Depuis son annonce, Monark s’est fait remarquer principalement pour une raison : certains de ses développeurs ont travaillé sur la série Shin Megami Tensei. Il n’a pas fallu longtemps avant que les fans de la licence d’Atlus s’intéressent de plus près à ce jeu, qui ressemble d’ailleurs sur certains points à Persona, initialement un spin-off de Shin Megami Tensei. Sur le papier, c’était prometteur donc mais hélas, la réalité est tout autre.
Test réalisé sur Nintendo Switch grâce à un code numérique envoyé par l’éditeur
Back to school
Le test qui suit risque de contenir quelques légers spoilers mais promis, on essaye d’éviter cela au maximum. Monark prend place au Japon, dans l’établissement scolaire Shin Mikado. D’emblée, les choses commencent mal lorsqu’une mystérieuse brume enveloppe les lieux et rend fous les élèves comme les membres du personnel. Certaines personnes ont réussi à y échapper mais ils ne peuvent pas quitter Shin Mikado, devant alors se replier dans les couloirs et les salles épargnées par la brume. En outre, certains individus, les Pactbearers, semblent liés à tout cela et profitent de la situation, comme l’atteste le premier antagoniste que l’on croise qui se sert de ses pouvoirs pour endoctriner divers élèves. C’est là que le héros – que l’on peut nommer librement – intervient. Amnésique, il est doté de pouvoirs spéciaux et au cours de sa progression, il tombe sur des alliés ainsi que des démons contrôlables qui peuvent combattre à ses côtés dans l’Otherworld, une dimension alternative peuplée de monstres squelettiques en rapport avec la brume. Le but est donc de venir à bout de ces démons, des Pactbearers et de rendre son aspect habituel à Shin Mikado. Ce n’est pas gagné.
Vous l’aurez compris, Monark n’est guère innovant sur son scénario car le coup de l’école coupée du monde extérieur et que l’on doit tirer d’un mauvais pas, on l’a vu et revu dans plusieurs médias. Ce qui compte, c’est comment c’est amené et de ce côté-là, le titre de NIS America et de Lancarse ne manque pas d’une certaine ambiance. Le ton se veut lugubre et pesant, tant par les dialogues des pauvres élèves affectés par la brume que certains sujets traités. Monark touche en effet 2-3 mots sur des sujets sensibles comme la foi, le mal-être des lycéens et même le suicide. Ce n’est pas toujours traité de manière correcte (à ce propos, il convient de noter qu’il y a du texte transophobe à un moment, tout simplement honteux) mais ça a le mérite d’être là. Il y aussi un brin d’humour et de cynisme, que ce soit via les choix que l’on peut faire ou certains personnages comme la mascotte du jeu, Vanitas, un Monark lié au héros. En outre, une aura de mystère entoure le jeu et on est curieux de savoir ce qui se cache vraiment derrière la brume et l’Otherworld.
Malheureusement, 2 choses gâchent notre immersion dans l’univers de Monark : sa mise en scène et la majorité de ses personnages. S’il y a bien quelques cinématiques assez classes, à savoir celles qui sont animées avec des dessins ou celles qui ne sont pas en temps réel, la majeure partie du temps, on a affaire à de simples discussions avec des personnages qui bougent et s’expriment à peine. C’est plutôt dérangeant, surtout quand lors d’un passage important, un élève est en colère tout en gardant un visage de marbre. Certes, il y a des artworks assez beaux pour pallier un tant soi peu à cela mais ils manquent de diversité. Quant à l’écriture des personnages, la plupart sont bien trop clichés pour paraître crédibles et leurs motivations manquent de conviction, allant parfois jusqu’à la contradiction ou l’incompréhension. Pour le coup, nous sommes loin d’un Persona ou d’un Shin Megami Tensei, bien plus haletants et pas seulement dans leurs histoires.
Plusieurs fautes dans la copie
Côté gameplay, Monark se tourne là encore vers du classique avec de l’exploration et des combats. En dehors de la brume, on trouve divers bâtiments et l’extérieur de l’académie que l’on peut parcourir afin de parler avec des élèves, obtenir des informations, se soigner (on y reviendra), etc. En dehors des discussions, il faut avouer qu’il n’y a pas grand-chose à faire mais là n’est pas l’essentiel du jeu. Le plus important, c’est bien sûr d’entrer dans les zones frappées par la brume et dans ces phases, on est à la fois amusés et frustrés. Explications : dans la brume, on a une jauge Mad qui monte au fil du temps et elle augmente plus rapidement lorsqu’on vous téléphone. Non, ce ne sont pas vos beaux-parents qui appellent mais des entités de l’Otherworld et répondre à cet appel est déconseillé durant la majeure partie de Monark car on fait alors face à des ennemis terriblement puissants, capables de vous décimer d’un coup. Quand ça arrive, le stress monte un peu, surtout quand on croise un élève fou qui s’approche de nous pour crier et faire grimper en flèche la jauge Mad. Ça, c’est une chouette idée… mais mal exécutée.
En vérité, avoir la jauge Mad à 100% n’inquiète que la première fois car quand notre héros devient fou, il est automatiquement transporté à l’infirmerie, là où un médecin un peu flemmard sur les bords vous guérit rapidement. Le sentiment de danger lors de l’exploration dans la brume n’est au final guère présent dans Monark alors que ça aurait pu être un de ses points forts. Aussi, pour avancer, il faut souvent résoudre des énigmes comme vérifier le numéro d’étudiant de telle ou telle personne et se souvenir d’un mot à part afin d’accéder à des fichiers sur un PC. Pour le coup, on approuve car c’est toujours bon d’utiliser ses méninges, même s’il arrive que certaines devinettes soient ou trop faciles, ou tirées par les cheveux. Cependant, le rythme de ces passages est très répétitif car le héros se déplace lentement et il faut explorer de fond en comble des décors qui se ressemblent pratiquement tous, en se contentant de récolter des indices mis en avant par de petites lumières. D’accord, nous sommes dans une école donc c’est plus ou moins normal mais cela reste rébarbatif. Enfin, pour venir à bout de la brume dans une zone, il faut arriver au bout d’un niveau et accéder à l’Otherworld afin d’y vaincre quelques ennemis.
Dès lors, vous aurez sans doute remarqué que nous n’avons pas mentionné de monstres présents dans la brume ou de combats aléatoires. C’est simple, en dehors des appels mentionnés précédemment ainsi que de quelques affrontements que l’on peut effectuer en contactant des numéros spéciaux, il n’y a que très peu de combats dans Monark par rapport à d’autres RPG. Un choix curieux, qui ne joue pas en faveur de son rythme. Pour ce qui est de leur structure, les batailles sont un mélange entre tour par tour classique et de la tactique, avec des déplacements dans des petites zones en 3D. Au départ, on décide où va tel ou tel personnage selon une zone d’action, représentée par un cercle. Ensuite, naturellement, le but est de se placer près d’un ennemi pour l’attaquer, idéalement derrière son dos pour davantage de dégâts. Ce système est amusant au départ car on peut créer des placements intéressants afin d’enchaîner les attaques sur un démon, puisque les alliés proches peuvent asséner un coup bonus. Quant aux coups possibles, chaque personnage a ses spécificités : dague au corps-à-corps, spécialité dans la défense et les soins, tir à distance… Cela aurait pu donner des affrontements prenants mais comme pour d’autres points cités plus haut, Monark fait hélas les choses à moitié.
Pratiquement tous les niveaux de combats sont similaires et le champ d’action est limité (à part bêtement tourner autour des adversaires et se placer derrière des murs pour se protéger un minimum, on aurait très bien pu simplement avoir du tour par tour basique), ce qui, vous en conviendrez, n’est guère flatteur pour un RPG tactique. Ensuite, cela manque clairement d’impact dans le rendu de l’action en dehors des attaques spéciales et là où Monark déçoit véritablement, c’est dans sa variété d’ennemis, puisqu’on affronte des tas de squelettes avec juste quelques aspects et armes qui changent. C’est tout ; en dehors des boss plus fun et originaux, sans être renversants pour autant. Certains combats sont également longs, bien trop longs pour rien, surtout quand on perd du temps à juste amener les personnages aux ennemis. Monark est aussi assez aléatoire côté difficulté car s’il y a quelques fois où les démons ne savent pas trop quoi faire, il y en a d’autres où ils décident subitement de tous attaquer le personnage principal d’une traite. Si ce dernier meurt, c’est la fin du combat et quand ça arrive après 10-20 minutes de dur labeur, c’est frustrant et pas pour les bonnes raisons comme dans d’autres jeux. Bien sûr, on peut monter en niveaux en dépensant des points dans un menu dédié, tout en obtenant de nouvelles capacités mais le sentiment de progression ne parvient pas à sauver Monark de la monotonie et de l’insatisfaction, malgré des concepts alléchants. La durée de vie, plutôt conséquente, semble alors bien plus longue qu’elle ne l’est en réalité.
Présentation à revoir
Monark aurait pu tirer son épingle du jeu avec une direction artistique et des graphismes au point, chose qu’il tente de faire avec un aspect typé anime saupoudré d’une teinte horrifique, un peu edgy sur les bords comme disent nos voisins anglais. Le design des personnages est plutôt réussi, même si leur modélisation est un peu sommaire et que le mélange entre cel shading ainsi qu’un aspect plus basique ne fait pas forcément bon ménage. C’est passable, on va dire.
Pour le reste, c’est à la limite de l’impardonnable, même sur Nintendo Switch car le rendu graphique a plusieurs années de retard, chose que l’on ne comprend pas car l’école est à peine variée au niveau de ses couloirs, de ses salles et de son extérieur. Pareil pour l’Otherworld et ses ennemis, dont le seul changement est perceptible via des couleurs dans le fond des décors et des éléments différents sur des ennemis squelettes assez basiques. Cela n’aide pas au sentiment de répétition, c’est sûr. Ajoutez à cela de l’aliasing, des effets d’ombres ratés, un faible travail sur la lumière et les textures ainsi qu’un framerate qui baisse de temps en temps. Le tout se veut austère, froid et daté, on a du mal alors à être pris au jeu. C’est mieux du côté de l’interface, simple et efficace mais ça ne sauve pas le reste, surtout que le tout… est en anglais. Eh oui, pas de textes en français, hélas, ce qui peut gâcher la compréhension de certains termes de temps à autre.
Si Monark s’en sort davantage avec sa bande-son, surtout grâce à ses voix japonaises de qualité avec quelques acteurs connus du milieu du doublage, les musiques ne sont pas mémorables pour autant en dehors des thèmes des boss assez cool. On retient surtout la composition dans les lieux épargnées par la brume, guillerette et douce. Quant au reste, cela manque d’effets d’épouvante et épique pour nous immerger davantage dans des moments qui auraient dû, en principe, nous glacer un minimum le sang avant de le faire bouillir lors de terribles combats.
Verdict : 4/10
Malheureusement, Monark est un RPG décevant. Bien qu’il ait quelques idées originales ainsi qu’une ambiance travaillée, son manque de budget, d’ambition et de temps de développement ne jouent clairement pas en sa faveur. Les fans purs et durs du genre qui cherchent un brin d’originalité pourraient se laisser tenter et peut-être pardonner plus facilement que nous certains défauts. Peut-être. En l’état, c’est un jeu qui aurait à peine fait parler de lui il y a quelques années déjà et en ces temps où le genre compte d’innombrables pépites, il sera sans doute vite oublié. Espérons tout de même une suite qui corrigera une partie des défauts car il y a un minimum de potentiel avec la licence.
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