C’est à l’occasion de l’Evolution Championship Series 2019 (EVO), soit deux ans après la dernière mise à jour de Guilty Gear Xrd, que la franchise nous revenait sans véritablement crier gare. Même si l’annonce d’une nouvelle mouture de Guilty Gear avait été partagée, beaucoup s’attendaient à un possible retour de la licence Persona avec un éventuel Persona Arena qui aurait tourné autour de l’épisode Persona 5. À la surprise générale, Daisuke Ishiwatari, le père de la série Guilty Gear, nous dévoilait le prochain volet de sa licence. Au programme : travail de redesign, ajout de nouvelles mécaniques et une technique visuelle toujours plus poussée. La hype était totale. Près d’un an après son annonce, le grand public a enfin pu s’essayer à Guilty Gear -Strive- grâce à la bêta fermée s’étant déroulée du 16 au 19 avril. Au final, sept personnages et trois phases de online plus tard, qu’est-ce que le jeu nous propose ?
Preview réalisée à partir d’une clé obtenue suite à inscription
Vers la casualisation du genre ?
Qu’on se le dise, plus de 20 ans après la sortie du premier opus sur PlayStation et plus d’une quinzaine d’épisodes à son actif, Guilty Gear n’a jamais réellement percé dans le monde impitoyable du Versus Fighting. Malgré un système de jeu bien à lui, à la fois simple et complexe et d’une grande richesse, la série a toujours fait profil bas face à des ténors comme Street Fighter ou Tekken. Si Xrd possédait de grandes qualités, cela n’aura pas été suffisant pour forger une communauté aussi solide que celle de la concurrence. Probablement voué à rester un jeu de niche toute sa vie, il semblerait que Daisuke Ishiwatari et son équipe de Team Red aient décidé de donner à Guilty Gear une toute autre direction, quitte à lui faire perdre une grande partie de son identité propre.
Pour ceux qui ne seraient pas connaisseurs de la licence, Guilty Gear a très longtemps reposé sur le concept suivant : 5 touches de coups (Punch, Kick, Slash, Heavy Slash et Dust) pouvant s’exécuter en gatling combo – donc la possibilité de connecter un coup à l’autre dans un ordre de puissance croissant. À partir de là, et ce malgré quelques restrictions, le joueur pouvait donner naissance aux combos les plus fous. Associé à cela : les Roman Cancels permettant d’annuler n’importe quel coup par un autre au prix d’un pourcentage sur sa barre de Tension. Guilty Gear semble vouloir abandonner en partie ce système pour quelque chose de plus universel. S’il était possible de connecter Punch, Kick, Slash, Heavy Slash dans un même combo, ceux de Guilty Gear -Strive- ne s’opèrent qu’à la condition de débuter par un Slash ou un Kick, un peu à l’image d’un Medium Punch ou Kick sur Street Fighter V. Cette nouvelle orientation provoque la grogne du côté des puristes, grogne à laquelle Arc System Works semble faire la sourde oreille. Ce nouveau parti pris rend d’ailleurs le jeu plus complexe que « Beginner Friendly ».
Dans les autres modifications majeures présentées par la bêta, l’impossibilité de claquer son Burst à l’utilisation d’un Overdrive (équivalent d’une Super ou Ultra dans un jeu comme Street Fighter) afin de booster les dégâts de ce dernier. Notons la disparition totale (au moment de la bêta) des Instant Kills, pourtant présents depuis le tout premier opus jusqu’à Rev2, faisant l’un des charmes de la série notamment avec ses mises en scènes badass depuis Xrd –SIGN-. Espérons que ce choix est une volonté de la part d’Arc System Works de nous garder quelques surprises sous le coude. L’utilisation du Dust est encore nébuleux dans ce Guilty Gear -Strive- et semblant beaucoup plus limité que par le passé. Cette mécanique permettait à son utilisateur d’envoyer son adversaire valser à l’autre bout de l’écran ou dans les airs, ce qui pouvait ouvrir sur des combos dévastateurs et impressionnants. Fort heureusement, tout n’a pas été jeté à la poubelle. Les notions de Air Dash, Instant Block, Fautless Defense, Penality sont préservés… mais dites adieu au Blitz Shield, Dead Angles et Danger Time.
Une bêta pour le moins calamiteuse
Pour une première bêta fermée, le résultat fut loin d’être satisfaisant d’un point de vue technique. Si le jeu reste visuellement sublime, HUD mis à part malgré une refonte évidente comparée au tout début, le système de lobbies et son netcode sont d’un tout autre temps. Cette bêta semble vraiment avoir été précipitée. Lobbies instanciers rendant le matchmaking avec vos amis compliqué, nombreuses erreurs de connexion lors des tentatives d’initialiser un combat, crash pur et simple de la bêta… Bref, il faut revenir en 2016 pendant les phases de bêta de Street Fighter V pour se rappeler un tel carnage. Qui plus est, Guilty Gear -Strive- se targue d’intégrer un rollback netcode pour son jeu… mais ne le met pas en application pour sa bêta, ce qui engendre des matchs quelque peu compliqués si vous ou votre adversaire ne disposez pas d’une connexion de qualité. L’absence d’un simple mode training est également à déplorer. Difficile d’appréhender le nouveau système de jeu que le titre veut vous proposer quand vous n’avez, au choix, que le Online ou un mode VS Com qui vous renvoie automatiquement à l’écran titre entre chaque match.
Pour finir, touchons un mot sur l’équilibrage actuel du jeu. Bien que celui-ci soit susceptible d’être corrigé, la version de cette bêta ne fait juste aucun sens. Certains personnages comme Sol, Potemkin ou May sont beaucoup trop puissants comparés à d’autres. Il est aisément possible pour ces personnages d’infliger 80% de dégâts en à peine plus de 6 coups, Overdrive compris, quand d’autres peinent à infliger un tier de barre. À titre d’exemple, Chipp Zanuff, personnage dit à « Mix-ups » avec des combos longs, puissants mais avec peu de vie en général dans les précédentes entrées de Guilty Gear, devient simplement un perso avec peu de vie dans Strive si vous ne parvenez pas à effectuer de combos en coin contre votre adversaire. Les choppes spéciales, de Sol et Potemkin, sont également des blagues monumentales. À croire que Guilty Gear -Strive- nous incite à ne jamais mettre la garde sous peine de subir une éventuelle choppe qui pourrait nous infliger un tier de barre pour Sol, voire la moitié de vos points de vies pour Potemkin.
Verdict : Douche froide…
Il est toujours délicat d’émettre un avis sur une bêta offrant si peu en un temps si restreint. Cependant, la nouvelle orientation prise par Guilty Gear -Strive- n’est clairement pas la bonne. Rendre le jeu plus accessible n’est pas une mauvaise chose en soit, dénaturer son cœur même est une toute autre histoire. HUD de côté, oui le jeu est magnifique. Oui le jeu est dynamique et peut s’avérer « fun » sur certains aspects mais rendu à ce point, Guilty Gear n’est plus Guilty Gear. Possibilités de combos revus à la baisse, matchs expéditifs, nombreuses mécaniques manquantes… Bref, une déception pour ceux qui auraient espéré que Guilty Gear -Strive- conserve les bases établies au travers de Revelator et Rev2. Le jeu final est censé sortir plus tard cette année, sans date précise. Il semble peu probable qu’il change du tout au tout mais espérons qu’Arc System Works trouvera un juste milieu afin de contenter les plus hardcore de leur fanbase ainsi que de rendre son jeu plus appréciable dans son équilibrage et ses mécaniques qu’il ne l’est aujourd’hui.
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