Qui n’a jamais rêvé d’être un narcotrafiquant de renom ? Imaginé d’avoir le faste de la vie Joaquin Guzmán ? D’être aussi influent et craint qu’un Pablo Escobar ? Nous avons tous fantasmé à un moment ce genre de vie, aussi dangereuse que rapide et où nous serions au-dessus de tout. Mais la vie fait bien les choses car si l’industrie du cinéma peut l’imager et la littérature seulement l’écrire, le jeu vidéo va quant à lui pouvoir vous permettre de le vivre. Numériquement, mais le vivre malgré tout. Car c’est ce que propose Narcos: Rise of the Cartels, un jeu au tour par tour qui va faire revivre l’épopée de Pablo Escobar, du côté des forces de l’ordre ou du Cartel de Medellín. Séduisant hein ? Ne te projette pas trop vite l’ami, dans la mesure où pour faire un bon jeu il ne suffit pas de s’appuyer sur des rêves et un personnage iconique, non, il en faut un peu plus.
Test réalisé sur PC grâce à une copie numérique envoyée via une mule par l’éditeur
Syntaxe parodique pour effet soporifique
Narcos: Rise of the Cartels propose donc de suivre la série Netflix, du nom de Narcos, qui s’intéresse à la montée en puissance du baron de la drogue Pablo Escobar. Si la série alterne à la fois la traque de la police avec les conflits internes au sein du Cartel de Medellín et de ses rivaux, le jeu, lui, opte pour une progression d’un point de vue ou de l’autre. Ainsi, vous pourrez choisir de suivre l’histoire du côté de Pablo ou de la DEA. Autant prévenir, si de nombreux studios auraient utilisé ce contexte pour approfondir l’histoire à sa base ou même les personnages, le studio en charge du développement a quant à lui préféré suivre naïvement l’histoire, quitte à pratiquer le jeu du téléphone arabe avec ses joueurs. Un constat qui alarme dès les premières minutes de jeu, singulièrement si vous commencez du côté narcos. Votre première mission sera d’aider le Cancrelat à obtenir plus de laboratoires afin d’augmenter la production de cocaïne. La seconde sera de tuer le Cancrelat car il vous a trahi. La raison ? « Il pense que si vous êtes arrivé là (Pablo Escobar), c’est grâce à lui ». Là où la série prend le temps de développer, le jeu fait des raccourcis dérangeant à la fois pour la compréhension mais aussi pour le développement de la trame narrative. De plus, le jeu a la fâcheuse tendance de s’adresser directement au joueur, sans prévenir, au milieu d’un dialogue entre deux personnages. De fait, il faut donc rester attentif, surtout que le jeu en vaut la chandelle. Effectivement, quand le soft s’adresse à nous, il n’y va pas de main morte et avec autant de respect qu’un ado, il vous surnommera, amicalement, votre « gros », ou vantera vos « cojones » en les comparant à celles d’un taureau. Alors peut-être sexiste pour certains, flatteur pour d’autres, n’empêchera que vous aurez survécu à un « champ de bataille de DINGUE » pour avoir le droit de lire cela.
Le globiboulga de Tony
Si le soft emprunte beaucoup pour son gameplay à la série X-Com, il n’en est pas moins unique sur certains points. Le jeu se déroule en deux phases, la War Room et les missions. Narcos: Rise of the Cartels est un jeu de stratégie au tour par tour où le joueur dispose de plusieurs unités. L’idée est simple, à tour de rôle le joueur et l’IA devront déplacer une unité, la faire tirer et/ou utiliser une compétence. Un mécanisme qui a déjà fait ses preuves mais qui se voit agrémenter par le soft de plusieurs subtilités. Dans un premier temps, Narcos vous mettra aux commandes à des instants clefs d’un personnage. S’il n’est pas possible de le bouger, vous devrez au moins viser juste pendant un court instant afin d’infliger un maximum de dégâts à l’unité ciblée. Dans un second temps, plus vous utiliserez un personnage pendant une mission, plus il gagnera en surveillance et plus vous serez susceptible de tirer sur un adversaire pendant sa phase de déplacement. Ces deux nouveautés dynamisent le genre, parfois soporifique chez les concurrents, du tour par tour sans le dénaturer pour autant. En l’état ça fonctionne, même si quelques petites imperfections sont à signaler comme le fait que dans certains cas le moment est ridiculement concis ou qu’il est parfois impossible de toucher la cible car elle est cachée derrière des objets. La War Room est le côté gestion du soft où vous pourrez établir vos équipes, recruter des personnages ou les faire monter en niveau. Pour composer votre groupe, vous pourrez compter sur 5 classes de personnage qui sont identiques d’une faction à l’autre. Du policier à l’agent des forces spéciales, au grenadier en passant par l’agent de la DEA, elles sont assez éloignées les unes des autres dans leur mécanisme tout en étant complémentaires. Enfin, les personnages que vous enrôlez et que vous prenez avec vous en mission sont susceptibles de mourir. Si cela arrive, l’unité est perdue pour toujours. Mais à l’inverse, si vous la faites survivre, elle pourra monter en niveau et débloquer de nouvelles compétences. En plus de gagner de l’expérience après chaque mission, vous gagnerez également de l’argent pour recruter de nouveaux agents et de l’expérience de groupe que vous pouvez distribuer aux unités de votre choix.
Inclure une mort permanente dans le genre n’est pas rare mais il doit s’accompagner de quelques épices pour véritablement prendre saveur. Le fait de ne pas pouvoir modifier ses personnages rend l’entière évolution du jeu sans réel charme. Sans figure fétiche ou détestée, juste avec des prénoms à consonance hispanique, on enchaîne les pertes sans jamais les regretter. Pour renforcer cet effet, l’expérience de groupe est distribuée à la pelle et peut être répartie aux nouveaux agents fraîchement recrutés, faisant qu’une perte de haut niveau peut être remplacée immédiatement à l’exactitude. Du côté des missions, une redondance se fait sentir après quelques heures. Malgré le fait qu’il y ait plusieurs maps ainsi que divers types d’objectifs (recherche et destruction, otage à sauver, papier à ramasser), nous faisons rapidement le tour du propriétaire et l’ennui pointe vite le bout de son nez. De plus, pour progresser il est impératif de faire deux à quatre missions secondaires avant de pouvoir en débloquer une principale. Bien entendu, les secondaires n’ont aucun rapport avec la principale et semblent être générées de façon aléatoire. Ces choix donnent l’impression d’enchaîner les objectifs, les sauvetages ou autres sans but ou récompense véritable, ce qui aurait pu être simplement évité en mettant en corrélation les différentes missions.
Les gros bonhommes de Sosa
Du côté de la réalisation graphique, vous l’aurez remarqué, cela a plus des faux-airs d’un plagiat mobile que d’un jeu digne de ce nom. Narcos: Rise of the Cartels est hors du temps, encore figé à une époque où être capable d’exploiter les effets lumineux de l’Unreal Engine 4 pouvait donner un cachet et où la peau pouvait être aussi lisse que de la pâte à modeler. Pourtant tout n’est pas à jeter. Les niveaux ne sont pas vilains d’un point de vue esthétique, au contraire, et il y a une certaine cohérence des couleurs et des niveaux de lumière qui agrémentent le tout. Du côté des pistes sonores, vous y retrouverez les voix des acteurs originaux avec quelques lignes de dialogue ainsi que des musiques originelles de la série. Mais comme à son habitude, le soft fait les choses à moitié. Alors oui, vous avez les voix mais pas pendant les missions (ou très rarement) et pas non plus dans les quelques cinématiques. Car oui, Narcos en propose des cinématiques, réalisées avec le moteur du jeu, qui sont hors du temps et muettes.
Les dialogues dans le soft sont des grands moments…
Verdict : 3/10
Que penser de ce Narcos: Rise of the Cartels ? C’est difficile de se prononcer. Sur la base l’idée est bonne. Incarner le Cartel de Medellín ou la DEA, former son équipe et recruter des gars, choisir ses missions, les lieux, les personnages, etc. Vraiment, il y a de quoi faire. Mais le jeu se contente toujours du minimum, ce qui ne lui donne aucune saveur. Ses rares points positifs sont trop peu nombreux. Par exemple, les maps biens pensées et plutôt belles ou encore le système de visée qui dynamise les combats se voient écrasés par la difficulté en dents de scie, les cinématiques cheap, l’écriture ridicule, les stéréotypes graveleux ou les graphismes d’un autre temps… Un Xcom-like est dans son essence rébarbatif, c’est pourquoi l’optimisation et la personnalisation sont deux facteurs primordiaux. Les retirer, c’est prendre un pistolet et jouer à la roulette russe. Alors non, nous ne vous conseillons pas ce Narcos: Rise of the Cartels, sauf si vous avez une connaissance qui rêve de devenir un narcotrafiquant. Dans ce cas offrez-le lui, ça va vite le calmer.
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