Aaah Digimon, cette licence qui a fait les beaux jours des japonais mais qui, si ce n’est une apparition éclair vers le début des années 2000, n’a jamais réellement fait son trou en Occident. Eh bien, que vous soyez au courant ou non, Bakumon, Garurumon et consorts sont bel et bien de retour sur PlayStation 4 sous la forme d’un RPG façon Tamagotchi très… à l’ancienne. Pour le meilleur ou pour le pire ? Réponse dans les lignes qui suivent.
Digimon World: Next Order, puisque c’est ainsi qu’il se nomme, n’est malheureusement pas la suite de Digimon Story Cyber Sleuth, RPG sorti l’an dernier, testé à l’époque par Tsu qui l’avait trouvé très correct (sa review est d’ailleurs disponible ici). Outre notre opinion, l’avis de la presse de manière générale avait été assez favorable, le jeu plafonnant actuellement à 75/100 sur Metacritic. Se pose donc la question suivante : mais pourquoi Bandai Namco n’a pas rebondi sur le petit succès de ce RPG au tour par tour pour le transcender, comme c’est souvent le cas avec les suites ? La réponse est toute simple : pour faire ressusciter une série qui a fait le bonheur de certains digifans de la licence sur PS1, à savoir Digimon World.
S’il est déjà assez étrange de changer complètement l’orientation de la licence Digimon en jeu vidéo d’une année sur l’autre, le résultat l’est encore plus. Soyons clair sur un point : nous avons eu beau avoir apprécié Digimon World: Next Order, il n’en reste pas moins que ce n’est pas, selon nous, un bon jeu vidéo. Finalement, DWNO c’est un peu ce jeu qu’on a envie de réaliser durant une partie de Game Dev Story (vous y avez tous joué, non ?). Sauf qu’on se rend compte, une fois le titre sorti, qu’il n’est absolument plus en phase, ni avec son époque ni avec son public. Ça jette un froid, hein ? Trêve de bavardages et entrons dans les détails.
Tamagotchi Next Order
Ce serait avec plaisir que nous pourrions vous évoquer l’histoire de ce titre, si seulement il en avait quelque chose à faire. En effet, vous incarnez ici un dresseur à casquette un peu random, on vous dit que c’est le bazar total à cause d’un Digimon en métal très méchant, et que donc… Vous allez devoir élever et entraîner des Digimon, et ainsi rejouer éternellement les mêmes mécaniques de gameplay, et ce jusqu’à ce qu’enfin elle porte ses fruits.
Cette boucle, c’est le point central du jeu. Elle est la motivation qui nous pousse à enchaîner les heures manette en mains, mais également l’élément le plus absurde et passéiste de ce Digimon World: Next Order. C’est à la fois un moteur de frustration, d’excitation, mais aussi et malheureusement, comme tout élément qui se répète, une cause de lassitude évidente.
Pour autant, il serait totalement inutile de simplement vous énoncer des faits de manière schématique, c’est pour cela que nous allons vous détailler avec exactitude à quoi ressemble une semaine virtuelle de temps de jeu dans Digimon World: Next Order. Notre héros commence par se réveiller et, puisque dehors il fait beau (il fait toujours beau, sachez-le !), il parcourt son petit village rempli de Digimon (qui sont en majorité là pour lui donner des conseils très utiles comme : « N’hésite pas à interpeller des PNJ si tu veux récupérer des missions » ou « La nourriture est essentielle pour survivre »).
Étant donné que les deux Digimon qu’on choisit au début naissent un peu diginuls, il va falloir les entraîner. C’est là que sonne la première incompréhension liée à la fameuse boucle de gameplay citée plus haut. Depuis déjà 20 ans de Pokémon, et au moins 30 ans d’Histoire du RPG, on entraîne ses personnages en combattant (cela reste la meilleure manière). Ici, il faut simplement passer son temps à la salle de sport du coin.
La majorité des journées de la semaine consistera donc à se rendre sur place, afin d’entraîner son Digimon jusqu’à ce qu’il ait évolué un certain nombre de fois et soit devenu assez puissant pour affronter les premiers monstres du jeu. Vient ensuite la partie exploration, qui constitue à la fois la plus excitante et la plus ennuyeuse des phases de jeu. On gambade dans des zones découpées (un peu à la Monster Hunter ou à la Metal Gear Solid: Peace Walker), proposant une ambiance un peu différente à chaque fois, ainsi que des petits PNJ (qui, si on effectue leur mission, rejoignent notre camp) et des méchants très méchants.
Le système de combat est d’ailleurs assez hasardeux dans la mesure où l’on contrôle notre Digimon à environ 15%. On peut sélectionner certaines de ses attaques et encourager son équipe en appuyant sur X. On peut même gérer des « stratégies »… Qui se révèlent assez inutiles si l’on a passé assez de temps à la salle d’entraînement. Pire encore que dans un Final Fantasy XIII, il est possible de gagner les combats sans ne jamais toucher la manette.
À tous ces éléments qui font déjà rêver s’ajoute la plus grande composante du jeu, à savoir l’entretien de son Digimon. Il faut lui donner à manger, l’emmener aux toilettes quand il a envie de faire caca, lui coller des pansements s’il a mal, le soigner s’il est malade, le coucher s’il est fatigué, le féliciter s’il est gentil, le gronder s’il est méchant… Mais paradoxalement, si cet élément est relativement énervant de prime abord (comme la plupart des tâches à effectuer dans le jeu finalement), on finit progressivement par s’attacher à nos petits monstres et une horloge biologique virtuelle s’installe dans notre conscience de joueur. Enfin… Jusqu’à ce que vos compagnons meurent d’une maladie absolument random, que vous ne pouvez pas soigner parce que vous n’avez pas fait telle ou telle quête qui permettait d’y parvenir. Si cette technique de mort aléatoire est efficace pour varier un peu nos compagnons de jeu, il devient pour autant plus difficile de s’y attacher sur la durée. C’est en effet très différent d’un Fire Emblem (ça n’a rien à voir mais restez, la comparaison vaut le coup d’oeil !), dans lequel nos personnages peuvent mourir mais on sait toujours pourquoi. Ici, il suffit que vous n’ayez pas observé une indication cachée dans l’immonde interface du jeu pour vous retrouver d’un coup avec un mort sur le dos.
Digiretard graphique
Enfin, visuellement, le jeu est très très très moche. Vraiment, on dirait les jeux PlayStation 2 « lissés » qui sont vendus sur le PlayStation Store et qui, eux au moins, ont l’avantage de ne pas être vendus 59,99€. Vous l’aurez compris, DWNO est une catastrophe technique comme on n’en fait plus. Digimon Story Cyber Sleuth était certes très moyen graphiquement, mais à côté de celui-là, c’est clairement une claque visuelle. Digimon World: Next Order impose des temps de chargement assez courts, mais il y en a tout le temps ! De même, les effets de particules piquent les yeux, les textures sont basiques au possible, et les caméras sont insupportables. L’aspect visuel ne rend clairement pas hommage aux Digimons (qui d’ailleurs se retrouvent parfois désincarnés et ressemblent à des ersatz d’ennemis qu’on trouverait au début d’un épisode old-school de Dragon Quest).
Pour passer un petit coup sur le contenu des fameuses missions que donnent les PNJ, il s’agit très souvent d’aller battre tel monstre ou d’aller chercher tel ingrédient – incluant un degré d’impertinence supplémentaire, à savoir le spawn aléatoire de certains éléments de la nature. Il est totalement possible que vous fassiez le tour de la map sans mettre la mains sur l’objet dont vous avez besoin pour finir une quête, pour finalement le trouver au point de départ de la map dès le lendemain. Oh ! Avons-nous oublié de vous dire que les animations étaient à mourir de rire (mais ce n’est pas fait exprès, apparemment) ?
Verdict
Que c’est compliqué de tester un jeu comme Digimon World: Next Order ! Plus on avance et plus on est partagé entre aimer l’aspect Tamagotchi du titre et détester tout le reste, à savoir les points qui en font un jeu qui n’est absolument pas en phase avec sa génération. On aura beau passer des heures à entraîner ses personnages et à les envoyer se battre, on se lasse finalement très vite face aux barrières imposées qui nous empêchent de nous amuser. Que ce soit par le biais de son architecture, de son gameplay ou de son aspect visuel, Digimon World: Next Order fait faire un retour vers le passé à une saga qui n’en valait, déjà à l’époque, pas des masses le coup. Un jeu PS1 doté de graphismes PS2, et enfermé dans une jaquette PS4. Le tout vendu 60€. Aïe.
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