Port Royale, c’est avant tout des bateaux qui voguent sur une mer turquoise, avec les Caraïbes comme terrain de jeu, la France, l’Espagne, l’Angleterre et les Pays-Bas en protagonistes. On est en 1570, une époque charnière où nos belligérants du vieux monde se tirent la bourre pour quelques colonies. De notre côté, on incarne un personnage qui cherche à faire fortune dans ce capharnaüm au cadre idyllique. Dès lors, oui, les colonies passeront de mains en mains dans un monde persistant, les alliances se feront et se déferont à la guise de ceux qui sont capillairement intouchables. Et nous ? Eh bien on fait sa popote gestion au milieu de tout ça. Car Kalypso ne se détourne pas de son cœur de gameplay, à savoir le commerce, le développement et la piraterie. Un menu complet qui ruisselle toujours d’autant de bonnes idées.
Test réalisé sur PC grâce à une copie numérique envoyée par l’éditeur
« Bonjour, avez quelques minutes à accorder à notre seigneur Marchandise ? »
Les Caraïbes étaient la destination phare des boomers, mais à l’époque où les cheveux longs étaient à la mode voire prestigieux, c’était un carrefour commercial de tous les dangers. Port Royale reprend cela en proposant cette zone géographique sur une carte unique, où chaque colonie consomme et génère des ressources en temps réel. Bien sûr si les besoins basiques sont identiques d’une ville à l’autre, elles ne peuvent pas toutes produire les mêmes ressources. C’est ici qu’on intervient. Grâce au commerce, on comble des désirs pour aider les cités à prospérer, tout en s’enrichissant. On passera une majorité de son temps à créer des routes commerciales optimisées de la cale pour cumuler l’Or jusqu’au nid-de-pie, mais aussi pour améliorer ses relations avec les villes. Car si on doit d’abord acheter une licence pour négocier dans l’agglomération souhaitée, à force de transferts il sera possible d’y faire l’acquisition d’un permis de construire afin d’y installer ses entreprises. Des fermes aux industries, celles-ci ont le même effet : booster l’économie locale et générale. Mais ça, c’est dans un monde parfait.
Car si aux Caraïbes la mer est douce, l’économie est mouvementée. Les pirates, la guerre ou des facteurs simples comme une production insuffisante feront qu’elle fluctuera constamment. Toutes les ressources produites sont envoyées puis utilisées ou stockées, donc la pénurie comme la surabondance sont possibles. L’économie de Port Royale 4 n’est pas magique : un conflit bloque l’apport dans certaines villes voire le capture, les pirates pillent des ressources d’un pays pour un autre, etc. Tout ça pour dire que oui, la règle de l’offre et la demande est ici parfaitement représentée, ce qui fera frémir de plaisir les économistes numériques. Cependant on est en droit de se poser une question : pourquoi amasser de l’Or si ce n’est que pour faire vivre une économie fictive ?
Réponse : asseoir la puissance de votre nation. En début de partie, on doit adopter un personnage avec des bonus, comme le marchand qui n’a pas besoin de payer pour commercer mais qui a besoin de plus de renommée pour acheter des navires de guerre. Puis une nation qui jouit aussi de bonus uniques : construction plus rapide, chantiers navals travaillant plus rapidement, etc. Pour enfin choisir une ville de départ. Une fois le pays sélectionné, on joue en son nom et le fait d’accroître notre puissance financière fait que dans notre sillage l’économie de celui-ci grimpera. Plus on contribue au développement des villes, plus il y a d’habitants, d’industries, de navires, plus l’exportation devient florissante et les frontières protégées. C’est toute l’idée du jeu, même si on doit reconnaître une certaine frustration à ne pas pouvoir gérer sa nation. À noter qu’il est possible à terme de « gouverner » une ou plusieurs cités. Enfin, le commerce n’est pas le seul moyen d’aider la nation car si votre projet est de mettre des bâtons dans les roues de vos rivaux, c’est faisable avec la piraterie.
On l’a dit, tout est en temps réel. Les vaisseaux qui vont d’un port à l’autre sont pleins à craquer de biens, ce qui attire les convoitises. Pourquoi s’ennuyer à produire quand on peut se servir ? De plus, il n’y a rien de plus simple : il suffit de repérer une route de commerce puis de s’attaquer aux navires désirés. Cela entraînera une perte de reconnaissance du vice-roi de la nation en question, mais c’est toujours ça de gagné pour la vôtre. Enfin, Port Royale 4 dévoile à ce moment-là une véritable nouveauté : un système de combat au tour par tour. Bien que très classique, ce dernier recèle de bonnes surprises comme les tactiques ou l’orientation du bateau. Chaque vaisseau dispose d’un certain nombre de points de déplacement, d’un tir par bord ainsi que d’un accès à des tactiques. Une fois cela épuisé, c’est à l’ennemi de jouer. Les batailles prennent une tournure stratégique grâce aux tirs de bord (bâbord/tribord), en obligeant le joueur à chercher toujours un moyen d’utiliser ces deux coups plutôt que l’un. Dans la même veine, les bateaux bénéficient d’une barre de vie et d’un nombre de timoniers : si une attaque basique réduit la longévité et aussi les occupants de la cible, il est également possible de l’aborder. Bien sûr détruire ou aborder un vaisseau n’a pas le pareil effet. Si le premier fait couler toute la cargaison, le second permet de s’en emparer tout en mettant hors combat celui-ci. Enfin les tactiques sont équivalentes à des pouvoirs spéciaux, inhérents au capitaine. Celui-ci peut pousser un navire, enflammer une case et bien d’autres. D’une manière générale les affrontements rompent avec la monotonie commerciale. De plus, l’IA peut se montrer retors pendant cette phase.
Simple et efficace.
Côté réalisation, Kalypso Média utilise de nouveau son moteur maison pour faire tourner ce Port Royale 4. Sans forcément être une démonstration technique, le soft s’en tire sans trop de mal graphiquement grâce à deux points : la couleur et ses détails. La première chose qui se fait remarquer sont les couleurs, vives et nuancées. Les Caraïbes font rêver et donnent envie d’y piquer une tête. De plus, la valeur de zoom est élevée et permet d’afficher nombre de détails : fumée des maisons, habitants et travailleurs pour les villes, bancs de poissons, marins et sillages côté maritime, etc. Ce tout est malheureusement déprécié par des animations qui viennent flouter l’ensemble, un effet particulier qui n’est peut-être qu’un bug regrettable mais qui a gêné notre expérience. Enfin, un mot sur le mixage sonore qui réussit à faire les transitions de zoom de manière discrète. Si la ville est en premier plan, un fond de bruits urbains se mettra en avant. À l’inverse, la musique reprendra le dessus si on a le recul maximal sur la carte.
Pas de multijoueur et seulement deux modes de jeu. En conclusion hâtive, on pourrait affirmer que Port Royale 4 se plie en quelques heures, ce qui ne serait pas faux. Mais force est de constater qu’à l’inverse, l’expérience peut se montrer conséquente. D’abord les quatre campagnes ont fourni un certain défi, chacune des nations arborant des aspects différents du jeu sur lesquelles on a passé une quinzaine d’heures. Le contenu le plus conséquent reste le mode partie libre qui permet de vraiment profiter de l’expérience et de s’accorder à toutes les folies. En l’état, une bonne vingtaine d’heures est à compter pour faire le tour, plus si vous accrochez. Par ailleurs, si vous êtes un acharné du troisième opus, celui-ci apporte son lot de nouveaux bâtiments, de nouvelles ressources (qui sont portées à une soixantaine) et pas moins de seize nouveaux vaisseaux historiques. De quoi retrouver l’envie de découvrir cette série !
Deux types de navires, transport et militaire, de plus il est possible de les regrouper pour protéger ces premiers des pirates.
Verdict : 7/10
La série Port Royale fait un retour remarqué avec ce quatrième opus. Tout en gardant le charme de l’opus précédent, il réussit à se moderniser grâce à une interface plus digeste et une carte monde enfin entièrement disponible sans temps de chargement. Il propose également une gestion plus profonde des flottes, de la renommée et du management des villes. Les combats brouillons du précédent sont remplacés par du tour par tour plus stratégique. Dans l’ensemble on peut le dire, c’est Port Royale 3 en mieux, beaucoup mieux même. On regrettera seulement un petit regard graphique ainsi que quelques bugs (comme les bateaux qui ne déchargent pas toujours toutes les cargaisons) relativement mineurs. Hors cela et en l’état, vous pouvez foncer. Le soft de Kalypso est une réussite.
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