Après le carton plein de Fire Emblem: Three Houses et Astral Chain, Nintendo continue tranquillement son rythme de publication d’exclusivités avec Daemon X Machina qui vient ponctuer la rentrée avec ses mechas rutilants. Si la Nintendo Switch est encore pauvre en titres offrant des affrontements dignes d’œuvres telles que la série des Gundam, c’est au studio Marvelous que revient la lourde tâche de proposer pour la console une exclusivité qui viendra palier ce manque. Connus pour avoir développé de nombreux jeux Senran Kagura ou encore Fate, la qualité variable de leurs productions laisse planer un nuage d’incertitudes autour d’un titre qui s’est tout de même laissé approcher le temps de 2 démos afin de prendre la température auprès du public.
Test réalisé sur Nintendo Switch à l’aide d’un code fourni par l’éditeur
Mon robot, c’est le plus beau de tous les robots
Si certains d’entre vous les connaissent pour les jeux polissons tirés de la franchise Senran Kagura, les développeurs de chez Marvelous ne se cantonnent pas seulement aux jeunes demoiselles bien en chair et aux vêtements plus courts que de raison. En effet, on a récemment retrouvé leur travail sur God Eater 3, un jeu édité par Bandai Namco et dans lequel on retrouve cette patte artistique très axé anime/manga. Une composante qui semble chère au studio et qui n’a rien de très étonnant lorsque l’on sait qu’ils officient également dans la production d’animes. Vous l’aurez donc compris, Daemon X Machina bénéficie lui aussi d’un rendu purement nippon.
Les premiers instants du jeu nous permettent d’ailleurs de créer notre protagoniste, homme ou femme, à l’aide de certains critères bien ancrés dans les systèmes de customisation qui nous sont habituellement proposés. L’avantage, c’est que rien n’est gravé dans le marbre puisqu’il est tout à fait possible en cours de jeu de modifier l’apparence du héros/de l’héroïne contre des crédits, la monnaie in-game. De la couleur des cheveux en passant par la forme du visage sans oublier les marques et cicatrices, l’éditeur de personnage offre assez de possibilités pour se créer un avatar bien à soi, mais on a tout de même connu plus permissif. Toujours est-il que la customisation fait partie intégrante du concept du jeu puisqu’en dehors de notre pilote, l’Arsenal du joueur profitera lui aussi d’éléments de personnalisation qui ne s’arrêtent pas à de simples éléments cosmétiques.
Ainsi, Daemon X Machina nous narre une histoire dans laquelle les humains et machines se livrent une guerre sans merci. En effet, suite à la chute de la Lune sur la planète Terre, une énergie spéciale appelée Femto a retourné toutes les intelligences artificielles contre l’humanité. Pour lutter face à cette menace, le joueur incarne l’un des pilotes, nommés Outers, chargé de compléter de nombreuses missions qui ont pour but de récupérer le contrôle total de la planète tout en annihilant les Immortals, des machines redoutables et autrement plus dangereuses que les simples IA. Heureusement pour lutter, les Outers ont à leur disposition leur propre mecha. L’Arsenal est donc leur principal moyen de défense et permet de mettre à profit l’énergie Femto pour utiliser des aptitudes spéciales.
La construction du jeu est assez basique dans l’idée, puisque de l’acceptation d’une mission à l’amélioration de notre équipement, tout se passe dans le hub principal à savoir la station Orbital. La zone en elle-même s’avère être restreinte et il suffit d’une poignée de secondes afin d’en faire le tour. Cela permet cependant de briser la certaine routine qui s’installe, puisque les missions s’acceptent directement via un terminal, qui permet également de modifier son arsenal, d’avoir accès aux messages envoyés par les PNJ, etc.
Le schéma est donc le suivant : on accepte une mission via le terminal (ces dernières sont classées en fonction de leur rang, qui correspond à leur difficulté), s’ensuit alors une phase de briefing souvent suivie par une courte cinématique et quelques échanges avant de passer aux préparatifs de la mission et de se lancer dans le feu de l’action. Le problème, c’est que le jeu introduit énormément de personnages sans jamais les présenter au préalable, tout en sachant qu’ils proviennent tous de différentes factions. Puisqu’elles n’ont pas toutes le même but ni les mêmes idéaux (certains seront même amenés à nous affronter durant une mission tandis qu’ils feront équipe avec nous lors de la suivante), on y retrouve évidemment certains traits de caractère qui permettent de s’y retrouver un peu, mais dans l’ensemble on n’aurait pas été contre une présentation un peu plus concrète de ces consortiums ainsi que des mercenaires qui les composent.
En soi, ce n’est pas forcément un problème tant le scénario semble secondaire dans Daemon X Machina. Non pas qu’il soit inintéressant, mais ses bases sont assez convenues, il faut l’avouer, et il ne semble pas chercher à un seul instant à impliquer le joueur durant les premières heures. D’autant que notre personnage est muet tout au long de l’aventure, ce qui le rend difficilement attachant quand bien même on l’a créé de la tête aux pieds. La narration décousue n’aide pas vraiment à rentrer dans le scénario et les personnages digressent trop pendant les dialogues, ce qui permet difficilement la création d’un quelconque lien avec eux. Dommage qu’il n’exploite pas plus son système de consortiums en mettant en avant les différents protagonistes qui les composent.
On y retrouve cependant la plupart des clichés des animes nippon : le gros bras pas très futé qui ne jure que par ses poings (ou du moins, celui de son Arsenal), l’extraverti prêt à l’action, le taciturne sombre et mystérieux, le duo de sœurs torturées et pas très nettes… Toujours est-il que les amateurs sauront apprécier les différentes facettes de ces NPC qui jouent leur rôle à fond.
Un gameplay mecha profond
S’il ne brille pas de par sa narration et son scénario, Daemon X Machina s’en sort-il mieux sur le champ de bataille ? Force est de reconnaître que oui, même si tout est loin d’être parfait. De prime abord, le gameplay semble abordable facile d’accès. Effectivement, dans ses déplacements comme dans son système d’attaque, le jeu ne déroge pas trop à la règle. Toutefois, si chaque bras de l’Arsenal peut être équipé d’une arme, les pylônes gauche et droite peuvent aussi en contenir une chacune afin de pouvoir changer de stratégie en plein affrontement ou bien tout simplement de permuter d’arme en cas de munitions épuisées. Rien d’extraordinaire jusque-là, mais les choses se corsent dès lors que l’on passe les premiers tutoriels. En effet, l’énergie Femto dont nous parlions plus haut est en quelque sorte un carburant essentiel pour les Arsenals afin qu’ils puissent utiliser pleinement leurs capacités et le Mirage, leur botte secrète en quelque sorte.
Il existe 3 armements Femto différents qui permettent de renforcer l’attaque, la défense ou la mobilité au dépend de l’une des caractéristiques. Savoir jongler entre eux n’est pas forcément nécessaire mais offre tout de même plus de chances de s’en sortir sur le champ de bataille. Le problème, c’est ce trop plein d’informations avec lesquelles il faut jongler. Entre un HUD sur-exploité, l’action parfois difficilement lisible voire même brouillon et les protagonistes qui n’en finissent pas de jacasser durant les combats, on en vient parfois à ne plus savoir où regarder, où aller. La meilleure chose à faire reste alors de passer par les paramètres afin d’alléger l’ATH de façon à n’avoir que les informations qui nous semblent essentielles. Cela permet déjà une meilleure visibilité et une meilleure lecture des éléments à l’écran. Pour ce qui est des dialogues en pleine action, on a finalement choisi de les ignorer, ces derniers n’étant pas très intéressants. Cependant, ce n’est pas la première fois que l’on reproche à un titre d’être bien trop bavard à des moments où l’on nécessite de se focaliser sur ce qui se passe à l’écran. Non pas que l’on ne lui en tienne pas rigueur mais simplement qu’il semble s’agir d’un fait assez commun en ce moment.
Si nous évoquions plus haut les nombreuses possibilités en termes de customisation, il faut savoir qu’elles jouent également énormément dans la jouabilité, puisque l’on peut modifier son arsenal à volonté en fonction des pièces que l’on possède : la tête, les bras, les jambes et le corps seront autant de parties interchangeables qui permettront à la fois de voir l’aspect de l’Arsenal changer, de même que ses caractéristiques, puisque chaque partie d’équipement possède ses propres statistiques. Les possibilités sont assez énormes il faut l’avouer et pour ceux qui n’en auraient pas assez, on peut tout aussi bien toucher à la peinture de son mecha en y appliquant de simples couleurs, des motifs et des revêtements spéciaux tout en y apposant quelques décalcos. À ce niveau-là, on ne peut pas dire que Marvelous ait chômé car il y a largement de quoi personnaliser son engin. Tout se débloque au fur et à mesure des missions complétées, qu’il s’agisse de missions libres ou bien de missions de l’histoire.
Vous en voulez encore ? Et bien sachez que les développeurs ne se sont pas arrêtés là : on peut bien évidemment choisir entre des armes différentes pour équiper l’Arsenal tout en adaptant son style de jeu. Les joueurs préférant le corps à corps s’orienteront donc davantage vers une lame, tandis que les autres pourront préférer un bon vieux Fusil ou une arme laser. Le combat à longue distance est tout à fait envisageable puisque les fusils sniper permettront notamment d’utiliser la lunette afin de viser comme il se doit. Au final, on sent la volonté d’offrir une expérience aussi personnalisée que possible couplée à un certain désir d’en faire le plus possible. Cela se ressent notamment dans les améliorations effectuées depuis le déploiement de la première démo qui fut l’occasion pour les joueurs de pointer du doigt certains problèmes. Si tout n’a pas été réglé depuis, pas mal de petits détails ont évolué, preuve que les développeurs sont à l’écoute des joueurs. Gageons que le jeu sera suivi afin d’éventuellement corriger certaines ombres au tableau que nous avons évoqué.
D’ailleurs, en marge de l’Arsenal, notre personnage peut également être modifié avec de nouvelles capacités qui lui feront monter un niveau à chaque fois qu’il en acquerra une nouvelle. En allant puiser dans les racines du RPG avec des statistiques très détaillées, des compétences qui ne sont pas sans rappeler les habituels arbres de skills et la personnalisation ultra poussée, Marvelous tente d’offrir une pointe de subtilité à son titre. Pour le coup, on ne niera pas que cela est réussi mais on aurait apprécié qu’un système d’XP soit au moins de la partie afin de ne pas se retrouver avec les simples crédits du jeu comme seule et unique monnaie d’échange. Tant et si bien qu’il faudra souvent faire des choix entre l’acquisition d’une nouvelle pièce d’équipement ou d’une nouvelle arme dans la boutique, d’une nouvelle compétence ou encore d’un changement d’apparence simple pour notre héros. Car oui, tout a un prix malheureusement, et s’il est possible de modifier autant de fois que l’on souhaite son protagoniste, il faudra malheureusement se délester de quelques milliers de crédits pour ce faire.
Une exclusivité haute en couleur et en rock
Le véritable problème avec Daemon X Machina, c’est le paradoxe qui l’entoure. On sent l’envie de Marvelous d’offrir aux joueurs un titre qui tranche dans le vif, ne s’encombre pas trop de la narration et la place au second plan pour mettre en avant l’action pure et dure. Sauf qu’il risque de perdre un certain nombre de joueurs au passage avec ses nombreuses subtilités et aurait pu dès lors se débarrasser des trop nombreuses joutes verbales entre les NPC (notre héros ne prenant jamais la parole). L’ensemble n’est pas dénué de bonnes idées, bien au contraire. On sent l’envie d’offrir une expérience personnalisée, avec de nombreuses possibilités mais elles ne prennent pas forcément forme comme il faudrait et l’aspect brouillon des combats ne permet pas d’en profiter au maximum.
Peut-être qu’en étant un peu plus travaillé sur la forme il aurait réellement pu briller en tant qu’exclusivité Switch et digne représentant du jeu de mécha sur la console de Nintendo.
D’autant qu’avec son cel-shading ultra coloré et très saturé, il risque encore moins de récolter les faveurs du grand public. Les textures sont un poil baveuses lorsque la Nintendo Switch est dockée et jouer en mode nomade impliquera un aliasing très prononcé. Daemon X Machina ne risque pas de faire l’unanimité visuellement parlant, d’autant que si les environnements parviennent un peu plus à se renouveler que ce à quoi l’on s’attendait, ils sont malheureusement tous assez vides. On notera tout de même que les effets des explosions sont plutôt réussis dans l’ensemble, de même que les visages des nombreux NPC avec quelques personnages vraiment charismatiques. Dans l’ensemble, le design des mechas suit cette lignée et offre des courbes vraiment stylées. On regretterait presque que la Switch ne puisse d’ailleurs pas mettre plus en avant la direction artistique des différents engins.
Pour aller de pair avec son apparence tout droit sortie d’un anime, Daemon X Machina propose des doublages japonais qui s’avèrent être de bonne facture bien qu’ils soient usants sur le long terme lorsque les conversations ne s’arrêtent plus lors des combats. Heureusement, le titre peut compter sur Rio Hamamoto et Junichi Nakatsuru pour son OST très orientée rock et métal. D’ailleurs, certains reconnaîtront immédiatement la patte artistique de ce dernier qui a composé des thèmes pour l’ensemble des jeux Soul Calibur. Pas étonnant que certaines musiques proposent de véritables passages épiques soulignant l’intensité des combats. Comme quoi, tout n’est pas à jeter dans Daemon X Machina. Loin de là, et bien au contraire même. Peut-être qu’en étant un peu plus travaillé sur la forme, il aurait réellement pu briller en tant qu’exclusivité Switch et digne représentant du jeu de mécha sur la console de Nintendo. Il n’en reste pas moins un titre sympathique, mais sans plus malheureusement.
Verdict : 6/10
Quel dommage que l’aspect scénaristique n’ait pas été plus travaillé ou bien que la carte du jeu d’action n’ait pas été jouée de façon plus franche. De ce fait, Daemon X Machina se noie un peu dans ses missions redondantes que l’on enchaîne sans trop savoir pourquoi. Pour autant, il suffit d’accrocher à son action frénétique et ses combats nerveux pour découvrir un titre dont le gameplay offre de chouettes subtilités. Avec ses innombrables possibilités en termes de customisation et des modes multijoueur en ligne et en local, il y a forcément de quoi s’amuser malgré une réalisation qui n’est pas aussi convaincante qu’on l’aurait souhaité. On se rabattra alors sur son OST de qualité qui n’hésite pas à puiser dans les sous-genres du métal afin d’offrir à l’action la bande-son qu’elle mérite.