Beyond Good & Evil est un peu la madeleine de Proust du studio Ubisoft, car sa suite se fait attendre depuis presque 7 ans, si l’on ne prend pas en compte sa toute première bande-annonce de 2008, The Pig. Ainsi, pour nous faire patienter et raviver la flamme des fans en haleine, ou même attirer de nouvelles personnes dans l’univers d’une reporter et de son ami mécanicien, Ubisoft sort Beyond Good & Evil: 20th Anniversary Edition, faisant d’elle le second remaster du jeu. Alors, est-ce un portage nécessaire pour le monde vidéoludique ou plutôt un ultime coup de désespoir pour garder l’attention des quelques fans attendant toujours la suite ? Il est temps de sortir notre appareil photo et de mener l’enquête.
Test réalisé sur Nintendo Switch grâce à une version numérique fournie par l’éditeur
Au-delà du bien… et du mal
Avant de vous donner notre avis sur cette nouvelle version de Beyond Good & Evil (BGE), nous vous proposons un petit rappel de ce qu’est BGE. Sorti pour la toute première fois en 2003 sur PlayStation 2, Xbox, GameCube et PC, Beyond Good & Evil vous met dans la peau de Jade, reporter indépendante, alors que votre planète se fait attaquer par des extraterrestres, les DomZ. Alors que le gouvernement local, les sections Alpha, semble faire de la figuration plus que de la protection du peuple, Jade se fait enrôler dans un mystérieux groupe de résistants, le réseau IRIS, pour combattre cette propagande grandissante et chercher à tout prix à connaître les agissements des sections Alpha. Heureusement, votre « oncle » Pey’j vous accompagnera tout au long de votre aventure et fera office de petite conscience face aux nombreux risques que vous prendrez. Au fil de votre exploration, vous constaterez que les sections Alpha paraissent loin d’être ce qu’elles prétendent et vous vous envolerez vers la lune pour mettre au clair toute cette histoire.
Malgré son âge, le scénario reste assez intéressant et profond pour nous tenir en haleine jusqu’à la fin du jeu, qui se complète en une petite dizaine d’heures pour les nouveaux venus, et en seulement 4 heures pour les habitués. Cette dernière information n’est pas à négliger, mais nous y reviendrons un peu plus tard. Ainsi, Beyond Good & Evil avait reçu de nombreux éloges lors de sa sortie, avec un excellent 18/20 et un score de 86/100 sur Metacritic. Cette note témoigne de l’impact scénaristique et du gameplay qu’a eu le jeu à l’époque de sa sortie, et encore un peu après. Cependant, avec l’arrivée de la mouture 20th Anniversary Edition, cette note risque de changer, car les profils de joueurs ont évolué et cette édition semble s’adresser davantage aux nostalgiques.
Alors que nous étions en train d’écrire ces lignes, nous avons appris que la version HD de Beyond Good & Evil, premier remaster d’Ubisoft pour la PS3, Xbox 360 et PC, a été retirée des stores pour être remplacée par la nouvelle version Anniversary. Un changement un peu brutal, qui permettait de faire des économies, mais qui peut se comprendre dans la communication d’Ubisoft pour éviter de perdre les nouveaux arrivants.
Un brin de nostalgie
Vous l’aurez compris, cette 20th Anniversary Edition est un remaster en bonne et due forme, à la manière de la version HD de 2011. Toutefois, il est à noter que là où la version HD venait peaufiner la résolution des textures et réarranger la bande-son, l’édition anniversaire va plus loin sur le côté du rendu en venant retravailler les modèles 3D et la lumière du jeu, s’approchant d’un style cell shading du plus bel effet. Ayant reçu le jeu sur la console portable de chez Nintendo, et faisant ainsi honneur à la GameCube, jouer à BGE en version nomade est pour nous la meilleure configuration pour profiter pleinement du titre. En effet, de nombreux points de sauvegarde étaient déjà présents à l’époque, ce qui permet aujourd’hui de commencer une partie au niveau de notre canapé, puis de prendre les transports et terminer notre session sur le chemin du retour sans s’être pris la tête pour sauvegarder. Car la sauvegarde fait partie intégrante d’un gameplay qui, malgré tout, a plus ou moins bien vieilli. De plus, l’ajout de la sauvegarde automatique et de la sauvegarde croisée entre les plateformes grâce à Ubisoft Connect facilite ce côté nomade.
Côté gameplay, on retrouve quelque chose d’assez instinctif avec l’utilisation des joysticks pour déplacer Jade, les touches A, B, X, Y pour effectuer des actions et les gâchettes L, R, LR et ZR pour d’autres. Malheureusement, les soucis peuvent arriver quant à la disposition des touches, qui peut parfois être étonnante, surtout lorsque la majeure partie du gameplay consiste à prendre en photo de nombreuses créatures. Il n’est pas possible de modifier ces mêmes touches, à part la possibilité de passer aux commandes remaster ou originales. Un point qui aurait pu être intéressant à développer aurait été l’utilisation du gyroscope, présent avec la Switch, lors de l’utilisation de cet appareil photo. On se contentera ici de le déplacer à l’ancienne avec un joystick, même si on peut comprendre qu’il aurait été difficile de développer une version bien différente de celle sur console et PC en un temps si court. Côté prise en main, on ressent une légère lourdeur de la caméra et de notre personnage, ainsi qu’une imprécision des coups lors des combats, inhérente à l’époque, ce qui pourra en frustrer plus d’un lorsque vous taperez malencontreusement Pey’j et que celui-ci se plaindra.
Une époque qui se ressent aussi dans les dialogues, même si Ubisoft a pris le soin de réaliser un message d’information lors du premier lancement du jeu concernant ces mêmes propos et la représentation caricaturale de certaines cultures. Un choix de ne pas modifier les dialogues respectables, ne dénaturant pas des personnages iconiques comme Secundo ou encore les rhinos de Mamago Service, ayant des accents fortement prononcés. Ainsi, on peut profiter de la voix de nombreux comédiens qui, à l’époque, avaient réalisé un travail gigantesque. Mais là où on retrouve un super travail de voix, côté mixage sonore, ce n’est pas toujours au top. La musique ou les effets sonores passent parfois au-dessus des dialogues, un problème déjà présent dans la version d’origine qui aurait pu être corrigé dans ce remaster, nous poussant alors à rentrer dans les paramètres et à baisser légèrement le son de la musique.
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Mais là où le jeu reste le même dans sa structure, cette version anniversaire apporte plusieurs petites nouveautés plutôt bienvenues pour les fans de la première heure ayant connu sa version GameCube. Ainsi, outre les graphismes qui, sur PC et les consoles de dernière génération, peuvent avoir une résolution en 4K stable à 60 images par seconde, cette nouvelle édition propose une section « bonus » avec une partie dédiée à une galerie d’images anniversaire. Lorsqu’on explore cette partie, nous pouvons y découvrir différents artworks allant de la phase de conception, de préproduction, de production et même des images dédiées au lancement (une partie très intéressante à tel point que l’on retrouve des plannings de publications et de productions). Une véritable mine d’or pour les artistes en herbe, les enquêteurs du dimanche ou encore les étudiants en école de jeux vidéo qui trouveront de nombreux documents intéressants, mais aussi des vidéos, retraçant l’évolution du jeu dans le temps ou encore présentant des niveaux abandonnés, mais pourtant fonctionnels. Vous l’aurez compris, la force de cette édition anniversaire réside aussi dans ces bonus qui, si on la compare à d’autres jeux du même genre ayant reçu un traitement d’anniversaire, proposent énormément de contenu dans son histoire.
Côté histoire, ou plutôt du petit ajout qui fait chaud au cœur, la chasse au trésor permet de connaître un peu plus l’enfance de Jade et son lien avec ce qui deviendra la suite de ses aventures. De plus, cette même chasse au trésor permettra de débloquer des cosmétiques in-game comme un changement d’apparence pour Jade ou Pey’j, ou encore de votre fidèle appareil photo. Vous l’aurez compris, au-delà de faire appel à la nostalgie, cette version Anniversaire sera aussi le point d’orgue pour fournir aux futurs explorateurs de Beyond Good & Evil 2 de bien se préparer à comprendre les différents enjeux de cette galaxie. Comprendre qui sont les personnages, leurs motivations, mais surtout se familiariser avec son humour parfois un peu forcé, mais qui fait toujours mouche. Si nous devions quand même finir sur une note mitigée, ce serait du point de vue de l’optimisation sur la Switch qui peine temps en temps à suivre la cadence lors de cinématiques, offrant des moments un peu saccadés.
Verdict : 8/10
Ubisoft offre ici une lettre d’amour pour les nostalgiques de Beyond Good & Evil premier du nom, grâce à sa réalisation d’une grande qualité ainsi que l’ajout d’un nouveau mode de jeu qui permet d’en apprendre un peu plus sur le passé de l’héroïne. Que vous soyez novice de cet univers, ou vieux de la vieille, découvrir ou redécouvrir Hillys est un véritable plaisir tant le jeu n’a pas pris une ride, que cela soit dans son écriture, ses personnages ou encore sa bande-son restant de très bonnes factures. On notera parfois des petits détails témoignant du passage du temps, que cela soit dans son gameplay parfois rigide, de ses nombreuses caricatures ou encore de la gestion de certaines cinématiques difficilement optimisées. On ne passera pas non plus à côté du choix d’Ubisoft de supprimer des stores les versions originales et HD qui auraient permis de réaliser pas mal d’économies. Mais tous ces détails ne sont rien comparés à cette sensation du retour à l’âge d’or du jeu vidéo. Une époque où les jeux étaient fun, bien construits, nous présentait des personnages attachants et où tout était encore à faire en termes d’univers et d’histoire. Ainsi, Beyond Good & Evil: 20th Anniversary Edition est un superbe cadeau à offrir ou à s’offrir, tant son prix reste minime (19.99 au lancement) pour un jeu aussi grandiose que lui et permettant d’attendre patiemment de nouvelles informations concernant sa suite. À se procurer sans hésitation.
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