon escient peut être une véritable échappatoire lors de situations critiques et offre surtout des moments franchement grisants lorsque l’on y combine des tricks et des exécutions bien placées. C’est l’une des forces de Rollerdrome que d’offrir une action très viscérale, durant laquelle il faut davantage laisser parler son instinct que son cerveau. Le résultat est parfois exceptionnel, tant on se surprend à enchaîner les combos et à éviter les tirs de sniper, les mines, les missiles ainsi que les coups de batte.
Jusque-là, Rollerdrome a tout de la très bonne surprise de l’été. Les sensations sont excellentes, l’ensemble est parfois un peu frustrant, la faute à une difficulté un peu artificielle due à de trop nombreux projectiles visant Kara et la non possibilité d’enchaîner deux esquives à la suite. Mais le challenge a le mérite d’être présent, et connaissant Roll7, il fallait s’y attendre. D’autant que des leaderboards viennent renforcer l’envie de refaire certaines arènes pour se confronter aux joueurs du monde entier.
Il faudra encore travailler ses tricks pour obtenir la médaille d’or
Mais voilà, tout n’est pas parfait lorsque l’on chausse les rollers de Kara Hassan. Notons déjà que le jeu est assez court : la campagne contient 11 niveaux qui, pour certains, se composent comme nous l’avons dit quelques paragraphes plus haut, de phase d’exploration. Ce qui aurait tout à fait eu du sens pour peu que l’histoire eût été développée. Dans l’état actuel des choses, prendre les 2 minutes nécessaires pour examiner tous les journaux, messages vocaux, mails et autres écrits ne semble finalement pas nécessaires. Ces passages auraient pourtant gagné à être véritablement scénarisés et à disposer d’une véritable narration afin de mieux mettre en avant les petites magouilles de Matterhorn et la façon dont le tournoi de Rollerdrome est utilisé pour maquiller leurs actes.
Avec une petite poignée de minutes nécessaires pour boucler chaque épreuve (comptez environ 2 à 4 minutes pour terminer chaque arène, et à peine plus pour le niveau final), il ne faudra guère plus d’une heure trente à un joueur moyen pour compléter le jeu une première fois – si l’on prend en compte que quelques essais peuvent parfois être nécessaires. Il est vrai que chaque niveau s’accompagne de défis, mais les réaliser à la chaîne tel un chasseur de trophées n’est pas franchement très intéressant dans l’idée. Alors, que reste t-il dans Rollerdrome mis à part cela.
Eh bien figurez-vous qu’un mode Ça va saigner se débloque dès lors la campagne terminée. Concrètement il s’agit plus ou moins de refaire des variations des niveaux de l’histoire avec plus d’ennemis, des dégâts perçus accrus et toutes les armes débloquées de base. Il fallait au moins cela pour se heurter à ce nouveau mode à la difficulté un peu stupide. Si nous avions parlé d’une difficulté artificielle dans les derniers niveaux de la campagne, cela prend ici tout son sens. Le problème est que Rollerdrome possède de très bonnes idées, mais la difficulté du mode Ça va saigner est particulièrement mal gérée, puisqu’il y a moult situations où il s’avère presque impossible de passer à travers des projectiles, des missiles, des explosions ou bien des flammes. Ajoutez les dégâts perçus multipliés par 1,5 et vous obtenez une dose de challenge conséquente pour les plus acharnés. Pour les autres, vous allez avoir de quoi remplir vos salières.
C’est d’autant plus dommage que cette nouvelle section du jeu permet de profiter de remixes de la bande son qui nous a accompagné durant les 11 niveaux de la campagne. Composée intégralement par Electric Dragon, l’ensemble des pistes de l’OST est un pur plaisir pour les oreilles. Véritable patchwork où se mêlent symphonies d’orgue et de clavecins inquiétants ponctuées de quelques notes électro au synthétiseur ou encore de rythmes plus rapides, presque funky si l’ambiance musicale n’était pas si anxiogène, la bande-son sait rester en tête. Les remixes, qui invitent des guests tels que Nightcrawler, Vincenzo Salvia, Lhasa Mencur ou encore Cartridge 1987 offrent d’excellentes déclinaisons des titres principaux. Encore faudra-t-il avoir assez de doigté pour en profiter dans Rollerdrome.
On reste un peu mitigés quant au fait de ne pas avoir un thème défini par arène et de se retrouver simplement avec une playlist en mode aléatoire, ce qui nuit un brin à l’ambiance des différents biomes. Ils ne sont pas bien nombreux, puisque l’on note au total 4 environnements, et le level design manque un peu de génie pour leur permettre de briller. Pour ainsi dire, aucun niveau ne nous a particulièrement marqué, c’est donc davantage l’action, ou plutôt les actions que l’on réalise, qui font des parties qu’elles sont enivrantes. Peut-être était-ce là le principal objectif de Roll7 ?
Toujours est-il qu’avec une direction artistique aussi réussie, on aurait apprécié des environnements un peu moins dépouillés, quoi qu’ils permettent de ne pas être trop déconcentrés, ce qui reste donc un mal pour un bien. La patte bande dessinée fait mouche, avec des palettes de couleurs assez froides, rappelant qu’il n’y a rien de chaleureux dans le tournoi de Rollerdrome, si ce n’est les explosions et flammes provoqués dans les arènes. La flamme, on aurait aimé qu’elle reste allumée chez nous, parce qu’il y a plein de bonnes idées chez Rollerdrome.
Malheureusement, Roll7 loupe de peu la finale. Peut-être qu’un peu de contenu supplémentaire ou bien la possibilité d’enregistrer ses meilleurs scores par la présence d’un éditeur vidéo aurait au moins généré davantage d’intérêt une fois l’écran des crédits atteint ? Peut-être qu’il aurait fallu davantage d’histoire ? Ou bien il aurait fallu jouer la carte de l’arcade au maximum et se concentrer sur du pur contenu de gameplay. Ceci étant dit, Rollerdrome reste un titre atypique, scotchant et malgré ses quelques erreurs, on ne peut s’empêcher de vouloir lui remettre un trophée, à lui et à l’équipe de 44 personnes ayant travaillé dessus. Celui qui poussera Roll7 à ne pas abandonner un concept aussi galvanisant et à améliorer la formule, quitte à pourvoir Rollerdrome en contenu par le biais de mises à jour gratuites. Car autant dire qu’à 30€, aussi intense l’expérience fut-elle, repasser à la caisse risque d’être difficilement justifiable pour la majorité des acheteurs.
Verdict : 6/10
Quelle bonne surprise que ce Rollerdrome. On aurait apprécié rester sur nos impressions à la suite de notre preview, malheureusement le jeu révèle toutes ses lacunes un peu trop vite. Tel un concurrent qui aurait puisé dans toutes ses forces au début de l’épreuve, Rollerdrome ne parvient pas à retomber sur ses pieds. L’expérience reste toutefois vraiment sympathique mais de très courte durée. On y sent la volonté de Roll7 d’offrir un gameplay facile à prendre en mains mais exigeant à maîtriser et le challenge est effectivement à la hauteur de choix. Peut-être un peu trop, dès lors que l’on pousse les portes du mode Ça va saigner. Avis aux curieux cependant, puisque Rollerdrome s’offre une belle promotion de lancement. Vendu presque 19,79€ sur Steam et pour les abonnés au PlayStation Plus durant les 2 semaines suivant sa sortie, ce sera peut-être l’occasion de ne pas se sentir floué par un jeu qui veut trop en faire, sauf sur sa narration et son contenu.
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