Pour les amoureux et amoureuses de la licence Life is Strange, ce fut un véritable plaisir de découvrir qu’un nouvel univers reprenant cette esthétique sort cette année. Lost Records: Bloom & Rage Tape 1 sort au mois de février, avec des personnages charismatiques et tout aussi uniques. Cependant, Don’t Nod prend un risque audacieux en développant une nouvelle licence, en laissant de côté leur série phare Life is Strange. Réussira-t-il à dissiper nos doutes et à nous plonger pleinement aussi bien dans l’été 1995 que dans la période post-Covid de 2022 ? Voici toutes nos impressions sur la Tape 1, intitulée Bloom. Entre amitié naissante, groupe punk et événements étranges, l’été 95 n’aura jamais été aussi riche en émotions aux côtés de quatre lycéennes aussi atypiques qu’attachantes.
Test réalisé sur PS5 à l’aide d’une copie numérique envoyée par l’éditeur
Un été 95 aux allures de coming of age
Avant de rentrer dans le vif du sujet, il est important de noter que Lost Records: Bloom & Rage s’inspire de ses prédécesseurs et se déploie en 2 épisodes distincts, le premier intitulé Bloom tandis que le second prend le nom de Rage. Durant l’été 95, Swann vit à Velvet Core, une banlieue résidentielle typiquement américaine située dans le Michigan. Swann est l’archétype de l’adolescente étrange : plutôt rondelette, rousse, parsemée de taches de rousseur, avec des hobbys inhabituels comme le cinéma, le caméscope, les insectes et un goût prononcé pour l’horreur. Elle tente, malgré les brimades et autres harcèlements, de vivre une vie paisible aux côtés de ses parents aimants. Ici, exit la figure parentale absente : Swann n’est pas seule, même si l’adolescence bat son plein à 16 ans et que les discussions avec les parents tournent vite en eau de boudin. Son quotidien bascule soudainement lorsqu’elle décide de filmer un ballon de baudruche rouge flottant le long d’une barrière de fer. Focalisée sur son œuvre d’art, Swann ne réalise pas la présence de Dylan, une jeune adulte en devenir, légèrement vêtue et mourant de chaleur sous l’été. S’ensuit une joute verbale digne des séries américaines, avant que l’archétype du petit ami, Corey, plus doué de force que d’intelligence, ne fasse irruption pour venir en aide à la douce Dylan qui pensait être filmée par une quelconque perverse. Et c’est là qu’un inhabituel groupe d’amies se forme par pur hasard.
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Tentant tant bien que mal de se justifier, Swann se voit aidée par Autumn et son amie Nora, qui étaient toutes les deux au stand de glaces d’à côté, ainsi que par Kat, la petite sœur de Dylan. Même si chaque demoiselle est différente à sa manière, elles vont toutes défendre la pauvre Swann qui se fait harceler et insulter de tous les noms. Après avoir réussi à faire fuir les deux jeunes adultes, non sans avoir perdu les clés du stand de glace où Autumn travaille pour l’été, le groupe de filles décide de prendre la direction du parc de jeux pour enfant proche de la forêt pour retrouver ces clés égarées, lancées sauvagement par Corey. L’amitié commencera à naître dans ce groupe grâce à ces péripéties, le principal lieu de rencontre sera une maison en bois abandonnée dans la forêt, où le plus de cachotteries et de confessions seront faites dans ce refuge témoin de leurs confidences, dignes de jeunes adolescentes qui cherchent à sortir du quotidien classique américain. Cependant, cette nouvelle habitude semblait si idyllique entre amourettes et de jeu d’action ou vérité entre copines, prend un tournant inattendu : un pacte est scellé, de nouveaux films sous caméscopes sont tournés, un audacieux nom de groupe Bloom & Rage voit le jour, l’apparition d’un abysse et de nuances de roses et de bleues viennent tout bouleverser.
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En parallèle des souvenirs de l’été 95, en 2022, soit 27 ans après, Swann retrouve Autumn au seul bar de la ville de Velvet Core. Autumn a planifié un rendez-vous avec le groupe Bloom & Rage pour parler d’un mystérieux paquet qu’elle a reçu et dont elle ne sait que faire. Swann et Autumn passeront donc une bonne partie de la soirée à se remémorer leur adolescence, leurs émois, leurs erreurs et leurs réussites tout en réfléchissant à ce qu’elles doivent faire de ce paquet. Peu de personnes ont eu connaissance de leur groupe, comment est-il possible qu’Autumn reçoive 27 ans après un paquet portant ce nom ? Une aventure riche en rebondissements et en émotions. Comptez entre 5 et 6 heures pour venir à bout de cette première tape.
Outre le fait que les développeurs prouvent à nouveau leur talent scénaristique à travers cet épisode, ils parviennent à créer une aventure cohérente et surtout forte en émotions. Nouveau venu ou adepte de la saga des Life is Strange, la qualité du scénario et des dialogues sont indéniables. Sans oublier les thématiques sociétales abordées qui rappellent les opus de Life is Strange tout en rajoutant une nouvelle couche plus contemporaine en traitant de sujets comme l’homophobie, la grossophobie, l’acceptation de soi, mais aussi des sujets plus classiques comme les difficultés au lycée, l’asociabilité, la drogue ou l’alcool et nous en passons d’autres. On pourrait craindre des clichés, mais l’écriture est si fine et authentique, qu’on se revoit dans notre propre adolescence avec des décisions absurdes avec du recul, mais reflétant parfaitement l’insouciance et les dilemmes de l’époque. L’insouciance transpire en été 95, tandis que la réalité frappe plus fort en 2022 face à tous ces agissements innocents de l’époque.
Un début plus que convaincant
C’est un peu avec réticence que nous avons lancé ce premier épisode de Lost Records, pensant retrouver un jeu aux allures de Life is Strange sans âme. Cependant, il aura fallu seulement quelques minutes pour dissiper nos doutes. Tous les ingrédients qui font le grain de l’œuvre Life is Strange s’y trouvent, bénéficiant d’améliorations non négligeables et propres à Lost Records. L’œuvre vole donc de ses propres ailes avec des graphismes et des mouvements améliorés, même si certaines scènes fixes tendent vers le comique face aux clippings récurrents et aux autres bugs d’animation où certaines parties du corps traversent textures et objets. Nous retrouvons tout de même la direction artistique caractéristique, style bande dessinée, chère à la licence avec des effets de lumière à couper le souffle, des séquences visuelles où nous avons posé la manette tant la beauté du jeu nous a subjugué avec des techniques cinématographiques maîtrisées avec brio. Peu importe le cadre – forêt, lac ou bar – chaque environnement est maîtrisé et possède un charme qui nous en a mis plein la vue.
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Nous vous avons expliqué précédemment la création d’un groupe de punk avec ces quatre lycéennes, la musique est donc une partie à part entière du jeu. La bande-son est d’une justesse dans les différentes scènes, entre les musiques pop-rock grunge, mais aussi des moments plus lyriques complètent cette bande son de qualité. Or, il est crucial de parler de fer de lance des jeux narratifs de ce style : le système de choix narratifs permettant d’avoir plusieurs embranchements scénaristiques importants. Toujours présents et sublimés, le joueur aura la possibilité de choisir entre une et plusieurs propositions, en partant du principe que ne rien faire est aussi envisageable. De nombreuses opportunités sont présentes et diluées tout au long de l’aventure. Même si on peut parfois sentir que les dialogues et répercussions n’ont aucune importante, il en est tout autre. Certains choix en débloqueront d’autres, en fonction de nos actions passées. Chaque décision est donc importante et à ne pas prendre à la légère. De plus, elle permet aussi de se rapprocher plus ou moins de chaque membre du groupe. On peut donc développer une relation d’amitié ou plus encore avec Autumn, Nora et Kat. Nous ne savons pas encore à l’heure actuelle l’étendue de cette décision, qui semble être crucial pour la Tape 2 Rage. L’alchimie entre les personnes peut, par ailleurs, ne pas autant crever l’écran que prévu. L’adolescence à son paroxysme, rend certaines réactions et ambiances parfois trop lourdes. On sent aussi que Don’t Nod propose une expérience poussée vers un véritable amour entre les différents personnages, les hormones en feu plus que de raisons, perdant potentiellement certains joueurs. Néanmoins, attention à l’effet fouillis entre les souvenirs dans tous les sens, le dialogue des personnages et les différentes interactions, les voix finissent par s’entremêler et il est parfois difficile de suivre l’action à l’écran.
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Tout au long de l’aventure, Swann est donc notre protagoniste principal. Armée de son caméscope, elle nous montre les aventures qu’elle a donc vécu durant l’été 95. Un caméscope qui fera donc partie intégrante du gameplay, au même titre que le système de choix narratif. On se retrouve donc régulièrement à regarder le monde à travers notre petit écran pour filmer tout ce qui nous entoure d’intéressant. Cela peut donc passer de simples animaux sauvages, au graffiti, mais aussi de nos trois nouvelles amies. Un gameplay qui peut parfois être frustrant, vu qui apporte que des succès ainsi qu’une bibliothèque de mémoires où nous avons la possibilité de créer nos propres films, sur nos amis les oiseaux par exemple. On choisit les portions de films qui nous intéressent, on les place à l’endroit souhaité, que ce soit en bout, en début ou au milieu des différentes scènes. L’expérience est réussie et le grain de l’aspect VHS rend l’expérience des plus convaincantes. La manipulation peut se faire via une utilisation classique de la manette, mais il faut noter la présence de la fonctionnalité gyroscope est activée par défaut. La sensation de filmer est donc poussée à son paroxysme et si l’on bouge notre manette d’un certain angle, la caméra ne filmera plus la même chose. Une fonctionnalité appréciable, si ce n’est qu’elle peut s’avérer capricieuse et on peut finir par se retrouver à tourner la manette dans tous les sens pour obtenir une caméra stable et droite. De plus, les personnages auront tendance à nous demander de les filmer. Ils nous interpelleront de manière récurrente rendant le tout réaliste, on ne va pas filmer des oiseaux pendant des heures alors que nos amis sont juste à côté et qu’ils nous attendent après tout.
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Verdict : On veut connaître la suite !
Après avoir passé quelques temps en compagnie du groupe Bloom & Rage grâce à la Tape 1 de Lost Records, l’opus démarre fort. Entre une qualité d’écriture, une direction artistique aux petits oignons et une bande-son grunge comme il faut, il nous tarde de mettre la main sur la seconde partie du titre et de connaître la suite des événements. La Tape 1 se finit de manière inattendue et soulève de nombreuses questions qui pourront trouver leurs réponses dans la Tape 2. Une œuvre donc époustouflante de la part de Don’t Nod qui a réussi le tour de force de proposer une nouvelle œuvre dans le style choix narratif, aussi immersif que moderne avec des thématiques actuelles qui en toucheront plus d’un. Le pari semble donc réussi, mais reste à savoir si la promesse sera tenue avec la seconde partie.
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