Considérée comme perdue par de nombreux amateurs de la première heure, la licence Resident Evil a, il faut l’avouer, un peu dévié de ses origines au fil du temps. De survival-horror mettant en scène les créatures mort-vivantes les plus appréciées de la culture populaire, nous sommes passés à de l’action sur-vitaminée à la troisième personne avec des scènes explosives qui en feraient pâlir Michael Bay. Malgré quelques spin-off sympathiques (Les opus Revelations et Revelations 2), on ne peut pas vraiment dire que le nom Resident Evil nous fasse actuellement frissonner comme ce fut le cas à une autre époque. Ainsi, Capcom a pris le taureau par les cornes en annonçant Resident Evil 7 afin d’offrir aux joueurs l’expérience qu’ils attendaient, avec une prise de risque certaine.
- Se joue sur : PlayStation 4 avec compatibilité PS VR
- Contrôleur de jeu : DualShock 4
- Position de jeu : Assise
- Motion sickness (nausées) : Faible (Rotation de la caméra par à-coups) à élevé (Rotation de la caméra fluide)
Cours Ethan, cours !
L’E3 2016 a marqué les fans de Resident Evil. En effet, longtemps sans nouvelles d’un nouvel opus canonique, les fans commençaient à se poser des questions. Certains ont littéralement enterré la licence qui n’a cessé d’enchaîner les déceptions, dont le point d’orgue fut la purge infâme nommée Umbrella Corps. Alors certes, il ne s’agit pas d’un Resident Evil à proprement parler, mais le lien avec la licence originale est un peu trop étroit pour ne pas le mentionner. Quant aux autres, ils attendaient patiemment, en tentant de ne pas trop faire attention au 6ème épisode, presque indécent en son genre. Même si, par extension, la torture dure depuis Resident Evil 4, qui a au moins le mérite d’être meilleur que le 5 et le 6, ne serait-ce que de par son ambiance.
En l’absence d’un véritable Resident Evil qui remettrait au cœur du sujet l’horreur, les amateurs ont au moins pu se tourner vers le très bon The Evil Within ou encore le remaster réussi du tout premier Resident Evil. Le problème pour Capcom était de parvenir à faire trembler les joueurs tout en trouvant le moyen d’adapter la formule originale, si chère aux fans. Impossible pour les développeurs de revenir en arrière et de proposer une aventure avec des plans fixes comme ce fut le cas à l’époque. Si cela fonctionne pour un remake/remaster, le marché du jeu vidéo a trop évolué pour que la formule fonctionne toujours aussi bien. L’horreur vidéoludique s’est, depuis quelques années, tournée vers la vue à la première personne et l’essai largement transformé par des titres comme Outlast ou le très reconnu P.T -qui n’aboutira malheureusement jamais au Silent Hills promis- et Capcom a cru bon d’aller dans le sens du vent.
Un choix qui ne parlera pas à tout le monde, à l’instar du contexte. Nombreux sont les joueurs qui auraient aimé voir revenir ce cher Chris Redfield ou ce bon vieux Leon Kennedy. Mais lorsque l’on veut faire naître l’horreur, est-il bon de mettre entre les mains des joueurs le destin d’un personnage surentrainé qui s’est imposé en héros à moults reprises ? L’idée de nous faire visiter une vieille bâtisse tenue par une famille légèrement dérangée sur les bords n’a également pas fait l’unanimité, puisque beaucoup ne voient pas du tout où est le rapport avec la série de Capcom. En ce sens, ce Resident Evil 7 aurait peut-être gagné à être un reboot plutôt qu’un énième opus dans une liste qui commence à se faire longue.
L’étrange manoir de Mr Jack
Nous voilà donc dans la peau d’Ethan, un jeune homme parti à la recherche de sa compagne dont il n’a plus de nouvelles depuis plusieurs années et dont il vient de recevoir un message lui demandant de venir la chercher dans une étrange demeure. Dès notre arrivée sur les lieux, on se rend très vite compte que rien ne tourne rond ici. Le décor plante très vite l’ambiance : Une maison perdue dans la cambrousse du Bayou, et des résidents visiblement très négligents sur l’hygiène et dont on ne tarde pas à faire connaissance. La famille Baker s’impose alors comme le nemesis de ce Resident Evil VII, malgré son côté presque attachant par moments.
Lâché dans cet immense manoir, qui n’est pas sans rappeler le manoir Spencer du premier opus, le joueur doit donc trouver la sortie afin de s’enfuir avec sa bien-aimée. Puisque le retour aux sources ne prend pas uniquement la forme d’une immense demeure à explorer, quelques énigmes viendront se dresser sur notre chemin. Jamais très compliquées, surtout lorsqu’on les compare à celles qui étaient présentes dans la dernière version de la démo Beginning Hour, elles seront surtout l’occasion d’effectuer de nombreux allers/retours entre les différentes pièces. Les plus consciencieux tâcheront d’ailleurs de fouiller de fond en comble les moindres recoins de cette demeure maudite dans le but de trouver un maximum de ressources, mais aussi de mettre la main sur toutes les pièces antiques permettant d’obtenir des bonus précieux.
On retrouve également le système d’items à combiner afin de créer des munitions ou remèdes. En effet, si les herbes ont conservé leurs vertus, leur utilité est moindre lorsqu’elles sont utilisées telles qu’elles. Il faudra alors les combiner avec des fluides chimiques pour obtenir des remèdes (normaux ou forts), autrement plus efficaces. Quoi qu’il en soit, il s’agit toujours de gérer son inventaire avec parcimonie. Tout d’abord pour une question de place, puisque l’on ne peut pas porter autant d’objets qu’on le souhaite, mais également parce que survival-horror oblige, les items de soin et autres munitions ne sont pas légion. Autant vous dire que tomber sur un bon paquet de munitions et de quoi panser nos blessures est souvent synonyme d’affrontement musclé.
Avec la vue à la première personne, le jeu se dote d’un aspect FPS plutôt bien pensé, malgré une visée pas toujours très précise. On ne sait pas vraiment si cela est voulu, puisque l’on joue après tout un personnage qui n’est pas censé être familier avec les armes à feu, mais cela a au moins le mérite de renforcer l’aspect fragile de notre héros. En apparence seulement néanmoins, car même en mode normal les boss ne nous ont jamais opposé une quelconque résistance, et le bestiaire se fait trop souvent feinter de la façon la plus enfantine qui soit. Notez d’ailleurs que les zombies ne sont plus de la partie dans Resident Evil VII et que les seules créatures que l’on croisera seront les mycomorphes déclinés en différents types. Le jeu parvient à les mettre sur notre chemin de façon parfois perfide et même si l’on parvient à détecter à quel moment ces monstres purulents apparaîtront, on ne peut s’empêcher de ressentir une certaine tension pour une raison que l’on ne saurait expliquer. La grande force de ce Resident Evil réside dans son ambiance oppressante avec sans cesse cette impression d’être épié. On en vient même à se retourner au moindre virage pris, tant les bruits environnants font monter le stress.
Marguerite wants to play
Malheureusement, là où le jeu aurait pu se transformer en un véritable cauchemar avec une famille sans cesse sur notre dos, tels des nemesis dont on ne se défait jamais vraiment, il perd légèrement de son charme en invoquant son bestiaire purulent, et en s’égarant légèrement dans sa dernière ligne droite. À vrai dire, les moments passés dans le manoir Baker sont les plus délicieux car une fois passée la découverte des lieux, on se demande à quel moment on va pouvoir tomber sur l’un des membres de cette famille dérangée. S’instaure une certaine angoisse et parfois même quelques (trop) courtes parties de cache-cache qui prendront une dimension autrement plus prenante en réalité virtuelle.
Resident Evil VII fait le pari risqué d’être le premier jeu PS4 à être intégralement jouable avec le PlayStation VR, et donc le jeu PS VR le plus ambitieux à ce jour. Le casque de Sony n’est nullement obligatoire pour jouer au titre de Capcom, mais la compatibilité est un atout de taille. Plus que jamais, le joueur n’est plus spectateur : Il assiste à ce cauchemar sans fin qui prend vie devant ses yeux et dont il doit se dépêtrer. Non seulement le PS VR offre un regard neuf sur l’horreur, mais il permet également de se mouvoir dans le décor d’une façon plus vraie que nature. Pencher la tête arrivé au bout d’un couloir afin de vérifier que ce bon vieux Jack ne nous attend pas pour repeindre sa pelle avec notre sang ou examiner avec attention l’environnement pour être sûr de ne pas passer à côté d’un objet à l’utilité non négligeable sont autant d’arguments qui rendent l’expérience encore plus intense. Les nombreux paramètres disponibles pour le mode VR attestent du sérieux avec lequel les développeurs ont pensé la chose, et ceux qui arriveront à se passer de la rotation de la caméra par à-coups risquent de s’offrir une virée en enfer dont ils se souviendront. Même les jumpscares les plus prévisibles deviennent efficaces au possible.
La progression et le scénario partagent un équilibre certain qui donne sans cesse envie d’avancer. C’est d’ailleurs assez paradoxal car le jeu arrive à casser cet espèce de sentiment de sécurité qui s’installe dès lors que l’on a fini d’explorer un endroit donné. De ce fait, on est partagé par la peur d’avancer et l’envie de découvrir ce que les scénaristes nous ont réservé. Jusqu’à la révélation finale qui lève le voile sur une bonne partie des questions soulevées. Quant au reste, il faudra malheureusement attendre l’arrivée de tous les DLC pour rassasier notre curiosité. Serait-ce le moyen pour Capcom de s’assurer des revenus au cas où les ventes ne seraient pas assez satisfaisantes ? Difficile à dire, néanmoins avec l’arrivée des premiers contenus téléchargeables une semaine après la sortie du jeu, on constate que l’éditeur nippon n’a pas perdu son temps, quitte à oblitérer la notion de respect envers les joueurs.
Pour autant, difficile de ne pas aimer Resident Evil VII. Au bout d’une dizaine d’heures de jeu, lorsqu’arrive l’écran des crédits et que l’heure du bilan vient, on en ressort plus que satisfait. D’une part car il a réussi à remettre la licence dans le droit chemin, même si tout n’est pas encore parfait. Son moteur graphique, le RE Engine, offre des effets de lumière vraiment réussis et un aspect cradingue omniprésent qui sauve quelques textures un peu limites, puisqu’au final dans le thème. On apprécie aussi de pouvoir choisir parmi de nombreux doublages. Les voix anglaises s’imposent comme le choix logique, mais la possibilité d’opter pour les doublages japonais ou allemand (ces derniers sont particulièrement flippants) offre une autre dimension aux dialogues et permet de varier les plaisirs. On regrette à ce titre que les voix français ne soient pas plus mémorables car un doublage de qualité aurait permis de se passer de sous-titres. Et même s’il s’avère être un peu chiche en termes de contenu et de rejouabilité, ce Resident Evil a préféré tout miser sur une expérience de jeu inoubliable et saisissante. Un pari réussi pour Capcom, qui rend ses lettres de noblesses à une licence chère au monde du jeu vidéo.
VERDICT
Resident Evil VII n’est peut-être pas exactement le jeu que les fans voulaient, mais il s’impose clairement comme l’un des meilleurs survival horror de ces dernières années. Il renoue avec les premiers opus tout en apportant un nouveau souffle à la licence par le biais de la vue à la première personne et de cette famille malsaine qui risque de hanter vos cauchemars, pour peu que vous arriviez à fermer l’œil après une session de jeu en réalité virtuelle. Si c’est d’ailleurs avec le PlayStation VR que son ambiance crade à souhait nous immerge le plus, il n’en reste pas moins effrayant et oppressant en son absence. Un véritable coup de maître qui nous ferait presque attendre les DLC avec hâte si cette façon de procéder n’était pas aussi abusive.
Test réalisé sur PS4 et PlayStation VR à partir d’une version éditeur
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