Après Bravely Default et Bravely Second: End Layer, la série passe à la vitesse supérieure avec Bravely Default II. Fini la 3DS, place à la Nintendo Switch et à l’Unreal Engine 4. Si c’est bien une suite numérotée, il ne faut pas nécessairement avoir joué aux précédents jeux pour en profiter pleinement car on a un monde et des personnages totalement inédits, façon Final Fantasy. Le changement de support et de moteur graphique permettent-ils à la série d’aller vers de nouveaux horizons ? Vérifiez donc par vous-mêmes, si vous êtes assez braves pour lire ce qui suit.
Test réalisé sur Nintendo Switch grâce à un code numérique fourni par l’éditeur
Clair comme du cristal
Bravely Default II est le troisième jeu de la licence Bravely sur consoles mais contrairement à ce que son nom laisse penser, il n’est pas une suite directe de l’opus qui a débuté les hostilités sur 3DS. En effet, comme aime le faire Square Enix avec la saga Final Fantasy, Bravely Default II met en avant un monde nouveau et des personnages jamais vus auparavant, nul besoin d’être à jour dans l’histoire malgré quelques références et similitudes, ce qui devrait plaire aux nouveaux venus (il y a malgré tout des éléments qui raviront les vieux de la veille mais on n’en dira pas plus). L’action prend place sur le continent d’Excillant, qui contient 5 royaumes qui accordent une importance capitale aux 4 Cristaux élémentaires, non sans raison : ils ont été volés, ce qui provoque bon nombre de malheurs à travers le monde. Cela nous mène à l’arrivée de Seth, jeune marin qui a survécu de peu à un naufrage suite à la perte du Cristal d’eau. Il se fait sauver par Gloria, jeune princesse qui est en quête des Cristaux suite à la disparition de son royaume. Après une mésaventure, ils se font rejoindre par Elvis et Adèle, aventuriers parcourant le monde pour trouver des astérisques, objets octroyant des pouvoirs spéciaux. Grâce à des objectifs qui se rejoignent, les 4 héros décident de former une équipe et de retrouver les astérisques ainsi que les Cristaux pour apporter paix et sérénité à Excillant.
Comme on l’a souligné dans notre preview, le fond de Bravely Default II se veut quelque peu classique, surtout au départ. Après tout, une histoire de cristaux et une troupe qui part à l’aventure pour sauver le monde, on ne peut pas dire que ce soit franchement original. Le début du soft laisse penser que cela va rester assez sobre et manichéen mais heureusement, cela se complexifie avec le temps, sans toutefois en faire trop. On a bien sûr quelques arcs narratifs basiques (bien écrits toutefois), mais il y a tout de même un large panel de situations : complots, traitrises, retournements de situation, tournures plus sombres, quelques moments légers et intimistes, des protagonistes/antagonistes aux motivations variées et pas toujours évidentes… Bravely Default II pioche dans ce qui fait le sel d’un J-RPG typique et le fait assez bien en général. Conventionnel mais efficace, srtout quand il se permet de nous surprendre de temps à autre.
La bande qu’on suit dans Bravely Default II ne manque pas d’attrait et c’est ce qui motive davantage à aller jusqu’au bout de l’aventure. S’ils ont tous un bon fond et se rejoignent sur plusieurs points, chacun possède son petit caractère qui lui est propre, donnant des dialogues qu’on suit avec intérêt. Par exemple, bien qu’il soit noble, le magicien Elvis aime les plaisirs simples et boire un coup dans les tavernes tandis qu’à côté, on a des discussions plus sérieuses et sincères entre Seth et Gloria sur le monde qui les entoure. En dehors des scènes principales, on a de nombreux passages où les héros se parlent entre eux et plus on les connait, plus on s’attache à eux. On n’a peut-être pas des camaraderies dignes de Final Fatansy VII Remake ou Persona 5 Royal mais dans tous les cas, cela fait largement l’affaire.
De plus, on apprécie que certaines quêtes annexes soient vraiment intéressantes d’un point de vue scénaristique, même si les récompenses peuvent être anodines (ça, on y reviendra plus tard). On y apprend souvent davantage sur le passé de tel ou tel personnage, tout en découvrant de nouvelles facettes attendrissantes, drôles ou bouleversantes. Cela rend le monde de Bravely Default II plus vivant et crédible, donc plus immersif. Notre principal regret pour ce qui est de l’histoire, c’est un certain manque de mise en scène et d’expressions faciales de qualité qui nous ramènent tout de suite à la réalité au lieu de pleinement nous scotcher. Dommage, mais pas au point de regretter de prendre un ticket pour une aventure qui, bien qu’elle ne réinvente pratiquement rien, sait se montrer haletante. Heureusement, le gameplay aide aussi.
« Osez la bravoure, vous vaincrez. »
Contrairement aux Final Fantasy qui se modernisent de plus en plus, Bravely Default II joue la carte de la sécurité et propose une jouabilité old school, afin de rendre hommage à ses ainés ainsi qu’aux RPG d’il y a quelques décennies. Cependant, il n’est pas forcément nécessaire de changer une formule qui fonctionne comme il faut entre de bonnes mains, et on constate avec joie que c’est le cas ici, à quelques détails près. Ainsi, on explore Excillant qui est constitué de villes, grandes zones connectées tout en 3D et plusieurs niveaux/donjons. Dans les villes, on peut discuter avec des personnages, se reposer, jouer à un jeu de cartes assez distrayant, accepter des quêtes plus ou moins engageantes, acheter de l’équipement et des objets… Rien de particulièrement spécial, mais cela fait toujours plaisir d’y revenir après un voyage périlleux. Il y a tout de même une fonctionnalité intéressante, bien qu’elle procure des résultats aléatoires : assez rapidement, Seth peut effectuer des expéditions maritimes et cela fonctionne uniquement si la console est hors ligne. Oui, pas besoin de jouer directement pour obtenir quelques récompenses, pas essentiel mais tout de même bienvenu et original.
Pour ce qui est de l’exploration en dehors des villes, c’est du banal, avec une carte du monde qui a des trésors, des ennemis à esquiver/affronter – pas de rencontres aléatoires, on les voit directement sur la carte – et trouvailles à faire lors des quêtes, qui consistent souvent à tuer des monstres spécifiques ou à récolter un objet en particulier. Si certaines missions annexes sont scénarisées et bien ficelées, on a tout de même un petit lot de tâches ingrates qui manquent de distinction et de paies dignes de ce nom, comme lorsqu’une épouse nous demande 3 fois de suite de déposer des choses pour son mari, mari qui se trouve dans un temple infesté de vilaines bestioles, évidemment. Heureusement, on se plait quand même à explorer Excillant grâce à la variété des décors, les quêtes qui se font souvent de manière naturelle et le feeling général des déplacements. On peut tout à fait ignorer les bêtes pour se balader tranquillement et on a même un détail amusant : quand le niveau de l’équipe devient assez élevé, les monstres sont effrayés et nous fuient alors, pratique. On regrette juste que les donjons ne proposent pas de puzzles ou d’agencements particuliers : cela reste des successions de couloirs. Il est possible toutefois de demander au jeu d’afficher un marqueur de destination pour se concentrer sur l’essentiel, à savoir les combats.
Bien qu’un peu différent, le système d’affrontement de Bravely Default II ressemble fortement à celui de ses prédécesseurs, classique là encore, mais avec tout de même quelques subtilités qui font toute la différence. Pour ce qui est du familier, on a donc du tour par tour et plusieurs actions possibles : attaque de base, coups spécifiques de classes, fuite, principe de force/faiblesse, coups ultimes et utilisation d’objets. Là où Bravely Default II tire son épingle du jeu, c’est avec les options Brave et Default. En quoi consiste cela ? Avec Brave, on peut utiliser un personnage plusieurs fois de suite, jusqu’à 4 tours d’un coup, ce qui peut tirer d’un mauvais sort ou causer de gros dégâts à l’ennemi mais si on a pas assez de PB de côté (on en a 0 ou 1 à chaque début de combat, une donnée qui change si on réussit à frapper un monstre avant d’engager la bataille), cela fait des tours en moins par la suite, logique, provoquant alors un gros malus. Heureusement, Default est là pour compenser car grâce à ce dernier, on peut se protéger afin de réduire les dégâts et obtenir un PB de plus, jusqu’à 3 maximum. Le joueur est invité à prendre des risques ou, au contraire, à se montrer plus prudent selon les situations, ce qui donne des luttes stratégiques qui ne manquent pas de piment.
Les classes, ou jobs pour certains, sont également une composante majeure de Bravely Default II et apportent davantage de peps lors des bagarres. Grâce aux astérisques que l’on obtient au fil de l’aventure, on peut activer 2 classes par personnage, de quoi faire des combinaisons qui se complètent. Chaque classe a ses avantages et inconvénients par rapport aux caractéristiques (santé, poids qu’on peut porter, efficacité des armes, etc.), à vous de voir ce qui convient le mieux. Le plus alléchant, c’est que cela offre des options spéciales lors des combats et de plusieurs choix pour venir à bout de nombreux défis qui attendent nos valeureux héros. Tout citer prendrait un temps fou mais voyez plutôt ce que ça peut donner : avec la classe Dompteur, on peut capturer un monstre affaibli et le lâcher sur un ennemi, avec des attaques dédiées à cela. Le Mage blanc, lui, n’a pas de grande offensive mais il est d’une grande aide pour ses alliés grâce à plusieurs magies de soin et de résistance. Il y a même une classe Voleur qui porte bien son nom, permettant de voler les adversaires de diverses façons et procurant une grande vitesse. De nombreuses classes sont de la partie et elles multiplient les tactiques imaginables ainsi que le plaisir de jeu.
Seulement, un bon système de combat peut vite être ruiné à cause d’une IA soit trop gentille, soit cruelle, comme l’ont remarqué les joueurs lors des démos de Bravely Default II. Dans le jeu final, pas de panique, c’est assez juste en général, et on a plusieurs modes de difficultés. Au commencement, on peut se sentir faible face aux ennemis qui ont beaucoup de points de vie ainsi qu’aux boss qui font durer les affrontements durant un bon laps de temps (même si on peut accélérer le temps) mais plus on avance, plus on gagne en puissance et en possibilités. Hélas, ce n’est pas toujours la joie : il y a bien quelques boss infernaux qui peuvent tout chambouler en à peine quelques secondes car comme les héros et les ennemis de base, ils peuvent également utiliser Brave et Default. Certes, cette donne ajoute du challenge et du stress, mais lorsque toute une équipe se fait endormir sans qu’on puisse faire quoi que ce soit puis massacrer en quelques coups, après 20 minutes d’acharnement, la colère peut vite monter. En outre, quand certains boss sont accompagnés, ont beaucoup de défense et des sorts de soin redoutables, c’est redondant et frustrant. En général, on n’a pas trop de farm (montée de niveaux pour les novices) à faire si on prend le temps de défier la majorité des ennemis sur le chemin, mais il y a bien quelques passages où il est imposé, afin d’espérer venir à bout d’un boss tenace et injuste sur les bords. Cela casse quelque peu le rythme du soft mais on a tout de même quelques options qui permettent d’enchainer les combats et monter de niveaux plus rapidement, même si les possibilités des précédents épisodes étaients plus intéressantes. Au final, l’expérience Bravely Default II reste largement satisfaisante grâce à une balance adéquate entre histoire intéressante, exploration qui fait le travail et combats décidément grisants, de quoi déguster avec délectation les dizaines heures requises (tout dépend de votre rythme mais il faut facilement plus de 40 heures) pour en voir le bout.
Life in plastic, it’s fantastic
Quand on passe de la 3DS à la Nintendo Switch, on s’attend à une évolution digne de ce nom, chose qu’on espérait avec Bravely Default II qui utilise en plus le fameux moteur graphique Unreal Engine 4, ayant fait ses preuves à de multiples reprises. Il y a tout de même un aspect du titre qui fait débat et qui déroute quelque peu : le rendu des personnages et leurs animations. En effet, Square Enix et Claytechworks ont décidé de garder un design chibi tout en apportant davantage de réalisme, donnant une allure de poupées plastiques/sculptures de pâtes à modeler aux héros et à ceux qu’ils rencontrent. Sur certains, cela fonctionne plutôt bien mais sur d’autres, ce n’est pas vraiment le cas, les laissant paraître plus ridicules qu’ils ne le sont vraiment. On aurait aimé voir un style davantage similaire aux artworks, où on voit des proportions réalistes et des effets crayonnés du plus bel effet. De plus, la majorité des dialogues ont une mise en scène à l’ancienne, avec les personnages se parlant côte à côte et bougeant peu, tout en ayant un faible nombre d’animations faciales. Certes, pour le côté old school, c’est réussi, mais cela gâche tout de même un peu certaines scènes qui auraient pu procurer de plus amples émotions. Il y a tout de même quelques cinématiques plus élégantes, mais ne vous attendez pas non plus à vous en prendre plein les mirettes.
En dehors de cela, Bravely Default II se montre séduisant la majeure partie du temps. Les lieux que l’on traverse sont un régal : on passe d’une ville dans le désert envahie par l’eau à une autre où de nombreux arbres ont poussé, tout en explorant une prairie donnant sur la mer, des manoirs lugubres, des laboratoires tantôt magiques, tantôt sordides… Voyage, voyage ! Les graphismes démontrent également le savoir-faire habituel de Square Enix : on a des décors en 3D de bonne facture avec des textures appréciables (tout de même une ou deux un peu baveuses, mais rien de bien grave) et effets soignés, tout en ayant des détails bien vus comme le sable qui bouge au gré du vent dans le désert ainsi qu’un flou qui donne une allure maquette à l’ensemble. Mention spéciale aux villes de Bravely Default II, avec des textures dessinées à la main et une direction artistique du feu d’Ifrit, ébahissement assuré. On a même plusieurs costumes selon les classes mais si vous souhaitez gardez ceux de départ, c’est possible. Enfin, les monstres sont également réussis et on a de jolis effets lors des combats. Dans l’ensemble, ce Bravely Default II exploite bien la Nintendo Switch et se montre assez fluide/net autant en mode docké qu’en mode portable, en dehors d’un léger aliasing et de quelques baisses de framerate. C’est mignon mais on pouvait tout de même avoir mieux, notamment en ce qui concerne les personnages et la mise en scène.
Pour finir, on s’incline devant la splendide bande-son de Bravely Default II, que l’on doit à des musiciens de talent, notamment Revo, responsable des musiques du premier jeu et de certaines partitions de l’anime L’Attaque des Titans/Shingeki no Kyojin. Bien que l’on ait des morceaux qui se répètent sans arrêt (on entend souvent les mêmes pour les affrontements), on est directement plongés dans l’ambiance grâce à un savant mélange entre sonorités épiques, bucoliques, et on en passe. Chaque lieu a sa propre atmosphère musicale et les partitions sont toutes harmonieuses, de nombreux airs vont vous rester dans la tête des jours durant et l’adrénaline monte vite durant les combats. Bref, un sans-faute. Quant aux voix, on a le choix entre de l’anglais bien britannique comme il faut (au vu de l’aspect du monde et de ses habitants, cela colle bien, mais certaines prestations sont un peu exagérées ou en deçà) ou du japonais avec des acteurs plus ou moins connus du milieu, ce qui donne un résultat honorable.
Verdict : 8/10
Bravely Default II s’impose facilement comme l’un des meilleurs RPG de la Nintendo Switch. Bien qu’il ne soit pas exempt de Defau… défauts, pardon. Spécialement un aspect old school qui ne joue pas toujours en sa faveur, la production de Square Enix et de Claytechworks présente un fabuleux monde à explorer, des combats stratégiques qui raviront sans peine les amateurs du tour par tour ainsi que des musiques grandioses. Avec plus d’ambition et peut-être un brin de singularité supplémentaire, on aurait pu obtenir un grand titre mais en l’état, il est plus que satisfaisant. N’hésitez pas et bravez les dangers car le voyage à Excillant vaut largement le détour.
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