Le premier Nioh a mis du temps à sortir : tout d’abord annoncé sur PlayStation 3, il a fallu attendre la PlayStation 4 et l’année 2017 afin que l’aventure de William Adams marque les joueurs en recherche d’expériences douloureuses mais enrichissantes. Ressemblant beaucoup aux Dark Souls de Bandai Namco et From Software, le jeu de Tecmo Koei et Team Ninja a su apporter sa petite touche à l’édifice afin de devenir l’un des modèles du genre et un beau succès. En ce début 2020, Nioh revient avec une suite baptisée sobrement Nioh 2 et qui change un peu la donne. Cette fois, pas de personnage prédéfini : on crée son propre héros, qui a des aptitudes plus spéciales que William, afin de s’aventurer dans un Japon fantastique plus dangereux que jamais. Aimant le risque et la décapitation de démons, on a voyagé et souffert durant de nombreuses heures. Il est temps désormais de vous raconter nos péripéties.
Test réalisé sur PlayStation 4 grâce à une version numérique fournie par l’éditeur
Désormais, c’est mon histoire
Contrairement à Nioh premier du nom, Nioh 2 nous met dans la peau d’un personnage bien spécial : nous-mêmes. Après une introduction où l’on se pose bon nombre de questions quant à la nature et au destin de nos parents, on assiste à un saut dans le temps afin de créer un héros de toutes pièces. Assez profond, le créateur de personnages devrait vous permettre de créer le samouraï de vos rêves afin de vous sentir le plus immergé possible dans un univers sombre et impitoyable. Une fois cela fait, on découvre notre personnage en exil mais suite à un certain événement, il décide de sortir de sa cachette. On rencontre alors bon nombre de personnalités du Japon des années 1500 à la sauce Team Ninja tout en affrontant des démons ainsi que des humains qui ne sont pas vraiment très gentils avec nous.
Les événements de Nioh 2 prennent place avant ceux du premier opus et on a toujours affaire à un savant mélange de folklore japonais avec des faits historiques plus ou moins remaniés. La particularité de cette suite, c’est bien sûr de suivre une aventure avec notre propre personnage, et ce dernier a des motivations ainsi que des rencontres différentes de William. Les Yokai sont plus présents que jamais, surtout que le héros principal en est un descendant, ce qui fait qu’il a des pouvoirs spéciaux et une origine particulière. Si les cinématiques de Nioh 2 sont toujours un plaisir à découvrir et que l’histoire reste facile à suivre, elle est tout de même un peu décousue à cause du principe de missions et de zones séparées, certaines optionnelles n’étant pas forcément importantes et intéressantes au niveau du récit. De plus, comme bien souvent avec les jeux où l’on crée le personnage principal, il est muet, ce qui fait que certaines scènes paraissent un peu étranges, le héros ne disant rien même si on lui adresse la parole. Au moins, les scénaristes en jouent par moments. Malgré tout, cela reste un petit point faible car au final, on a tout de même envie de découvrir le fin mot de l’histoire et la mise en scène est charmante. Aussi, ce n’est pas vraiment ce qui compte dans le jeu.
I’m already a demon
On prend les mêmes et on recommence. Dans la forme, le gameplay de Nioh 2 est le même que celui de Nioh, autant dans la manière de jouer que dans les choses à faire. Ainsi, on explore à nouveau de nombreux niveaux séparés remplis d’embûches, de raccourcis à découvrir et surtout d’ennemis à décimer. Au niveau de l’exploration, le principe reste identique avec des pièges plus ou moins vicieux placés ici et là, des passages secrets menant à des coffres remplis de trésors, des raccourcis à découvrir afin d’éviter de trop longs voyages jusqu’à un autel, des esprits à trouver, des objets à collecter tout en survivant face à des hordes d’ennemis… Ceux qui ont fait le premier jeu ne seront clairement pas dépaysés à ce niveau, ce qui peut limite donner une forte impression de déjà-vu. C’est l’une des reproches que l’on peut adresser au jeu, un certain manque de surprises. Heureusement, même si on reste dans un Japon ancien, les niveaux sont variés et le level design est fortement appréciable, en dehors de quelques exceptions. Les missions optionnelles notamment présentent des niveaux un peu trop basiques et rapides à parcourir, de quoi au moins mieux se préparer pour les quêtes principales qui ne laissent que peu de répit au joueur. Notons tout de même que l’on rencontre désormais des zones maudites par les Yokai où ces derniers sont plus forts, donnant davantage de fil à retordre dans ce qui suit.
Ce qui fait la force de Nioh 2 et de son aîné, c’est bien entendu les combats, meilleurs que jamais. La particularité de la licence, c’est de mélanger de l’action au corps-à-corps avec différentes armes blanches (katana, grand sabre, hache, lance…) avec un principe de stamina-ki et des positions qui ont leur importance. Cela se joue plus ou moins comme un Dark Souls mais en étant un peu plus orienté « action », Team Ninja oblige (Ninja Gaiden, cela vous dit quelque chose ?). Les positions, forces de la licence, font leur retour et sont toujours aussi importantes : ainsi, on peut placer son arme en hauteur, vers le milieu et le bas. En hauteur, on porte des coups plus lents et puissants, au milieu, c’est davantage équilibré et avec les armes dirigées vers le bas, on est plus rapide mais aussi moins forts. Aucune position n’est plus recommandée que les autres, c’est à vous de choisir celle qui vous convient selon vos préférences ou les situations auxquelles vous faites face. Cette mécanique n’a pas été repensée plus que cela mais elle était déjà très bonne dans le premier jeu et elle l’est tout autant dans Nioh 2, apportant dynamisme et tactiques aux joutes. Il ne faut pas simplement frapper et esquiver, il faut également faire attention à cela, à l’endurance et, l’un des autres attraits de la licence, ne pas hésiter à faire des impulsions de ki avant de retrouver davantage d’endurance et éliminer des petits espaces créés par les Yokai qui ralentissent vos mouvements. Cette mécanique qui a elle aussi fait le sel de Nioh est toujours d’actualité dans cette suite : ne pas l’utiliser c’est la mort assurée, surtout contre les dangereux Yokai, ennemis principaux du jeu, plus variés que jamais (même s’il y en a bien quelques qui reviennent). Ces derniers sont toujours aussi fascinants à combattre tant ils ont des comportements et attaques différentes, quant aux ennemis humains, ils ne sont pas toujours en reste, croyez-nous. Les boss comme les ennemis principaux mettront vos nerfs à rude épreuve, les coups faisant fortement mal. Gagner de l’expérience (qu’on peut toujours retrouver une fois à notre « tombe » si l’on succombe) et augmenter de niveau ne sera pas de refus, certains boss ayant de quoi faire s’arracher les cheveux. Même si la difficulté est plutôt bien dosée et que vous pouvez vite apprendre de vos erreurs, il y a tout de même certains passages plus injustes que d’autres avec des Yokai qui n’hésiteront pas à vous mettre en pièces en moins d’une minute avec des attaques un peu exagérées, difficiles voire impossibles à esquiver. Bien sûr, c’est ce qui fait aussi le charme de l’aventure, suer et venir à bout d’un grand Yokai, comprendre les manières de chaque ennemi pour ne plus trop s’en inquiéter par la suite procure toujours une immense joie. Mais on sent tout de même que certains mériteraient un petit correctif.
En parlant de Yokai, principale nouveauté de Nioh 2 : on peut soi-même devenir un Yokai durant un temps imparti. Le héros ayant une mère Yokai, il peut donc lui aussi en devenir un temporairement. Il y a donc une jauge inédite à cet effet, vous permettant d’utiliser rapidement un pouvoir en particulier. En effet, en affrontant plusieurs fois certains démons, on peut acquérir leurs âmes et prendre leurs formes pour une attaque. Par exemple, au début du jeu, on débloque assez rapidement le pouvoir d’un grand Yokai en forme de singe équipé d’une lance. Grâce à cela, on peut prendre sa forme, se propulser dans les airs et lancer sa lance vers un ennemi afin de lui causer pas mal de dégâts. Chaque transformation possède ses subtilités et avantages, à vous de déterminer laquelle vous sied davantage. En outre, le héros peut également accéder à sa propre forme de Yokai sous deux conditions. La première en utilisant la jauge citée précédemment, permettant une esquive plus efficace que celle plus classique et qui peut sauver de nombreuses situations délicates. La seconde, bien plus intéressante, vous transforme en démon durant plusieurs secondes, donnant accès à une attaque et une vélocité bien plus redoutables. Aussi, si l’on se fait toucher, on ne subit pas de dommages mais on reste alors un Yokai moins longtemps. Ces nouvelles mécaniques ajoutent davantage d’intérêt et de fun aux joutes, les rendant encore plus spectaculaires et sanglantes.
Parfois, il y a même un peu trop d’action et de choses à l’écran, ce qui fait qu’on a du mal à suivre. Sans parler que la caméra n’est pas toujours optimale dans les espace clos, rendant certains combats de boss plus tendus que d’autres mais pas de la bonne manière. Le loot est toujours présent et comme dans le premier jeu, il est quelque peu exagéré. Vous allez en ramasser, des armes et des armures ! Bien que récolter de l’équipement surpuissant procure son petit effet, on aurait aimé un système un peu plus remanié afin de donner davantage d’impact à certaines trouvailles. Enfin, au niveau des fonctionnalités en ligne, on peut encore une fois invoquer un autre joueur si on a vraiment besoin d’aide, même si cela augmente, bien évidemment, un peu la difficulté. La nouveauté de cette suite à ce niveau, c’est de pouvoir invoquer deux personnes maximum et non plus qu’une seule. Aussi, on peut soit invoquer des fantômes d’autres joueurs pour un petit coup de pouce ou en affronter afin de récupérer une partie de leur équipement, de quoi aider davantage dans une aventure qui se veut aussi longue (tout dépend de chaque joueur et de ses capacités mais vous aurez de quoi y passer plusieurs dizaines d’heures à coup sûr) que passionnante à suivre. Même s’il ne réinvente rien, la formule est davantage travaillée et procure toujours autant de plaisir… que de malheur, jusqu’à trouver le chemin de la victoire.
Un Japon fantastique mais pas toujours magnifique
Lorsqu’on lance Nioh 2, nous avons le choix entre différents modes pour que l’on puisse privilégier soit la fluidité, soit la résolution et l’aspect graphique. Naturellement, nous avons choisi le mode Action afin d’avoir 60 images par seconde pour affronter les Yokai dans les meilleures conditions. De ce côté, pas grand chose à redire, cela reste fluide en toutes circonstances, de quoi garantir de l’action frénétique. Cela dit, cela va au détriment du reste : Nioh n’était pas un monstre technique et il en est de même pour Nioh 2. Si les modélisations et effets spéciaux sont plutôt acceptables, du côté des textures, des ombres et du rendu des couleurs, on a souvent du mal à croire que l’on a affaire à un jeu de 2020, surtout que la résolution n’est pas idéale en mode Action. Cela gâche un peu l’émerveillement car pour ce qui est de la direction artistique, la Team Ninja nous livre de beaux tableaux. Forêts semblant tout droit sortir d’un conte, temples japonais respectant l’architecture d’antan, anciennes forges envahies par les flammes, villages entourés de cerisiers, etc. Le tout servi avec des monstres sortant tout droit des pires cauchemars, des personnages charismatiques et du sang qui coule à flot. Nioh 2 n’est clairement pas un jeu à mettre entre toutes les mains tant l’hémoglobine est omniprésente et les démembrements aussi nombreux que vos possibles morts à chaque partie. Il est dommage tout de même que les graphismes n’aient guère évolué depuis le premier épisode tout comme l’interface, participant à la sensation de jouer davantage à une grosse extension qu’une suite. La variété des niveaux compense et certains lieux s’en sortent tout de même mieux que d’autres. Les cinématiques, elles, restent belles en général.
Côté bande son, pas grand chose à redire en dehors du héros muet durant les cinématiques, avec des musiques efficaces intervenant au bon moment et une ambiance sonore sachant nous faire plonger dans l’expérience. Lors de l’exploration et des petits combats, on n’entend souvent que l’environnement et les autres personnages, ce qui fait monter le stress petit à petit et plus la tension monte, plus la musique s’affole, jusqu’à devenir épique durant les combats de boss. Si aucun thème ne restera vraiment dans les mémoires, ils ont de quoi chauffer votre âme de guerrier(re) dans les plus terribles moments et c’est tout ce que l’on demande. Les doubleurs japonais s’en sortent aussi fortement bien, souvent comme d’habitude et les bruitages des Yokai sont particulièrement réussis, avec des cris qui ont de quoi glacer le sang. Tout cela ne rend l’expérience que plus mémorable, si toutefois vous arrivez à finir le jeu sans casser votre télévision à cause d’un malheureux jet de manette suite à un boss qui vous a défait à deux coups de la victoire (cela ne nous concerne pas, bien entendu).
Verdict : 8/10
Nioh 2 est donc une suite de très bonne qualité. Même si on peut lui reprocher quelques similitudes un peu prononcées par rapport à son aîné (mais peu de suites réussissent à y échapper avec brio), on prend toujours autant, si ce n’est plus, de plaisir à s’aventurer dans un Japon fantastique et violent rempli de dangers. Le nouveau jeu de la Team Ninja est brutal et engageant du début jusqu’à la fin malgré quelques aléas ici et là, mais extrêmement mineurs par rapport aux nombreuses qualités du titre. Si vous avez aimé le premier épisode, cette suite ne pourra que vous ravir. Quant aux autres joueurs, ils peuvent tout à fait commencer par ce dernier sans aucun souci. Dans tous les cas, plaisir (et souffrance) garanti(s), sans l’ombre d’un doute.
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