Depuis l’arrivée de la PS4, nous avons pu constater une recrudescence de jeux indépendants sortis un peu de nulle part, et qui constituent parfois d’excellentes surprises. Il faut dire que le constructeur japonais souhaitait permettre aux développeurs indé’ de mettre en avant leurs jeux sur le PlayStation Store, afin d’offrir une véritable diversité aux joueurs. Et si l’on est encore très loin de l’éclectisme d’un catalogue comme celui de Steam, cette démarche nous a offert des petites pépites exclusives aux consoles PlayStation, comme c’est ici le cas avec Alone With You, véritable représentant d’un genre très prisé au Japon et encore trop mésestimé en Occident.
Seul au monde
Tandis que certains développeurs préfèrent mettre en avant un gameplay approfondi et fouillé, d’autres souhaitent orienter leurs oeuvres vers quelque chose de plus narratif. C’est le cas de Benjamin Rivers, le père de Home (pour ne citer que ce titre), une aventure horrifique tout en pixel art sortie l’année dernière sur PS4, PS VITA, iOS, PC et Mac. Et visiblement, le monsieur semble très à l’aise dans ce genre puisqu’il a continué dans sa lancée avec Alone With You. Le jeu étant défini lui même comme une aventure romantique de science-fiction. Le mélange peut sembler un brin étrange, mais prend forme de façon très pertinente, le tout avec un univers post apocalyptique comme toile de fond.
En tant que dernier survivant d’une équipe de terra-formation envoyée sur une planète hostile, notre but est de réparer le vaisseau qui nous permettra éventuellement de rejoindre l’humanité. Mais pour cela, il va falloir trouver différentes pièces détachées et faire appel au savoir des membres de l’équipage ayant péri. Et là se pose la question fatidique « Mais comment obtenir des réponses de la part de cadavres ? ». Tout simplement en interrogeant leurs hologrammes voyons ! D’accord, la réponse peut sembler un peu abrupte, mais après tout, nous sommes dans un jeu bercé par les plus grandes oeuvres de la science-fiction, alors il n’y a rien de vraiment étonnant à cela. Ce sont donc les hologrammes de quatre membres du personnel de l’équipage qui seront à notre disposition pour nous aider au fur et à mesures de nos recherches.
Si le postulat de base vous laisse perplexe, vous n’êtes pas au bout de vos surprises. Car tout au long de l’aventure, on est amené à échanger avec ces protagonistes. Alors certes, ils ne sont pas vraiment des personnages à proprement parler, mais on peut clairement les considérer comme tels, d’autant qu’ils sont le pilier de l’oeuvre de Benjamin Rivers. On pourrait tout à fait découper le jeu en deux parties distinctes, à savoir les phases d’exploration qui se déroulent en journée et les phases narratives à base de longs dialogues qui prennent place une fois la nuit tombée. En réalité, tout ce qui se passe durant la journée n’est qu’un prétexte pour retourner discuter longuement avec les hologrammes. Et si les premiers échanges, tout à fait cordiaux, n’ont pour unique sujet nos découvertes, on va très vite tisser des liens avec ces 4 personnalités. Précisons malgré tout que le jeu ne dispose aucunement de traduction française et qu’il est actuellement disponible uniquement en anglais. Et il faudra malheureusement une bonne maitrise de la langue de Shakespeare pour apprécier la plus grande qualité du jeu.
Almost human
Il est fascinant de constater à quel point on finit par s’attacher à ces représentations holographiques d’ex-membres de l’équipage. On finit d’ailleurs par accorder plus d’importance à la relation que l’on développe avec eux que par notre mission principale qui consiste à rejoindre l’humanité par tous les moyens. Cela est peut-être du au fait que l’on incarne un personnage auquel on s’identifie indubitablement, puisqu’il porte sans cesse son casque, le protégeant des pluies acides et autres menaces de l’éco-système d’une planète sur le déclin. Le fait de lui attribuer notre propre nom renforce cela. Par ce biais, les hologrammes des membres de l’équipage s’adressent directement au joueur et font appel à sa sensibilité, ses émotions. Cela en deviendrait presque troublant.
Si Alone With You crée un véritable sentiment de solitude durant les phases d’exploration, accentué par des environnements délabrés où la mort et l’insanité règnent en maîtres, c’est pour avant tout rappeler au joueur qu’au final, il est le seul être humain ici présent. L’IA qui nous accompagne tout au long de l’aventure permet de briser la monotonie de nos recherches, et ses interventions seront souvent l’occasion de sonder le joueur à travers des questions somme toute basiques. Pour autant, elle représente la seule présence amicale, se souciant de notre bien être et de notre survie.
Il faut reconnaître que Benjamin Rivers maitrise parfaitement la narration, donnant ainsi naissance à de véritables relations, parfois ambigües. On aurait parfois aimé un peu plus de choix dans les possibilités qui nous sont offertes pour répondre à nos interlocuteurs, mais en dehors de cela, on ne peut que saluer le talent du créateur. L’histoire se révèle petit à petit, au fur et à mesure de nos recherches et la façon dont sont distillés les éléments du scénario, à travers des bribes de journal et autres objets trouvés, offre une progression quasi-constante. La douzaine de missions à résoudre nous mettra face à quelques énigmes et puzzles n’offrant aucun réel challenge mais l’intérêt n’est clairement pas ici. Il serait en effet dommage de corser l’avancement des joueurs quand cette dernière se veut justement la plus fluide possible afin de conserver une narration cohérente.
Dans son esthétique comme dans sa bande-son, Alone With You se pare d’une délicieuse robe rétro dont on se délecte sans aucune retenue. Les quelques animations qui viendront ponctuer les passages d’une pièce à une autre, les quelques panoramas ou encore les plans mettant en scène les dialogues sont les témoins d’un pixel art au top de sa forme, avec une palette de couleurs très épurée et des tons pastels agréables à l’oeil. Benjamin Rivers s’est entouré de Ivor Stines afin de réaliser la bande son de son jeu et le résultat concorde parfaitement. Très planante, jamais envahissante, elle relève, certes, plus de la musique d’ambiance typiquement SF qu’autre chose. Mais c’est justement ça que l’on aime dans Alone With You. La pertinence de son univers mystérieux donnant un charme fou à son background dans lequel nos conversations prennent vie. Enfin artificiellement, parce que, quels que soient les liens que vous tisserez avec les hologrammes, n’oubliez jamais que vous êtes seul.
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