Annoncé l’année dernière peu avant l’E3 2018, Rage 2 est enfin disponible pour le meilleur et pour le pire. Bien que ce soit la suite d’un jeu sorti à la fin de la génération précédente, à part quelques lieux et références, ce nouvel opus tranche radicalement avec son ambiance bien plus déjantée. Prenez une pincette de Mad Max, un peu de DOOM, une petite dose de Bordelands ainsi qu’une sauce monde ouvert à la Just Cause et vous obtenez Rage 2. Sur le papier, ça donne envie mais qu’en est-il en vrai ? Après s’être longuement aventurés dans le Wasteland, on vous apporte la réponse.
Testé réalisé sur PlayStation 4 à l’aide d’une copie numérique fournie par l’éditeur
L’histoire, on s’en fout
Comme dit plus tôt, Rage 2 s’éloigne beaucoup de son aîné, à tel point qu’on se demande pourquoi Bethesda, éditeur du jeu, n’en a pas fait une licence inédite. Si le premier Rage se voulait plutôt sombre, celui-ci est totalement décalé. Petite mise au point : quelques dizaines d’années se sont écoulées et le monde post-apocalyptique de Rage 2 vit des jours heureux, pour peu qu’on se fasse à l’idée d’affronter au quotidien des maboules assoiffés de richesses et des mutants voulant davantage faire couler le sang. On en est pas si éloignés, quand on y pense bien. Cependant, un camp désire tout chambouler, à savoir l’Autorité. Dirigé par un méchant pas beau, le général Cross, cette petite armée remplie de mutants et d’humains plus ou moins modifiés désire régner sur le Wasteland. On incarne Walker, un homme ou une femme, au choix, qui assiste au massacre de son camp de soldats épris de justice. Une fois équipé(e) de l’armure du dernier Ranger, permettant d’obtenir des pouvoirs spéciaux, Walker va alors explorer le Wasteland afin de trouver des alliés, des armes, bref, tout faire pour contrer les plans du général Cross.
Si l’introduction de Rage 2 laisse penser que l’histoire est un minimum travaillé côté mise en scène, on se rend vite compte que ce n’était pas vraiment l’intention d’Avalanche Studios et d’id Software, les deux développeurs du soft. En effet, par la suite, on assiste surtout à des petits dialogues à peine filmés (voire pas du tout) des principaux alliés de Walker et des petites quêtes données par des PNJs pas très passionnants à écouter, prétextes à fournir diverses missions (même si ça résume surtout à casser des gueules et trouver des trucs). Même Walker semble rarement prendre la situation au sérieux, se permettant de faire des vannes tout au long de l’aventure. Il sort tout de même un petit « Il faudra plus qu’un pansement ! » alors que l’un de ses camarades se fait arracher la tête. Vous l’aurez compris, Rage 2 joue à fond sur le décalé, parfois avec mouche (notamment avec les noms absurdes des personnages), parfois avec lourdeur. Quel dommage qu’un tel univers ne soit pas davantage travaillé dans ces cinématiques, histoire de rendre le tout plus marquant. Si vous n’aimez pas les jeux délirants avec le scénario qui passe au second plan, Rage 2 risque fortement de vous déplaire mais si vous y adhérez ou supportez un minimum, alors la suite pourra peut-être vous plaire, et pas qu’un peu.
Mad DOOM
Du coup, si l’histoire est aussi secondaire dans Rage 2, on y fait quoi ? Eh bien on explore un monde ouvert ni trop grand, ni trop petit via divers véhicules et on tire à tout-va. Signées id Software (DOOM, entre autres), les phases FPS de Rage 2 sont un pur régal. Les contrôles sont simples et les sensations de tir sont tout simplement grisantes, grâce aux diverses armes (pistolet, lance-roquettes, wingstick qui est une sorte de boomerang fort lacéré, etc.) et pouvoirs (grands sauts pouvant se finir avec un écrasement au sol, barrière, etc.) offrant une panoplie d’options très plaisantes. Mention spéciale au fusil à pompe, digne du dernier DOOM, on adore démembrer les différents ennemis avec. En parlant d’ennemis, on aurait aimé un peu plus de variété, surtout du côté des boss, souvent le même gros mutant qui a droit à différentes apparences, un poil dommage. Cela dit, tous les adversaires restent plaisants à affronter et ils ont tous leurs petits trucs rendant les combats vraiment plaisants. Entre les Cramés qui utilisent différentes armes de base, les mutants qui misent sur le corps-à-corps vicelard, des espèces de ninjas du désert se battant au sabre et pouvant devenir invisibles… Walker a du boulot ! C’est de loin la partie la plus fun… et étrangement la moins présente du jeu, à cause de la formule monde ouvert du jeu.
Pour le reste, c’est surtout Avalanche Software – Mad Max, Just Cause, etc. – qui a planché et ça se ressent, en bien comme en mal. Ainsi, on passe notre temps à se balader de lieux en lieux via divers véhicules plus ou moins sympathiques à piloter. Les bolides offrent de bonnes sensations de conduite mais parfois, le terrain du jeu n’est pas idéal pour conduire sur la terre ferme, notamment dans les zones du début où une chute mortelle peut vite arriver. Lorsqu’on a accès à Icare, véhicule volant, le Wasteland se parcoure à une vitesse folle via les airs mais si vous en avez marre de vous balader, il est bien entendu possible de faire des voyages rapides. Pour ce qui est du plaisir de parcourir le Wasteland, eh bien, il faut impérativement adhérer au monde post-apocalyptique et ses nombreuses zones désertiques. Parfois, c’est fun, avec des petits secrets à découvrir et une conduite des plus agréables, motivant à explorer de fond en comble le Wasteland, surtout si cela permet au passage de dégommer du vilain. Parfois, c’est tout de même redondant, surtout que le jeu manque cruellement de vie en dehors des zones où il faut accomplir des choses et on a vu ces derniers temps des jeux éviter ce genre de soucis, notamment Red Dead Redemption 2 avec ses nombreux événements aléatoires bien écrits et divertissants.
De plus, la diversité des missions et des choses à accomplir, ce n’est vraiment pas ça, puisqu’on passe principalement son temps à décimer de nombreuses bases ennemies (pas très remplies d’ailleurs : on les plie facilement en moins de deux minutes) et collecter divers items. On peut tout de même effectuer quelques courses véloces, participer à un cruel jeu télévisé où l’on doit tuer tout le monde, se débarrasser de convois – comme dans Mad Max – et de sentinelles, retrouver d’anciens Rangers et des arches conférant armes ainsi que pouvoirs spéciaux, marchander dans les villes… Hélas, cela devient assez vite répétitif car bien souvent, ce n’est que la difficulté qui change et il y a une absence d’écriture digne de ce nom, grand défaut des jeux d’Avalanche Software. Le monde ouvert aurait gagné à être plus petit et davantage travaillé. Heureusement, le gameplay reste assez fun pour que l’on fasse fi des défauts, notamment grâce à la montée en puissance de Walker via les forts nombreuses améliorations à effectuer. En effet, le véhicule principal, les armes et pouvoirs peuvent être amplifiés afin de terrasser avec plus de puissance et de classe les nombreux ennemis se dressant sur votre chemin. Pour ce qui est de la durée de vie, en fonçant dans le scénario, on peut facilement plier le jeu en huit ou neuf heures mais il vaut mieux y aller en douceur afin de profiter du reste et d’être le mieux préparé pour le combat final, même si Walker devient rapidement une véritable machine de guerre à lui tout seul (le jeu est un poil trop facile en normal, privilégiez les plus hautes difficultés).
Oh la belle rose
Si vous avez regardé quelques bandes-annonces de Rage 2, vous aurez vite remarqué que le jeu se veut coloré, bien plus que son prédécesseur. Pour cette suite, Avalanche Studios et id Software ont opté pour une direction artistique « sous acide » avec des personnages totalement plongés dans un univers post-apocalyptique cyberpunk rempli de fumées, peintures, tags et néons de toutes les couleurs (mais surtout rose). Le résultat fait souvent plaisir à voir, notamment avec les modélisations et effets de lumière de qualité, physique crédible, gore satisfaisant, cycle jour-nuit crédible et panoramas fort jolis… mais c’est imparfait. Parfois, le jeu affiche des textures quelque peu grossières et le rendu des couleurs n’est pas toujours optimal, notamment dans certains intérieurs (une certaine mission dans les égouts est tout simplement affreuse vu le manque de lumière). On regrette également l’absence d’éléments météorologiques, ainsi, vous ne verrez aucune goutte de pluie, tempête de sable, etc. Aussi, il y a quelques petits soucis techniques comme un menu qui rame de manière incompréhensible, pas mal de pop-in et des petits bugs ici et là. Enfin, on a testé le jeu sur la première PlayStation 4 et on a eu droit qu’à 30 images par seconde, avec un résultat fluide la plupart du temps. Pas trop gênant mais si vous pouvez y jouer sur PC ou sur les consoles de salon les plus puissantes, n’hésitez pas, afin de profiter de 60 images par seconde. Malgré tout, Rage 2 propose un monde atypique coloré assez diversifié (il n’y a pas que du sable et des ruines) et tout à fait honorable du point de vue visuel, oscillant entre le passable, le joli et même le sublime par moment. De plus, un mode photo est de la partie, afin d’en profiter au maximum (bonus : on peut changer et garder l’heure qu’on veut).
Enfin, si les musiques ne marqueront sans doute pas les esprits, elles savent plonger dans l’ambiance quand il faut mais la plupart du temps, on entend pas grand chose, la musique se déclenchant surtout lors des combats avec des sons rappelant fortement DOOM. Une petite radio n’aurait pas été de refus, surtout que l’on passe beaucoup de temps à se balader en voiture ou autre. Les bruitages, eux, sont réussis et ont de quoi faire satisfaire les oreilles lors des passages les plus explosifs. Du côté des voix françaises, on sent que les acteurs se sont bien amusés dans leurs rôles, pas grand chose à redire de ce côté. Mention spéciale à la présence de codes de triches spéciaux permettant d’avoir des commentaires – qu’en anglais, hélas – délirants, notamment ceux du gaillard derrière le légendaire « Boomshakala! » de NBA Jam. Oui, oui, il est dans le jeu. C’est ce genre de petits détails qui font que Rage 2 arrive à s’en sortir malgré tout, sans oublier ses phases FPS explosives qui l’empêchent d’être un simple jeu avec un monde ouvert oubliable comme tant d’autres. Il était à ça près de ne pas réussir.
Verdict : 7/10
Avec un peu plus de finition, davantage de mise en scène et moins de répétitivité, Rage 2 aurait vraiment pu être un grand jeu. Hélas, ses défauts sont difficiles à ignorer et souvent, ils gâchent un peu trop la fête. Malgré tout, le fun est bel et bien présent grâce à un gameplay aussi bourrin que bon et une ambiance savoureuse, pour peu que l’on y adhère. Si vous aimez les jeux bac-à-sable, le post-apocalyptique rigolo et que vous voulez surtout tout exploser sur votre passage, alors Rage 2 a de quoi vous plaire. Quant aux autres, la formule monde ouvert fortement classique risque de rebuter, méfiance.
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