Ubisoft est connu pour son travail d’application sur ses licences. Assassin’s Creed, Watch Dogs ou encore les pans Tom Clancy’s, ont, et cela quoique nous puissions niaiser, une tâche de fond considérable. Si ce travail est constant, il ne l’est pas forcément dans sa forme, offrant ainsi des épisodes, en fonction des licences, en dents de scie. Acquît en 2007 par un rachat, la licence Anno vient à s’extirper de ce résultat. Depuis le premier épisode édité par Ubisoft, Anno 1404, la série est restée au beau fixe, faisant ainsi la joie des fans de gestion et de stratégie en temps réel. Mais, car il y a toujours un mais, depuis l’épisode Anno 2205, un mystérieux Mal vient frapper la licence. Un Mal si terrible, que nous lui ajoutons une majuscule pour le personnifier. À sa simple prononciation, il est capable de réduire en terreur le joueur PC, allant même jusqu’à le faire douter de sa machine.
Test réalisé sur PC grâce à une copie numérique envoyée par l’éditeur
Les efforts de la campagne.
Comme à son habitude, nouvel épisode, nouvelle époque. Si les deux derniers opus nous ont fait entrevoir le futur, Anno 1800 revient sur ce qu’il maîtrise le mieux, à savoir les dates antérieures. Bien que généralement anecdotique, voir carrément absente, la narration est l’un des points particulièrement travaillés de cet opus. Offrant une histoire divisée en quatre chapitres, elle est un dérivé du mode sandbox, en appuyant sur la narration. Alors bien entendu, la campagne fait plus office d’un très gros tutoriel, que d’une véritable campagne. Cependant le speech de base est intéressant et peut tenir en haleine. L’histoire vous renvoie donc en 1800. Pendant que vous coulez des jours heureux dans le Nouveau Monde, vous recevez une lettre de votre sœur qui vous intime l’ordre de revenir au pays. Votre père est accusé de haute trahison. Bon frère et fils que vous êtes, vous retournez au pays. À votre arrivée, vous retrouvez votre sœur qui vous apprend que votre père est mort en prison. Et, si ce malheur ne suffisait pas, votre oncle décide de reprendre les rênes de Goode & Sons. Une société que votre père a fait prospérer et rendue richissime. Pourquoi et comment votre père est-il mort ? Pourquoi votre oncle vient-il à récupérer la société ? Ce sont autant de réponses qui vous seront révélées pendant cette campagne.
Bien qu’il soit plus un tutoriel qu’autre chose, des efforts ont réellement été effectués pour rendre la trame narrative attractive. Dans un premier temps, cet opus vient rapporter les cinématiques utilisant le moteur du jeu. Effectivement absent dans les deux derniers jeux, ce retour apporte un véritable plus pour la figuration des événements, ainsi que leurs mises en scène. Également, l’intégralité des dialogues est doublée en français, et le soft offre toujours une fenêtre portrait afin de bien identifier le ou les personnages parlants. Comme nous l’avons expliqué, la campagne est un dérivé du mode sandbox, permettant aux joueurs beaucoup plus de liberté qu’une campagne classique (de la série Anno). Ainsi, vous pourrez choisir un personnage qui jouera plus le rôle de portrait qu’autre chose. Mais surtout vos options de départ, qui viendront former la difficulté de votre aventure. Ainsi, il sera possible de choisir parmi trois difficultés pré-réglés, ou bien de faire vous même votre difficulté, en choisissant vos conditions de victoire, l’intensivité des accidents, la taille des îles etc. Un système déjà présent dans les opus précédents, et se retrouve ici toujours aussi fourni. Bien que l’histoire n’offre aucun choix, et s’avère dont être linéaire, vous pourrez sélectionner vos opposants, en plus de ceux imposés par l’épopée, sans que cela n’interfère avec la trame.
Des ajouts bienvenus !
Évoluer sans chambouler un tout est un exercice extrêmement périlleux. Il faut à la fois plaire à son public, tout en charmant un nouveau. Or, quand cela opère, nous observons une mutation significative de la franchise. Autant le dire maintenant, Blue-Byte offre un opus encore plus profond, sans véritablement toucher au cœur du gameplay, tout en imposant de nouvelles mécaniques. Un authentique travail d’orfèvre qui vient marquer son temps. Alors oui, les fonctionnements de base sont toujours présents. Pour rappel, Anno propose à ses joueurs d’incarner un magnat des finances qui se lance dans la construction d’une ville. Cependant la particularité de la série vient du fait que le joueur n’est pas seul : plusieurs îles sont disponibles, à lui de choisir l’une d’elles aux caractéristiques propres, et de laisser l’IA faire de même. Chaque île propose des ressources indispensables pour faire évoluer sa colonie. Toute l’intelligence du gameplay provient de ce postulat : satisfaire les besoins de vos citoyens, qui deviendront de plus en plus pointilleux au fil de leur montée sociale, obligeant ainsi le joueur à conclure des alliances, ou des accords commerciaux, des guerres, ou simplement de coloniser plus d’îles.
À titre d’exemple, en début de partie, vos citoyens seront classés comme des fermiers. Ces derniers n’ayant besoin uniquement d’un peu d’eau-de-vie et de vêtements. Pour ce faire, il faudra donc créer une ferme faisant pousser des pommes de terre, ainsi qu’une distillerie pour produire l’alcool. Une fois cette productivité en place, elle fera automatiquement grimper la joie chez vos paysans. Ces derniers assez heureux, vous pourrez décider de les faire évoluer au rang de citoyen, payant ainsi plus d’impôt, rapportant donc plus d’argent à votre économie. Cette classe sociale apportera également de nouveaux besoins, plus compliqués à satisfaire, en plus de ceux cités plus tôt. Tout l’objectif est donc de réussir à garder un équilibre entre l’évolution de sa ville, liée aux besoins et l’économie générale de l’île. Si de prime abord cela peut sembler compliqué, le schéma utilisé se montre ludique dès les premières minutes, ne laissant ainsi pas sur le côté de possibles nouveaux joueurs.
Bien entendu, de très grosses nouveautés approfondissent ce gameplay déjà bien maîtrisé par le studio. Anno 1800 implante la force de travail, ce qui se traduit par l’obligation de fournir une main-d’oeuvre constante. Comme nous l’avons vu, chaque classe sociale vient à avoir des besoins spécifiques qui restent au passage d’un niveau supérieur. Or si le besoin reste, la force de travail elle évoluera; ainsi si vingt citoyens deviennent vingt artisans, ces derniers n’occuperont plus la force de travail citoyen, mais artisan. Cela pousse le joueur à étendre sa cité, afin d’avoir toujours le nombre adéquat de travailleurs, tout en créant de nouvelles habitations pour attirer toujours plus de monde. Il est donc important de veiller à préparer ses évolutions, car dans Anno 1800 c’est vous qui choisissez quelle maison va évoluer. Pour ce faire, une seconde nouveauté vient aider les joueurs à se préparer : le mode architecture. Ce mode permet de placer virtuellement des bâtiments sans coûts, la prochaine étape de l’évolution de sa cité. Une fois placé, un simple clic permet de lancer la construction. Pratique et simple d’utilisation.
Nouveauté majeure : la division des cartes. Si depuis toujours Anno utilise la même carte pour signifier ses différents biomes, Anno 1800 vient rompre avec ça en offrant plusieurs cartes. Deux précisément, l’une étant nommée l’Ancien Monde est où vous débuterez, l’autre étant le « Nouveau Monde » qui offre un biome tropical. Ce monde vous permettra de fournir à vos habitants, toujours plus de besoins, souvent liés aux classes plus élevées. Ainsi, pour satisfaire les besoins en Rhum, vous devrez partir à la conquête du Nouveau Monde, y créer une colonie, et enfin y implanter toute l’architecture de production que nous avons déjà expliqué plus haut. Les colonies du Nouveau Monde fonctionnent de la même manière que celles de l’Ancien Monde, à la différence de n’avoir qu’une seule et unique évolution sociale. Les expéditions, nouveauté également, viennent à proposer aux joueurs la possibilité de partir en excursion pour gagner des objets. Distribués aléatoirement, vous devrez attribuer un bateau, ainsi que des ressources à ce dernier pour qu’il mène à bien son voyage. Attention cependant, il faudra faire les bons choix pour ramener à bien les fruits de votre expédition.
Enfin, énième nouveauté, mais pas des moindres, l’attrait de votre ville. Votre ville principale doit être belle, ceci est maintenant un atout considérable dans la progression de cette dernière. Effectivement, un indice d’influence fait son apparition. Cette influence vient à se gagner de différentes manières, par vos forces armées, la culture disponible dans votre ville (à noter l’arrivée du zoo, ainsi que du musée, le tout ayant des pièces/animaux à trouver pour embellir), par vos citoyens, etc. Elle vous permettra entre autres de pouvoir modifier le journal à votre avantage, ou bien d’acheter des améliorations spécifiques dans différents domaines. Oui, un journal sera également à votre disposition, ce dernier reléguant les informations de votre compagnie. Il vient jouer un rôle majeur, en apportant ou retirant du bonheur à vos habitants. Libre à vous de tronquer les informations compromettantes. Une explosion dans une usine ? Remplacez l’article par l’annonce d’un nouvel animal dans votre zoo, c’est toujours plus gai.
Des Nouveaux ?
Véritable once du passé, Anno 1800 vient à renouer avec la direction qui l’a fait connaître. Cependant nous y perdons un peu au change. Il semblerait que le moteur de l’épisode 2205 soit laissé à l’abandon pour retourner sur celui de ses aînés. C’est donc avec de certains regrets que nous observons l’absence d’un cycle jour/nuit, ainsi que la fin des structures monumentales, pour retourner sur des bâtiments plus petits. Mais le retour des couleurs vives, vient enjoliver le tout, laissant le jeu, visuellement parlant, plus qu’agréable à l’oeil. Nous noterons également l’amélioration de la vie au sol. Les citadins sont toujours plus nombreux, donnant une impression de vie active. Les modèles 3D sont également assez détaillés et animés, pour aider à ce sentiment. Dans un aspect général, le soft tourne très bien sur différentes machines. Sans avoir poussé trop loin le bouchon, nous avons pour ce test, joué sur une GTX 980 avec un i5 6600 et 8Go de RAM permettent amplement de le faire tourner en ultra 1080p. Cependant, l’utilisation de DENUVO vient créer plusieurs problèmes dérangeants. De base, ce DRM a la fâcheuse tendance à alourdir les temps de chargement, or, souvenez-vous nous avons vu que le jeu se déroule sur deux cartes différentes. Du coup, les allées et retours sont parfois d’une durée conséquente, ce qui peut couper le plaisir de jeu. Alors oui, installer le jeu sur SSD vient à diminuer les chargements, mais malgré tout cela reste un poil long et très dérangeant quand cela vient à impacter le gameplay.
Du côté de l’ambiance sonore, le travail est toujours aussi admirable. Les sons ambiants sont assez détaillés et agréables à l’oreille, et ne rentrent pas dans une cacophonie quelconque. Nous soulignerons le fait que vos villageois parlent français, aidant donc à l’immersion. L’originale bande sonore (ça claque moins d’un coup) est également très agréable à l’écoute. L’utilisation dominante d’instrument à cordes, singulièrement pour le violon et le piano, offre des airs alanguis d’une époque révolue. Mais également est capable de passer du coq à l’âne, avec cette même famille d’instruments, des envolées d’exploration, ou combatives. Nous regretterons le côté parfois disproportionné de la chose, il n’est pas rare qu’un incendie déclenche un chœur aux cuivres hurlants, lourds et cinglants pour (trop) dramatiser la chose.
Gaspar Corte-Real
Proposant trois modes de jeu, à savoir campagne, bac à sable et multijoueur, ces trois derniers tournent autour d’une même roue de gameplay. Cela vient à sous-entendre qu’une fois la boucle de gameplay découverte, vous n’aurez plus grand-chose à y faire. Cependant le soft gagne en rejouabilité, en offrant la possibilité au joueur de se fixer ses objectifs finaux et de les atteindre comme il l’entend. À titre d’exemple, nous avons passé une vingtaine d’heures afin de pouvoir découvrir la globalité du soft. Des objectifs précis en mode compagne pourront également vous débloquer des éléments cosmétiques, encourageant, à son niveau, la rejouabilité. Bien entendu, nous sommes sur un jeu Ubisoft. Étant donné cette gouverne, vous pourrez dépenser des points provenant du Club Ubi, ainsi qu’en gagner pour débloquer toujours plus d’objets esthétiques.
Les chroniques d’Anno est le journal qui vient signaler les moments forts. A vous de laisser, ou non, les articles choisie par le chef rédac’.
Verdict 8/10
Énième cloche d’un carillon qui s’accorde à la perfection. Anno 1800 est l’épisode de plus qui ajoute une véritable plus-value à la série. Sans déranger à ses origines, Blue-Byte Ubisoft a su ajouter des possibilités, sans alourdir le gameplay. Lui permettant ainsi de garder sous son charme les joueurs qui répondent présents depuis maintenant de nombreuses années, tout en allant glaner de nouveaux joueurs. Oui, Anno 1800 est une véritable réussite sur quasiment tous les plans, sauf un : ce Denuvo qui vient empâter le jeu de façon complètement inutile. Dommage de passer si près d’une quasi-perfection, simplement pour protéger, temporairement, une réalisation.
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