Depuis quelques mois on peut noter une recrudescence des jeux au tour par tour, principalement par le retour de grandes séries ou noms. Julian Gollop (créateur de la saga X-Com) qui est revenu l’année dernière avec Phoenix Point, Wasteland 3 qui est autre que la série qui a inspiré Fallout, ou encore toute la scène indépendante qui utilise ce genre à foison. Parfois il marque sa génération, comme XCOM 2 de Firaxis Games, ou à l’inverse est simpliste à en oublier son existence comme Narcos: Rise of the Cartel. Mais, souvent, il est entre le deux et c’est ce que à quoi Empire of Sin semble être destiné. Pourtant, le soft de Romero Games conçut par John (DOOM) et Brenda Romero a de très sérieux atouts dans sa manche.
Test réalisé sur PC grâce à une copie numérique envoyée par l’éditeur
Les années folles
Dans le milieu de la pègre, les sentiments n’ont pas lieu d’être. Pour autant Empire of Sin ne se fourvoie pas d’oublier de raconter des épopées. Bien que le soft reste un bac à sable, où chaque partie est unique, les personnages principaux et secondaires ont une histoire à conter. Au début on doit choisir un gangster et parmi ce roster se mélange de véritables noms, comme Al Capone, Stéphanie St Clair ou encore Angelo Senna, à des personnages fictifs. Ces pans narratifs généralement se réduisent aux premières heures et justifient de poser les bases de son empire. Ils ont également des affinités ou inimitiés envers leurs confrères, ce qui permet d’obtenir plus d’informations sur ces derniers (comme des actions passées), ainsi que sur les autres protagonistes. De même, et cela très tôt dans la partie, on peut recruter des gangsters qui travailleront à notre solde, et eux aussi ont une quête qui développe une petite histoire. Il ne faut pas s’attendre à des récits, mais bien des petits plus supplémentaires sur le background des caractères. Ce qui fait que cela marche particulièrement avec Empire of Sin est donc cette idée de bac à sable mélangé à des éléments narratifs fixes en fonction de nos choix. Rendant ainsi chaque partie plus ou moins unique sur ce point. De plus et on approfondira le sujet plus bas, il est possible d’avoir des bonus (ou malus) liés à ces mêmes choix. On regrette seulement que les quêtes principales soient relativement courtes et se résolvent souvent de pareille manière. Un peu plus de variété n’aurait pas fait de mal. Mais le cœur n’est pas là.
Quartier après quartier..
En effet Empire of Sin fait revivre une époque charnière des États-Unis, les années 20. Elle signe à la fois le début des années folles, mais également celles de la prohibition. Un parallèle où la libération et la répression se partagent la tête d’affiche. Pas besoin d’être une flèche pour comprendre qu’on a un objectif, subvenir à ce besoin de liberté en fournissant bars, bordels et autres casinos, tout en supervisant la production d’alcools. Bien sûr on est pas seul, différents malfrats sont dédiés à cette tâche aussi clandestine que lucrative. On est donc plongé dans un Chicago divisé en quartiers, où il faut la jouer fine pour en prendre le contrôle. Le jeu est scindé en deux phases : une partie gestion en temps réel et une autre pour les combats en tour par tour.
Avant de parler empire, il faut avoir une assise et trouver comment installer ses infrastructures. On déambule donc avec son gangster dans les rues, à la recherche d’un immeuble susceptible d’accueillir notre première entreprise. Ainsi on remarque qu’avec chance le quartier populaire abrite bon nombre de petites brutes qui se sont établies dans des bâtiments abandonnés. En les délogeant on prend le contrôle de ce dernier, et on peut alors y préparer notre premier commerce. Plusieurs sont disponibles, comme les bars, les bordels et les casinos. Les trois ont des effets propres, les bars génèrent plus d’argent que les bordels, mais sont moins discrets, alors que le casino fera la pluie et le beau temps de vos finances. Une fois ce choix fait, il est possible d’appliquer diverses modifications comme ajouter de la sécurité, améliorer l’ambiance ou bien encore travailler la discrétion et le bouche-à-oreille pour repousser une hypothétique descente de flics et attirer des clients. Tous ces bâtiments ont néanmoins besoin d’une chose : de la gnôle. Prohibition oblige, on est à la fois brasseur, transporteur et vendeur (voire exportateur). Les brasseries sont le poumon des revenus, car sans alcool, pas de clients, sans clients c’est la faillite.
Le hic, c’est qu’on n’est pas les seuls à opérer, d’autres groupes vont en même temps faire la même chose. Très rapidement la carte du quartier va s’imbiber de couleurs à l’effigie des gangs, et bien qu’on ne soit pas en guerre, nous feront du tord. Effectivement l’IA est régie par d’identiques règles que nous, et doit donc aussi prendre des lieux, installer des bars et autres brasseries. Mais le nombre de clients dans le quartier n’augmente pas, et il faut se surclasser à coup d’amélioration pour avoir le consommateur. Si au début ça n’a pas d’influence, petit à petit des frictions vont se faire ressentir, et un voisin peut subitement changer d’avis sur le joueur. De fil en aiguille une guerre peut naître, entraînant un bain sanglant dans la zone où les deux belligérants vont se battre avec les armes pour prendre les commerces, et s’affronter. Ce n’est pas bon pour les affaires. Perdre un business pourquoi pas, mais le pire c’est de perdre ses clients, préférant s’abreuver dans des quartiers plus « sûrs ». Plus une zone a de conflits, plus elle s’appauvrit en clients et perd en réputation, plus un riche quartier peut devenir misérable en quelques mois. Quand on dit que la guerre est mauvaise pour les affaires. Heureusement il est possible de négocier avec chefs, proposer une trêve, rendre un business, en bref arrondir les angles pour restituer un quartier paisible et surtout voir la population revenir. Or, on est pas que deux à vouloir des parts du gâteau de Chicago, mais une dizaine. Plus on est de fous plus on rit n’est-ce pas ? Par ailleurs, rappelons que tout ça se fait en temps réel et on peut y apercevoir les descentes policières, des petits groupes qui surveillent ou vont attaquer un établissement..
Mais voilà, arrive un moment où il faut être entouré pour assurer sa sécurité. On peut donc compter sur un livre noir, sorte d’annuaire de malfrats en recherche d’emploi. Ils seront vos agents de terrain, ils combattront à vos côtés, en votre nom, peuvent être équipé et spécialisé dans un rôle, devenir une taupe, gérer un quartier, bref. Ils sont là pour vous. Ils possèdent plusieurs attributs, tirés directement des jeux de rôle, comme une force supplémentaire, un penchant pour l’alcoolisme, mais surtout des relations plus ou moins intimes avec les autres agents. Des informations importantes car en fonction des actions, des choix ou encore complément de l’histoire du personnage, ces personnages ne réagiront pas de la même manière. Dans l’idée si un rival recrute le crush de votre porte-flingue préféré, attention à ne pas le tuer, sous peine de quoi il réclamera vengeance contre vous ou sombrera dans l’éthylisme.
Côté combat, c’est donc un tour par tour au combien classique. Celui-ci ne réinvente pas la formule mais reste sur ses solides bases. Chaque personnage possède deux points d’action pour se déplacer, tirer, soigner, frapper au corps à corps, etc. En fonction de sa classe, il peut avoir accès à des compétences spéciales grâce à un arbre d’évolution. On retiendra surtout des combats le fait que plusieurs gangs peuvent être présents, voire même la police qui se mêle à ces derniers. Hors cela, rien de nouveau sous les néons. Par contre il faut se préparer, les affrontements sont nombreux et s’enchaînent parfois à vitesse grand V. Il n’est pas rare de faire 4 à 5 combats d’affilé si on est en guerre, car on doit défendre manuellement tous nos biens. Ce qui sur la durée peut donner un côté redondant surtout quand se sont des accrochages avec uniquement des gardes. Puis pour ne pas arranger les choses, l’intelligence artificielle semble briller de stupidité pour nous étonner.
Finalement, si Empire of Sin arrive à proposer une atmosphère twenties without problems, graphiquement il est en deçà des standards actuels. Alors oui, il simule toute une ville en action, avec ses passants, voitures, polices et autres opérations de gangs, dans une fluidité à toutes épreuves, mais attention à ne pas trop zoomer ! De près le soft fait pâle figure et heureusement pour lui que la direction artistique, à l’inverse, est particulièrement soignée.
Il est possible d’éxécuter ses adversaires…
Verdict : 6/10
Nous n’irions pas jusqu’à vous déconseiller ce Empire of Sin, bien au contraire. Le soft propose quelques idées bienvenues, comme le monde semi-ouvert ou les affinités naissantes ou déjà présentes entre les personnages, les combats contre les autres chefs, voire la carte évoluée au fil de la partie. Vraiment, il y a beaucoup de plus qui font qu’on a adoré parcourir le jeu. Mais il manque d’un peu de tout pour lui donner la place qu’il mérite. Alors oui, si vous cherchez un X-Com like en Empire of Sin, vous le trouverez en partie, mais ne vous attendez pas à trop, car il ne tient pas la comparaison.
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